Ce qui se passe maintenant en Tunisie dans le domaine de l’environnement et les atteintes répétées à la nature et à l’espace public est le résultat d’un système de gestion de déchets défaillant et obsolète. Il s’agit aussi, d’une mauvaise gestion de la part de l’administration tunisienne, au niveau de tous les maillons de la chaîne, a affirmé Hamdi Chebâane, expert en environnement et protection de la nature et membre du Forum des droits économiques et sociaux (FTDES).

“C’est pour cela, il faut responsabiliser tout le monde et gérer le problème dès la source. Tout producteur ou détenteur d’un déchet est responsable de ce déchet, la règle est simple, il faut juste l’appliquer”, estime l’expert, dans une déclaration à l’Agence TAP.

Il estime “grand temps que la justice s’occupe du dossier de l’environnement et des crimes environnementaux, qui se multiplient dans l’impunité totale. Traiter avec ces actes irresponsables et ces crimes environnementaux implique nécessairement, une refonte totale du système de gestion des déchets en Tunisie et aussi, un durcissement des sanctions contre les contrevenants”.

Chaque ministériel doit gérer ses déchets

L’environnement et la santé humaine sont plus que jamais mis en danger en Tunisie. Depuis l’éclatement du scandale des déchets importés d’Italie, les atteintes et les crimes environnementaux se succèdent d’une façon remarquable, dans plusieurs localités et régions du pays.

C’est ainsi que vingt tonnes de déchets à 80% d’origine inconnue, dont la moitié a été enfouie et l’autre illégalement incinérée, ont été découvertes à Rouisset (Kairouan), des déchets dangereux (piles, batteries et déchets électroniques) ont été déversés sur la plage de Radès (banlieue sud de Tunis) et des déchets ont été jetés dans la nature à Raoued par une société installée dans le gouvernorat de l’Ariana.

“Il est temps de responsabiliser tout le monde. Chaque département ministériel doit être responsable de ses déchets. Le ministère de l’Industrie doit s’occuper des déchets des usines et des entreprises sous sa tutelle, le département de l’Agriculture devrait être responsable des déchets verts et des pesticides. Celui de l’Environnement doit jouer le rôle de contrôleur et d’assistant technique et sanctionner les contrevenants, car il ne peut pas tout gérer “, souligne Chebâane.

De cette manière, le département de l’environnement pourrait même créer des centres et des écoles de formation dans le domaine du traitement des déchets et du recyclage et d’autres filières qui pourraient créer des emplois avec un effet domino”, a t-il encore développé.

Tout est parti de l’affaire des déchets importés d’Italie

Pour Chebâane, ” c’est le scandale des déchets importés d’Italie, qui a mis la question de l’environnement, sous le feu des projecteurs et c’est une bonne chose…

Car, les crimes environnementaux qui passaient, auparavant inaperçus, sont désormais exposés grâce aux réseaux sociaux et aux alertes des particuliers et de la société civile et par conséquent de plus en plus médiatisés.

” Les déchets importés d’Italie auraient pu être renvoyés dans un délai très court, si l’administration tunisienne avait réagi plus vite, en appliquant les lois et en traitant rigoureusement, avec tous les contrevenants. Ceci prouve que les parties impliquées dans cette affaire sont nombreuses et à tous les niveaux”, selon ses dires.

En effet, ” la loi est claire et les dispositions de la convention de Bâle aussi. Les déchets italiens sont des déchets ménagers collectés et classés dangereux, conformément au Code de l’Environnement et du code de classification des déchets de l’Union européenne”.

En effet, le règlement ” CE ” concernant les transferts de déchets transpose dans le droit européen les dispositions de la convention de Bâle et de la décision” C(2001)107/Final” de l’OCDE. Ce règlement, directement applicable dans tous les Etats membres, établit les procédures, les conditions et les exigences à respecter dans le cadre des transferts transfrontières de déchets, y compris entre Etats membres.

Conformément aux articles 34 et 36 de ce règlement, l’exportation de déchets destinés à être éliminés hors zone UE/AELE est interdite, de même que l’exportation de déchets dangereux de l’Union vers un pays auquel la décision de l’OCDE ne s’applique pas.

Le Forum des droits économiques et sociaux va tenir une conférence de presse, cette semaine, pour divulguer des nouveautés concernant le scandale des déchets importés d’Italie et aussi d’autres atteintes à l’environnement et donc aux droits des citoyens à un environnement sain.

Pour rappel, l’article 45 de la Constitution tunisienne stipule que “l’Etat garantit le droit à un environnement sain et équilibré et la contribution à la sécurité du climat. Il incombe à l’Etat de fournir les moyens nécessaires à l’éradication de la pollution de l’environnement”.