La Commission parlementaire du règlement intérieur a examiné, mercredi 5 février, la correspondance du bureau de l’Assemblée relative à la proposition de modification de la loi électorale déposée par le mouvement Ennahdha le 24 janvier 2020. Cette proposition ne porte que sur l’augmentation de 3 à 5% du seuil électoral.

Selon l’organisation AlBawsala, des députés du groupe démocratique et de celui de Tahya Tounès ont soulevé, lors de la réunion le non respect des procédures juridiques, faisant observer que les motifs de la demande de hâter l’examen de ce projet sont parvenue tardivement au bureau de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).

Ils ont aussi relevé que la version amendée et adoptée par le Parlement n’a pas été signée par le président de la République, exprimant leur appréhension sur le flou qui entoure le projet et sa valeur juridique.

Des membres de la Commission se sont également interrogés sur le timing du projet, notant que la partie qui l’a présenté a évoqué la possibilité de recourir à des élections législatives anticipées.

Après discussion, il a été convenu de demander une deuxième correspondance comportant le projet en question et les arguments approuvés par le bureau de l’ARP et de solliciter l’avis de la présidence de la République concernant la loi adoptée par le Parlement sans être signée par le président lors de la précédente législature.

AlBawsala, qui critique la démarche du mouvement Ennahdha, estime que la priorité consiste aujourd’hui en l’urgence de remédier à l’éparpillement du paysage parlementaire qui, estime l’organisation, a eu des répercussions négatives sur le travail du Parlement.

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AlBawsala souligne, dans le même sens, la nécessité d’œuvrer à l’assainissement du paysage politique à travers, entre autres, la révision du décret-loi sur les partis politiques et le renforcement des principes de la transparence et la redevabilité.

En pleine tractation sur la formation du prochain gouvernement, le mouvement Ennahdha, vainqueur des élections législatives d’octobre 2019, a présenté (fin janvier) une proposition d’amendement de la loi électorale qui se limite aux seules dispositions relatives au “seuil électoral” contenues dans deux articles.

Le bureau de l’Assemblée des Représentants du peuple (ARP) a étudié cette initiative législative avant de la soumettre à la commission de la législation pour hâter son examen.

La proposition d’amendement dispose que les listes candidates ayant obtenu moins de 5% (au lieu de 3%) des suffrages exprimés au niveau de la circonscription ne sont pas concernées par la répartition des sièges.

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De plus, les bulletins blancs et les voix qui sont allées aux listes ayant obtenu moins de 5% des suffrages exprimés au niveau de la circonscription ne seront plus comptabilisés, en vertu de la modification proposée.

Pour les experts en droit -qui estiment nécessaire la révision de la question du seuil électoral pour créer un équilibre au sein du Parlement et dans le paysage politique d’une façon générale- l’amendement des dispositions relatives au financement des campagnes, à la publicité politique, au rôle des médias et au besoin pressant de délimiter les champs entre action politique et action associative n’en demeurent pas moins importantes.

Mouna Kraiem, professeure en droit souligne, concernant le seuil électoral proposé en prévision d’élections législatives anticipées au cas où Fakhfakh ne parviendrait pas à former son gouvernement, profite aux grands partis qui sont capables de rafler la majorité des voix. Cet amendement exclura, par conséquent, les petits partis.

Le professeur de droit public Abderrazak Mokhtar estime, pour sa part, que le timing de l’amendement est inapproprié et dit craindre que cette question ne soit utilisée comme une carte de chantage.

Il a d’ailleurs fait observer que cet amendement ne passera pas dans la mesure où beaucoup de députés n’auraient pas pu être élus sans le système des plus forts restes.

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