La ministre du commerce et du développement des exportations, Kalthoum Ben Rejeb, a souligné mardi l’engagement de la Tunisie à promouvoir la concurrence loyale et transparente.

S’exprimant à l’ouverture de la première édition de la journée de la concurrence organisée à Tunis, la ministre a mis l’accent sur le rôle important des politiques de concurrence dans la création d’un climat d’affaires libre et transparent qui contribue à la réalisation de la prospérité économique et sociale.

” La Tunisie continue ses réformes pour encourager l’investissement, promouvoir le développement, créer des emplois et garantir le confort du consommateur et ce, spécialement dans le cadre du programme national de grandes réformes qui a consacré tout un chapitre au thème de la concurrence comme facteur de développement économique permettant de lutter contre l’inflation et de préserver le pouvoir d’achat du citoyen “, a-t-elle dit.

A cet effet, la ministre a appelé les autorités et organes de concurrence à coordonner leurs efforts avec tous les intervenants et avec la société civile et les académiciens et à s’ouvrir sur les partenaires à l’étranger pour pouvoir lever les défis et parvenir à la création d’un climat d’affaires basé sur la transparence et l’égalité afin de promouvoir la concurrence économique nationale.

Pour sa part, Marcus Cornaro, ambassadeur de l’Union européenne (UE) en Tunisie a souligné que l’existence d’une culture de la concurrence au sein de chaque pays est la pierre angulaire d’une économie ouverte et performante.

Dans ce contexte, il a signalé que l’organisation de la journée de la concurrence est une initiative visant à soutenir les efforts de promotion de la concurrence en Tunisie et à créer une communauté de la concurrence dans le pays.

A cet effet, l’ambassadeur de l’UE en Tunisie a souligné l’urgence de doter le conseil de la concurrence des moyens nécessaires pour garantir l’application pratique d’une concurrence loyale dans tous les secteurs.

” Les déclarations récentes du président de la république semblent conforter l’importance politique accordée au chantier des réformes associé à la mise en œuvre d’une politique de concurrence effective “, a-t-il souligné, ajoutant que la révision du cadre législatif et règlementaire concurrentiel tunisien est pertinente et urgente car elle profiterait à la fois aux consommateurs et aux entreprises.

Par ailleurs, Cornaro a indiqué que les investisseurs européens en Tunisie appellent à un certain nombre de réformes visant à améliorer le climat des affaires notamment en ce qui concerne certaines restrictions liées au régime des autorisations.

” Toute sortie de crise économique et financière d’un pays passe à travers une meilleure performance du secteur économique pour laquelle le pays a tout le soutien de l’UE “, a-t-il soutenu.

S’exprimant à cette occasion, Fritz Jung, chef de la coopération allemande à l’ambassade d’Allemagne en Tunisie a souligné qu’en Tunisie les stratégies nationales définissent le secteur privé en tant que moteur de croissance.

” Cela nécessite évidemment un environnement concurrentiel sain équitable et transparent “, a-t-il estimé.

D’après Jung, la Tunisie est un pays qui a fait de grands progrès dans de nombreux domaines, néanmoins il reste encore du chemin à parcourir pour garantir la concurrence loyale saine et équitable.

Dans ce sens, il a souligné l’importance de promouvoir la concurrence pour stimuler l’innovation, accroitre la productivité et créer un environnement propice à l’investissement.

” Les analyses économiques montrent clairement que le rythme de création de nouvelles entreprises en Tunisie est très bas surtout les entreprises innovantes et nouvelles qui veulent entrer dans certains secteurs et se voient confrontées à des lourdeurs administratives et des défis règlementaires propres à chaque secteur souvent dominé par des intérêts particuliers des agents économiques privés et publics existants “, a expliqué Jung.

Il a, en outre, signalé que la promotion de la concurrence et l’amélioration de la compétitivité de l’économie tunisienne permettront à l’économie nationale de s’intégrer davantage dans les chaines de valeur mondiales.

” L’Allemagne est déterminée à soutenir la Tunisie dans ses efforts visant à promouvoir la concurrence qui est la clé d’une économie solide équitable innovante et durable “, a-t-il assuré.

Pour Frédéric Jenny, président du comité de la concurrence de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) la concurrence donne la possibilité aux acteurs économiques de saisir des opportunités et d’innover sans être victimes d’obstacles réglementaires ou stratégiques.

” Elle donne aussi la possibilité aux consommateurs de bénéficier d’un meilleur rapport qualité prix et d’une grande innovation dans leur consommation “, a-t-il expliqué.

Selon l’intervenant, les victimes de l’absence de la concurrence en Tunisie sont les jeunes.

” En effet, en dépit d’une formation excellente particulièrement dans ce pays, les jeunes ont des difficultés à trouver des emplois dans le tissu économique et sont obligés de se réfugier dans l’économie informelle”, a-t-il dit.

Outre les jeunes, Jenny estime que les ménages sont aussi victimes de l’absence de la concurrence puisque leurs ressources limitées.

Le responsable de l’OCDE a souligné que toutes les composantes de la société devraient être associées à la promotion de la concurrence pour changer le pays, libérer les énergies et lutter contre les pratiques anticoncurrentielles.

Parmi les anomalies qui ralentissent le fonctionnement compétitif et efficace des marchés en Tunisie privant ainsi le pays et sa population de précieuses opportunités économiques et d’emploi, Frédéric Jenny a cité la présence de l’Etat à travers les entreprises publiques qui dominent de nombreux secteurs ou à travers des contrôles administratifs qui parfois entravent indûment la liberté économique sans qu’il y ait un grand bénéfice pour la société.

Il a également cité le niveau élevé de barrières à l’entrée et les procédures administratives qui sont extrêmement difficiles à satisfaire.

Il a également évoqué le manque d’impact des organes de régulation de la concurrence dans un contexte caractérisé par une forte concentration de l’activité dans plusieurs secteurs économiques.

Toutefois, le responsable a indiqué que des solutions existent pour promouvoir la neutralité concurrentielle, réduire les barrières à l’entrée et renforcer l’application du droit à la concurrence.

Pour ce faire, il a souligné la nécessité de renforcer les ressources humaines et matérielles des organes de concurrence et en particulier du conseil de la concurrence pour permettre le bon fonctionnement et l’indépendance de l’autorité de régulation.

” Les ressources humaines et budgétaires allouées aux organes de la concurrence en Tunisie et en particulier au conseil de la concurrence restent très modestes selon les normes internationales malgré la légère amélioration de la dotation du budget cette année “, a-t-il fait savoir.

Etant donné les contraintes qui pèsent sur les finances publiques, l’intervenant propose des pistes de financements afin de permettre au conseil de s’autofinancer.

Dans ce contexte, il a appelé à la mise en place de redevances versées par les entreprises qui sont soumises à l’obligation de notification des concentrations dans le cadre de la refonte du régime des contrôles des concentrations.

Le président du comité de la concurrence de l’OCDE a, par ailleurs, salué l’engagement politique de la Tunisie en faveur d’une économie ouverte et performante.

La première édition de la journée de la concurrence est organisée par le ministère du Commerce et du Développement des Exportations et le Conseil de la Concurrence avec le soutien du ministère fédéral allemand de la Coopération économique et du Développement (BMZ), de l’OCDE et la délégation de l’Union européenne en Tunisie.

Cette initiative est développée dans le cadre d’un projet de soutien aux organes de la concurrence en Tunisie financé par le BMZ via le mécanisme Dispoflex et mis en œuvre par la Gesellschaft für internationale Zusammenarbeit (GIZ) conjointement avec l’OCDE.