Travailler sur l’amélioration du niveau de vie qui ne peut être réalisé que par le travail mais en développant la culture du travail, les décisions politiques ou administratives n’y changeront rien. Tout développement doit être le fruit du travail, de l’ambition et de la foi en son pays et la capacité de tous de le projeter vers le mieux. C’est la profonde conviction d’Afif Bejaoui, président exécutif du groupe Bukhatir en Tunisie.

Suite et fin de l’interview « Tunis Sport City ».

WMC : Vous avez parlé du voisinage, cela poserait-il problème pour vous en tant qu’investisseurs ?

Afif Bejaoui : Nullement pas, mais c’est un dossier à traiter. Au niveau de Zaghouan, il y a des terrains appartenant à des familles qui vivent là-bas depuis longtemps. Les bordures doivent être réaménagées parce que nous refusons de monter des murs de séparations. Nous comptons investir dans l’amélioration des voies menant à ces quartiers pour faciliter l’accès de leurs habitants à leurs résidences dans de meilleures conditions. Nous ne voulons pas de ghettos dans la zone, c’est à un voisinage de qualité que nous aspirons et cela passe par un meilleur entretien de la zone et de ses infrastructures.

Esthétiquement, socialement, il va y avoir un bien-être partagé entre nous, et nous y veillerons.

Et les municipalités dans tout cela ?

Les municipalités ont un héritage catastrophique. Nous sommes en train de le traiter avec les autorités municipales du Kram sur le terrain pour ce qui est de la commune sous sa responsabilité. Fort heureusement, avec La Goulette il n’y a pas de problème d’environnement physique puisque les limites se situent en bordure de la route centrale et il n’y a pas d’accessibilité entre les zones, il n’y a pas de passage avec les jardins de Carthage aussi, il n’y a pas d’habitants, aucun aspect social.

Qu’en est-il de la commercialisation de vos résidences, quand on sait qu’en situation de crise, les très riches ne sont pas vraiment touchés ? Cela représente une opportunité intéressante non ?

Parce que la clientèle est la même et n’est pas touchée par la crise, elle puise dans ses réserves, et elle est à l’abri, et c’est la classe moyenne qui subit le poids des crises, et c’est dangereux. En Europe, la classe richissime tourne autour de 20% de la population, mais en Tunisie, ça concerne 3 ou 4% un max de 10%. Les prix de nos résidences se situent dans les fourchettes de prix des logements haut de gamme en Tunisie. Cela dit, nous ne vendrons pas qu’aux Tunisiens.

Qu’en est-il du complexe hôtelier ?

Il n’y a pas de complexe à proprement dire. Il s’agit de 6 hôtels dont un pour la partie golf, avec le Club house, un autre pour les sportifs, un hôtel avec le mall. Ce sont des hôtels de ville.

Comment comptez-vous marketer les hôtels ?

En toute franchise, nous n’avons pas encore réfléchi à la stratégie, parce que nous pourrons avoir des partenaires nationaux.

Tunis Sport City sera-t-elle une ville smart ?

Nos bâtiments seront intelligents avec des parkings intelligents reliés qui guideront la clientèle pour ce qui est de la place, de la disponibilité, des moyens d’y accéder, l’endroit, comme ce que nous voyons dans les parkings des plus grandes capitales du monde. Nous nous engagerons aussi dans la maîtrise de l’énergie et dans le développement durable.

Donc vous allez intégrer l’énergie verte ?

Absolument. La conception écologique sera déterminante, qu’il s’agisse de l’intégration de matériaux amis avec la nature, de la fibre optique ou de l’isolation thermique. Nous ferons tout pour un total bien-être dans la zone. Nous ferons tout notre possible pour assurer une circulation fluide dans la zone pour qu’on ne trouve pas de difficultés à y accéder ou s’y déplacer.

Nous avons plus de places de parking qu’il n’en faut par rapport aux normes. Il y aura aussi des pistes pour les cyclistes, des parcours pour les joggings, pour les piétons. Les voieries sur l’axe principal sont de 55,5 mètres de largeur, c’est vraiment exceptionnel. C’est pour cela que 26% des équipements vont dans la voierie et les bordures de route.

Qu’en est-il de la dimension RSE dans votre projet ?

Vous mettez le doigt sur un sujet qui m’intéresse beaucoup. Nous investirons dans des collèges, des maisons de jeunes et centres de soins de base. Nous fonderons un mini-club de golf et offrirons des formations d’initiation à ce sport (que les gens pensent être un sport élitiste) aux jeunes des quartiers. Nous investirons aussi dans des clubs de sciences et d’informatique, ça c’est la dimension sociale.

Qu’en est-il de la culture ?

Je considère que c’est capital. Il y a deux dimensions que j’aurais aimé intégrer dans le projet : la dimension culturelle et la dimension éducationnelle. J’aurais préféré investir dans l’éducation, par exemple dans un petit campus sur le site en partenariat avec une grande université internationale, ça sera un grand plus pour le projet, et sera à la portée de nos jeunes ici en Tunisie.

Et vous pensez pouvoir le faire ?

Je travaillerai sur ce projet. Voyez ce qu’a fait si Mahmoud Triki. Il a une véritable audience internationale, son campus est de grande renommée. L’université est aussi un investissement gagnant. Savez-vous que 9 000 étudiants suivent leurs études dans les universités de Bukhatir Groupe ? Ce sont de grandes universités où les investissements sont très avantageux. Les familles tunisiennes consacrent des budgets importants à l’éducation de leurs progénitures. Nous pourrions peut-être faire en sorte de leur offrir les moyens d’assurer leurs études universitaires ici en Tunisie, des études répondant aux normes des plus grandes universités du monde. Ça sera plus rentable pour tout le monde, et pour nous, l’investissement sera intéressant.

Aujourd’hui, deux composantes manquent au projet : la culturelle et l’éducationnelle. La Cité de la culture à Tunis, c’est très beau, mais je pense qu’il faut plus investir dans les galeries de peinture, le cinéma et autres lieux culturels. Les multiplex pour le cinéma sont très rentables et suscitent une dynamique commerciale importante.

Quel est votre sentiment par rapport aux engagements de l’Etat, surtout dans une situation où les gouvernements changent vite ?

Je suis certain que les ministres du gouvernement actuel sont conscients de l’importance de l’engagement dans ce projet ; la Banque centrale aussi. Ils sont conscients de l’importance et de la nécessité du retour des investisseurs étrangers. Ils sont conscients de l’importance du retour de l’investisseur local aussi. Sur ce plan-là, nous n’avons pas d’appréhension. J’espère que l’administration suivra. Entre le politique et l’administration, l’approche n’est pas toujours la même. Nous traitons avec les administrations du ministère de l’Equipement, mais aussi avec les municipalités. Pour l’instant, notre collaboration avance bien et c’est rassurant pour les prochaines étapes du projet.

Entretien conduit par Amel Belhadj Ali

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