Résoudre le problème de l’habitat anarchique en Tunisie nécessite, selon l’architecte et expert international en bâtiment, Majdi Zribi, une meilleure cohérence entre les politiques de l’habitat et celles de l’aménagement territorial et de développement social et régional.

Dans une interview accordée à TAP, l’expert considère que “les zones anarchiques qui se sont développées un peu partout autour des grandes villes, parfois au détriment des terres agricoles, résultent d’une régression progressive du rôle de l’Etat en matière d’habitat social durant les années qui ont précédé la révolution, mais aussi de l’absence de contrôle durant la période postrévolutionnaire et des difficultés économiques ayant favorisé davantage le phénomène de l’exode “.

” L’Etat doit reprendre pleinement son rôle afin de favoriser une meilleure harmonie de l’espace urbain et de satisfaire les besoins des couches sociales à revenus faibles et moyens en matière de logement “, a-t-il recommandé.

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Réunir toutes les commodités

Zribi estime également que ” les différents programmes relatifs à l’habitat social doivent veiller à rapprocher les habitats conçus des pôles des grandes villes afin de susciter l’intérêt des citoyens. Il faut par ailleurs veiller à ce que toutes les commodités nécessaires soient disponibles (écoles, centres de soins, assainissement, éclairage public, routes respectant les normes, internet, transport public, terrains de sport, maisons de cultures…) afin que ceux qui logeront dedans ne soient pas contraints de les quitter ultérieurement pour chercher ce genre de commodités. Il faut que le cadre global respecte le droit des citoyens aux différents services publics “.

” Les mêmes conditions doivent être respectées pour l’aménagement des lotissements sociaux “a-t-il souligné, estimant par ailleurs que ” la politique des prix des habitats doit prendre en considération les capacités financières des ménages tunisiens “.

Plus d’efficacité des plans et programmes nationaux

Pour éviter que des agglomérations urbaines ne soient à chaque fois submergées des eaux pluviales et d’évacuation, “compliquant le vécu des citoyens”, l’expert international recommande plus d’efficacité des plans nationaux de protection des villes contre les inondations et contre toutes sortes de catastrophes naturelles notamment avec le phénomène universel des changements climatiques.

Une meilleure gestion est également préconisée des terres domaniales non-exploitées, notamment celles situées prés des pôles des grandes villes en les érigeant en des centres urbains correctement viabilisés et capables d’atténuer les pressions sur les zones urbaines déjà existantes.

Aussi, les programmes de sauvegarde et de réhabilitation des anciennes Médinas devraient être optimisés en collaboration avec les autorités compétentes afin d’y améliorer les réseaux d’assainissement, l’éclairage public, les actions de propreté, la sécurité. L’objectif de ces actions est de “retenir leurs habitants qui se trouvent souvent contraints de quitter ces anciennes villes, voire même de se réfugier dans des zones anarchiques faute des commodités nécessaires”.

Majdi Zribi plaide en outre en faveur d’un surcroît d’efforts en matière de développement régional en dotant les citoyens dans les régions de toutes les conditions nécessaires à une vie digne, afin d’éviter le phénomène d’exode qui complique davantage le problème de l’habitat anarchique autour des grandes villes et expose les habitants des zones anarchiques à toutes sortes de risques.

Viabiliser les anciens quartiers anarchiques…

S’agissant des quartiers anarchiques déjà existants, Zribi estime que ” l’intervention de l’Etat pour régulariser la situation dans ces quartiers ne doit pas se limiter à la régularisation foncière. Il faut que ces quartiers soient correctement viabilisés et d’y apporter le confort social nécessaire “.

D’après l’architecte et expert international en bâtiment, “il faut aussi que toutes les parties prenantes (ministères de l’équipement, de l’intérieur, de l’environnement, des domaines de l’Etat, du transport, des technologies, de l’éducation…municipalités, autorités régionales), soient suffisamment mobilisées pour prévenir l’émergence de nouvelles zones anarchiques et de faire respecter les plans et les programmes nationaux d’aménagement urbain “.
“C’est un effort national dont l’objectif est de concilier la satisfaction des besoins et les droits des citoyens en matière de logement et le respect des exigences d’un développement urbain cohérent, inclusif et durable “.

L’habitat anarchique et les politiques et stratégies de développement des zones anarchiques et de lutte contre leur expansion est la thématique principale, rappelle-t-on, du 6ème congrès arabe de l’habitat, qui se tient en Tunisie, les 22 et 23 décembre 2020.