La Fondation Mohamed Ali Hammi (FMAH) a organisé, au cours de ce mois de juillet 2025, à Tunis, un débat axé entre autres sur le positionnement géopolitique de la Tunisie à la lumière de la nouvelle configuration du monde.

Ont participé à cette rencontre une trentaine de chercheurs pluridisciplinaires et acteurs sociaux : syndicalistes, universitaires, diplomates, journalistes, sociologues, économistes, cinéastes, professeurs de philosophie, chroniqueurs de TV…

En prévision de l’université d’été

Introduisant le débat, Habib Guiza, président de la FMAH et secrétaire général de la Confédération Générale Tunisienne du Travail (CGTT), a situé la rencontre dans son contexte.

Cette rencontre se tient en prévision de l’université d’été de la FMAH prévue pour début septembre 2025.

Il a ajouté que ce rendez-vous de réflexion annuel sera articulé autour du thème : « Penser autrement le développement dans un contexte régional et international instable et en pleines mutations ».

Répondre à la fragmentation du monde

Objectif : proposer un nouvel outil de changement émanant de la société civile tunisienne. Cette initiative se propose d’esquisser les grandes lignes de la place que devrait occuper la Tunisie dans le nouveau contexte géopolitique caractérisé par une fragmentation multiforme du monde.

« La Tunisie a intérêt à diversifier ses partenaires sans état d’âme : c’est une question de survie. »

 

Cette même fragmentation, à la fois politique, socio-économique et culturelle, sera articulée autour de divers scénarios :

  • Exacerbation ou non de la guerre israélo-palestinienne
  • Coopération ou conflit sino-américain
  • Relance ou déclin de l’Union européenne
  • Rattrapage accéléré du Sud global (BRICS)…
  • L’intégration intermaghrébine serait une piste à explorer.

Pour une normalisation intermaghrébine

En réponse à ces éventualités, Ahmed Ounaies, ancien ministre des Affaires étrangères, a mis en garde contre la gravité des guerres illégitimes qui font rage en Ukraine et à Gaza, en Palestine, et leur corollaire : la violation de la légalité internationale.

Pour le cas de la place de la Tunisie dans le nouveau contexte géopolitique, l’ancien ministre des Affaires étrangères a plaidé pour une plus grande intégration de notre pays dans la région maghrébine. Mieux, il s’est prononcé pour une normalisation intermaghrébine et pour une unification de la Libye.

« L’Europe reste un partenaire stratégique… mais pour combien de temps ? »

 

Pour faire inscrire dans la durée cette normalisation, il a proposé la création, au niveau maghrébin, de structures complémentaires spécialisées dans les technologies de pointe et les questions de développement urgentes (eau, énergies renouvelables, nucléaire, éducation…).

L’inextricable question palestinienne

Pour le cas de la Palestine, il a proposé un plan de paix qui serait piloté par la Ligue des États arabes et l’Organisation de la Conférence Islamique (OCI) et validé par l’ONU.

À ce sujet, le chroniqueur de télévision Belbaba Salem lui a rappelé que, depuis le passé, les Arabes étaient pour ce plan de paix, seulement c’est Israël qui a constamment privilégié la tension et les guerres (une dizaine de guerres depuis la création de l’État sioniste) et refusé toute initiative de paix. La meilleure preuve est perceptible à travers l’assassinat par un extrémiste sioniste d’Yitzhak Rabin, Premier ministre d’Israël, un des principaux acteurs des accords d’Oslo et du processus de paix israélo-palestinien. Comprendre : Israël est génétiquement opposé à la paix.

Quelle place pour l’Europe ?

Au sujet des futures relations avec l’Union européenne menacée de déclin, les avis étaient divergents.

Pour certains, dont Hedi Zaiem, économiste universitaire, l’Union européenne demeurera le partenaire stratégique idéal. Ils motivent leur option par plusieurs facteurs : importance de la communauté tunisienne établie en Europe, importance des relations commerciales (80 % des échanges extérieurs de la Tunisie sont assurés avec l’UE), proximité géographique, liens historiques, humains et culturels…

Peut-on encore avoir confiance en l’Union européenne ?

Pour d’autres, les relations actuelles de la Tunisie avec l’UE sont marquées par une crise de confiance. Les Tunisiens n’ont plus confiance en l’Union européenne. Et pour cause : l’Union européenne a apporté un appui inconditionnel aux génocidaires sionistes à Gaza. Cet appui a beaucoup décrédibilisé les Européens auprès des Tunisiens.

« La fragmentation du monde impose de repenser la place de la Tunisie. »

 

C’est pourquoi tout nouveau partenariat doit passer d’abord par une convergence de valeurs dont le respect du droit humain et du droit international.

Vers une stratégie d’autonomie

En ce qui nous concerne, nous estimons que l’idéal pour la Tunisie serait de compter sur elle-même et de dégager à cette fin une feuille de route sur le long terme, particulièrement en matière de valorisation des ressources naturelles du pays (phosphate, tourisme, agriculture, énergies vertes…).

Quant aux futurs partenaires, la Tunisie a intérêt à les diversifier sans état d’âme. C’est un problème de survie et de souveraineté nationale.

Indicateurs clés

  • 80 % des échanges extérieurs de la Tunisie sont assurés avec l’Union européenne.
  • Une dizaine de guerres menées par Israël depuis sa création.
  • La communauté tunisienne en Europe reste un levier stratégique.
  • La normalisation maghrébine proposée inclut des structures sur l’eau, l’énergie et l’éducation.