“La Tunisie ne peut aspirer à une relance post-COVID que si elle emprunte un vrai chemin de rupture, en mettant en place des réformes de rupture capables de révolutionner nos manières de faire et de penser “, a affirmé le président du directoire de l’Amen Bank et ancien président de l’Association professionnelle tunisienne des banques et des établissements financiers (APTBEF), Ahmed El Karm.

Intervenant à un ” webinaire ” organisé, mercredi, par l’Institut des hautes études de Tunis sur le thème ” De la pandémie à l’environnement des affaires et de l’investissement …avec quelles banques rebondir ?”, El Karm estime “qu’il y a 4 enseignements fondamentaux à tirer de la crise déclenchée par le COVID-19 “.
” D’abord, le COVID nous a clairement montré que l’Etat doit retrouver son rôle de stratège et de régulateur. Nous avons besoin d’un Etat fort qui décide, qui assume ses responsabilités économiques et sociales et qui fait appliquer la loi. Ensuite, la pandémie nous a aussi montré que les pays qui ont fortement utilisé la technologie sont les pays qui s’en sortent le mieux. La digitalisation doit ainsi, être le principal levier de tout plan de relance ” a-t-il précisé.

Et d’ajouter, ” troisièmement, le COVID nous a enseigné qu’au-delà de leur responsabilité de maîtriser l’inflation, les banques centrales ont des responsabilités centrales, à l’instar de celle d’assurer la liquidité des pays en temps de crise. Et là, pour le cas tunisien, il faut savoir que l’essentiel de la liquidité injectée par la BCT est récupérée par le marché informel, d’où l’importance de prévoir les mécanismes à même de ramener ce marché vers les circuits organisés en créant des canaux de confiance entre le citoyen et l’administration et en améliorant l’inclusion financière ”

” Quatrièmement, a-t-il aussi, noté, le COVID nous a montré qu’il faut revenir vers l’essentiel en développant les secteurs vitaux qui sont de nature à favoriser le développement et la croissance, tout en améliorant le bien-être social à l’instar de ceux de l’énergie, l’agriculture, la santé, l’éducation …cela doit se faire selon des approches innovantes et modernes “.

El Karm considère, par ailleurs, que ” tout plan de relance doit passer inévitablement par la mise en place d’un plan d’ajustement structurel visant à résoudre les déficits budgétaire et extérieur du pays, à travers des mesures audacieuses qui pourraient coûter à certains leurs postes, mais qui remettront le pays sur les rails ”

Quelles responsabilités pour les banques ?

Face à l’importance des chantiers à engager, El Karm a affirmé que ” les banques sont conscientes du rôle qui doit être le leur, dans le soutien de la relance. Elles ont déjà prévu des plans d’action qu’elles communiqueront incessamment, pour développer les paiements mobiles, consolider la digitalisation du secteur bancaire et concrétiser le plan de ” Decashing “.

” Les banques oeuvreront également, à améliorer leurs stratégies de financement des PME, mais il faut savoir que si les PME sont aujourd’hui mal financées c’est parce qu’elles sont mal accompagnées et qu’elles sont incapables de mettre en place la gouvernance qui leur assurera une certaine viabilité. Pour cela, l’Etat doit prévoir l’accompagnement nécessaire aux PME en favorisant le développement d’un écosystème privé capable d’assurer cette tâche “.

” Les plans d’action prévus par les banques prévoient également la mise en place d’une stratégie de financement des startups à travers le développement de produits financiers innovants se basant sur les garanties immatérielles. Les banques travailleront par ailleurs à consolider leurs plans de soutien aux PPP qui seront les principaux vecteurs de développement du pays “.

Toujours selon El Karm ” les banques nationales seront également, face au défi de repenser leurs tailles de manière à faire émerger des géants nationaux capables d’accompagner les entreprises nationales sur les marchés extérieurs “.

Finalement ” les stratégies post-COVID des banques incluront aussi le volet environnement. Le COVID nous a montré comment la nature a repris ses droits avec le repli de l’activité humaine. De ce fait, il faut que nos interventions futures soient plus respectueuses de l’environnement “.

Et de conclure ” si la Tunisie réussit à capitaliser sur sa bonne gestion de la crise sanitaire, à en faire un véritable outil de marketing et à initier de véritables réformes de rupture, je pense qu’une reprise rapide en forme de U reste possible “.