Un programme de réformes de 70 pages touchant tous les départements ministériels et annonçant des changements considérables dans le paysage économique national. Treize ministres sont intervenus dans la journée du 7 juin, à la Cité de la culture à Tunis, pour parler chacun des réformes qui seront incessamment réalisées dans son ministère.

Nous publierons en 4 parties les synthèses des interventions respectives des ministres de l’Industrie, des Finances, de l’Economie et du Commerce.

Encourageantes et engageantes ont été les mesures énoncées par les ministres économiques si réalisables, car autant les annonces paraissent rassurantes autant les expressions du style « nous allons », « nous comptons » peuvent inquiéter à juste titre d’ailleurs.

Un exemple plus qu’édifiant : le gouvernement promet depuis des mois le raccordement des centrales photovoltaïques au réseau de la STEG mais ne réussit ni à faire respecter la loi, ni à protéger les investisseurs qui risquent la faillite, ni à préserver l’image de la Tunisie à l’international.

Neila Nouira Gongi, ministre de l’Industrie, des Mines et de l’Energie, n’est pas allée par quatre chemins. Elle est allée droit au but réaffirmant l’importance de l’énergie pour le développement et la stabilité économique, et en déclarant avoir appréhendé une approche qui s’articule en trois axes : la sécurité énergétique, la gouvernance et le développement durable.

La ministre de l’Industrie a rappelé à ce propos que le déficit énergétique de la Tunisie a atteint 48% en 2021, dépassant ainsi de loin les 10% de 2010. Parallèlement, la consommation a augmenté de 40% en 10 ans. Ceci a entraîné un déficit commercial, a nui aux équilibres financiers des entreprises publiques et a lourdement pesé sur le budget de l’Etat.

Neila Nouira Gongi a réaffirmé l’importance de l’énergie pour le développement et la stabilité économique

Ceci pour ce qui est des facteurs endogènes. S’agissant du contexte international, nul n’ignore les conséquences de la guerre entre la Russie et l’Ukraine sur les cours des hydrocarbures. La flambée des prix ne pouvait épargner une Tunisie qui a construit son scénario loi des finances 2022 sur la base de 75 $ le baril de pétrole. Un prix qui balance aujourd’hui entre les 120 $ et les 123 $.

Libéraliser l’importation des hydrocarbures

Pour réduire le déficit énergétique, les maîtres-mots sont la vérité des prix et les énergies renouvelables. « Nous comptons nous orienter progressivement vers le réajustement des prix de vente du carburant à la pompe. Nous avons également décidé de libéraliser l’importation des hydrocarbures dans note pays, ce qui ne se fera qu’après avoir atteint la vérité des prix », a affirmé la ministre de l’Industrie laquelle précise que le rôle de la STIR (Société Tunisienne des Industries de Raffinage) restera aussi prépondérant dans la sécurisation de l’approvisionnement stratégique du pays en hydrocarbures et le développement des capacités de stockage.

Les prix de l’électricité seront révisés à la hausse, mais les foyers modestes ne sont pas concernés par les nouvelles augmentations

Des efforts supplémentaires seront déployés ans le contrôle des circuits de distribution des bouteilles de gaz pour la consommation domestique, produits qui devraient atteindre la vérité des prix à l’horizon 2026.

Les prix de l’électricité seront aussi révisés à la hausse sachant que, selon la ministre de l’Industrie, 85% des foyers dont la consommation ne dépasse pas les 200 KWT mensuellement ne sont pas concernés par les nouvelles augmentations.

Rationaliser la consommation énergétique

Nouira Gongi a aussi annoncé des programmes d’accompagnement pour rationaliser la consommation énergétique allant dans le sens de plus d’efficacité, et ce aussi bien par les entreprises de transport publics par rapport à la gestion des flottes, les opérateurs économique que les particuliers.

10 milliards de dinars d’investissements dans les ER d’ici 2030 ?

Un autre programme d’extrême importance a été mis en place par le ministère de l’Industrie et des Mines pour réussir la transition énergétique et réaliser l’indépendance énergétique.

Le gouvernement a adopté le programme de production de l’électricité ER pour la période 2022/2025

Une œuvre difficile au vu de la résistance acharnée des syndicats de la STEG. Le gouvernement, depuis 2015, a approuvé des dizaines de projets pour la production de l’énergie photovoltaïque dont un seul est raccordé au réseau de la compagnie nationale.

« Nous voulons atteindre 35% de production électrique à partir des énergies renouvelables (ER) d’ici 2030 par un total d’investissements qui dépasse les 10 milliards de dinars et réduire de 35% la demande sur la consommation énergétique. Le gouvernement a d’ores et déjà adopté le programme de production de l’électricité ER pour la période 2022/2025 avec pour objectifs : éclairer les investisseurs sur les opportunités que leur offre la Tunisie dans le secteur des énergies propres, créer un environnement compétitif et attirer les opérateurs internationaux intéressés par ce secteur. Un appel d’offres international pour la production de 2000 MWT sera lancé fin juin ».

Pour accompagner la transition énergétique, le gouvernement a prévu un plan de modernisation du secteur de l’électricité…

Le plan adopté par le gouvernement pour le développement des ER compte aussi la réforme du cadre réglementaire qui gère le secteur et sa simplification pour raccourcir les délais d’accord des autorisations. Cela commencera par la numérisation du process et sera suivi par la création d’une instance régulatrice dans le secteur de l’électricité pour une meilleure gouvernance et plus de transparence.

Pour accompagner la transition énergétique, le gouvernement a prévu un plan de modernisation du secteur de l’électricité pour qu’il ne soit pas en décalage avec les développements des nouvelles énergies. La Tunisie ambitionne de créer un marché de l’électricité en relation avec l’Algérie, la Libye et l’Europe.

La mobilité électrique figure elle aussi au programme, et le ministère de l’Industrie planche sur la mobilité électrique en encourageant l’usage des voitures électriques ou l’implantation de bornes électriques dans les stations-services.

Tout cela est bien beau mais des discours à l’exécution, il y a les partenaires sociaux et l’incapacité du gouvernement à aller au bout de ses programmes.

Najla Bouden changera-telle la donne ?

Wait and see.

Amel Belhaj Ali