Les anciens responsables et chefs d’entreprise conviés par la Commission des finances, de la planification et du développement de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) à un débat sur les «solutions possibles pour surmonter les difficultés financières dans le cadre du projet de loi de finances pour l’année 2021» ont proposé une dizaine de solutions pour sortir de l’impasse budgétaire.

Comment sortir de l’impasse budgétaire ? Après avoir rejeté le projet soumis par le gouvernement, les députés ont voulu donner la parole aux experts, dont d’anciens ministres. A cet effet, la Commission des finances, de la planification et du développement de l’ARP a récemment organisé 2020 un séminaire traitant des «solutions possibles pour surmonter les difficultés financières dans le cadre du projet de loi de finances pour l’année 2021 » ; séminaire auquel elle convié Taoufik Rajhi (ancien ministre auprès du chef du gouvernement chargé des Grandes réformes), Ridha Chalghoum (à deux reprises ministre des Finances, entre 2010 et 2011, et de 2017 à 2020), Fadhel Abdelkefi (ancien ministre du Développement, de l’Investissement), Taoufik Baccar (patron de l’agence PBR Rating, et ex-ministre du Développement économique, des Finances, et gouverneur de la Banque centrale de Tunisie), Abdelbasset Samari (chef d’entreprise -Robobat Afrique), Houcine Dimassi (universitaire, ancien ministre des Finances) et Habib Karaouli (PDG de Capital African Partners Bank – CAP Bank).

Durant cet échange, une douzaine d’idées et de propositions ont été mises sur la table. Dans leurs interventions, ces experts ont été quasi unanimes à mettre en avant en premier la nécessité de réformer le système des subventions aux produits de première nécessité et les finances publiques.

Le dispositif de subventions, d’abord. Fadhel Abdelkefi trouve problématique que «les subventions n’aillent pas à ceux qui en ont besoin, surtout en ce qui concerne les produits de base et les hydrocarbures».

Habib Karaouli, Taoufik Baccar et Taoufik Rajhi appellent à revoir ce dispositif afin de mettre fin à cette situation. Ridha Chalghoum recommande de faire cela de «manière progressive ».

La réforme des finances, ensuite. A cet effet, Habib Karaouli suggère de «prendre des mesures pour comprimer les dépenses, parmi lesquelles pourrait figurer le fait d’obliger les ministères à réduire leur budget de gestion, sauf pour les ministères chargés de l’Education, de la Justice, de la Culture et de la Santé». Une telle mesure permettrait, d’après lui, d’économiser près de 3,5 milliards de dinars.

Houcine Dimassi envisage ce qui paraît à beaucoup inenvisageable aujourd’hui : que le gouvernement négocie avec l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) pour «reporter certaines augmentations salariales». Taoufik Rajhi est lui aussi pour la négociation, mais avec le Fonds monétaire international (FMI), dans le but de faciliter pour l’Etat tunisien sur le marché financier international.

Parmi les autres mesures que certains experts ont recommandé de prendre figure la réforme de l’Etat, la restructuration des entreprises publiques, la révision du modèle de développement, la «réduction des lourdeurs bureaucratiques», la négociation -encore une fois- avec les fournisseurs afin de reporter le règlement des impayés -mais sur ce point l’accord n’est pas totale, puisque l’un des intervenants conseille, au contraire, de payer les facteurs des opérateurs privés-, la réforme de la fonction publique -dans le but d’en réduire la taille et, par conséquent, la masse salariale-, et la renégociation «certains aspects des accords de libre échange » (proposition de Abdelbasset Sammari).

Deux des experts ont même «osé» appeler à recourir à un remède à propos duquel les divisions en Tunisie sont très profondes : la privatisation. Il s’agit de Taoufik Baccar et Habib Karaouli qui sont d’accord sur la manière de mettre en œuvre cette solution. Les deux proposent de faire un tri parmi les entreprises publiques pour en privatiser quelques-unes et d’utiliser le fruit de leur cession pour financer la restructuration des autres.

Enfin, il est une idée que le p-dg a été le seul à lancer : que l’Etat lance un emprunt obligataire réservé aux Tunisiens Résidents à l’Etranger (TRE) afin de «renforcer leur confiance dans leur pays pour qu’ils contribuent à la réforme » nécessaire pour le redresser.

M.M.