Des organisations professionnelles et des composantes de la société civile se disent craindre au sujet des négociations entre la Tunisie et l’Union européenne (UE) sur le projet d’Accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA).

“Plusieurs soupçons et craintes planent sur ce dossier et ses impacts sur l’économie tunisienne, notamment le secteur agricole et certains secteurs professionnels”, ont-ils souligné, mardi 30 avril, lors d’une réunion avec les chefs négociateurs des deux parties, à l’occasion de la tenue du 4ème round des négociations (29 avril-03 mai 2019). Les participants ont également appelé à l’impératif d’associer le secteur privé dans le processus de négociations.

Le vice-président de l’Union tunisienne de l’industrie du commerce et de l’artisanat (UTICA) et coordinateur du secteur privé chargé du dossier de l’ALECA, Hamadi Kooli, a estimé qu’en cas de conclusion de l’accord, l’ALECA ne devrait entrer en application qu’après 20 ans afin de permettre à la Tunisie de bien se préparer avec l’appui de l’UE qui fournira les moyens nécessaires à la mise à niveau des secteurs concernés.

La représentante de l’organisation Solidar Tunisie, Lobna Jribi, a, pour sa part, évoqué l’importance de l’économie numérique pour aider les stratups à s’intégrer dans l’espace européen, en leur facilitant la participation aux offres européennes.

Au cours de son intervention, Jribi a mis l’accent sur la nécessité de réaliser des études scientifiques sectorielles ciblées et actualisées sur l‘impact de l’entrée de l’ALECA sur les différents secteurs en Tunisie.

Quant au représentant du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux, il a exprimé son étonnement devant l’attitude de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) qui n’a pas examiné le dossier de la libéralisation du secteur agricole jusqu’à maintenant alors que les parties tunisienne et européenne insistent sur le fait d’intégrer ce volet (libéralisation du secteur agricole) dans les négociations.

Le responsable s’est interrogé sur les raisons de poursuivre les rounds de négociations au moment ou la Tunisie s’apprête à tenir des élections législatives et présidentielles au cours des prochains mois.

De son côté, le directeur de la commission européenne, et le chef négociateur de la partie européenne, Ignacio Garcia Bercero, a indiqué que la démarche de l’UE n’est pas commerciale. ” Il s’agit d’un projet ayant des dimensions politiques et stratégiques “, a-t-il encore souligné, estimant qu’une meilleure intégration de la Tunisie dans l’espace européen devra servir l’intérêt des deux parties.

Pour le responsable européen, il est impératif que les négociations tiennent compte de l’aspect participatif et de l’application progressive de cet accord.

Le ministre du Transport, Hichem Ben Ahmed, qui est le chef négociateur de la partie tunisienne, a, pour sa part, rassuré les différentes parties que l’ALECA ne menacera pas les intérêts de la Tunisie. ” La Tunisie veille à garantir au maximum les intérêts de l’économie nationale “, a-t-il indiqué, rappelant qu’en cas de conclusion de l’accord sur l’ALECA, le projet sera présenté devant l’ARP.

S’agissant des craintes des organisations quant aux impacts de l’ALECA, le ministre a précisé que les négociations se poursuivent et la date de signature de l’accord n’est pas encore déterminée. Il a dans ce cadre nié toute déclaration de la part du chef du gouvernement sur la date de signature.

Au cours des travaux de cette conférence, un nombre de jeunes ont fait irruption dans la salle pour exprimer leur refus catégorique de l’ALECA qui va nuire, selon eux, à l’économie nationale.