“Les investisseurs n’ont pas besoin d’avantages mais d’un environnement juste et équitable”, estime Naceur Hidoussi, président du Conseil des chambres mixtes de Tunisie, alors qu’il s’exprimait, jeudi 21 mars, lors d’un débat sur les investissements en devises par des résidents étrangers, organisé par la Chambre tuniso-française de commerce et d’industrie (CTFCI).

Hidoussi explique que plusieurs difficultés liées notamment au cadre législatif et aux procédures administratives bloquent la promotion des investissements en Tunisie.

S’agissant du cadre législatif des opérations de change, Hidoussi a signalé que la circulation des devises ne fait plus l’unanimité.

“Cette réglementation, particulièrement pointilleuse, devient contraignante voire bloquante pour une majorité d’investisseurs”, a-t-il indiqué, et qu’en raison de ces blocages, plusieurs sociétés étrangères ont pris la décision de délocaliser leurs comptes courants hors de nos frontières.

Il s’est, en outre, interrogé sur les raisons du retard dans l’institution de l’amnistie de change et le droit de tout Tunisien d’avoir un compte en devises.

“Nous ne comprenons pas pourquoi une telle loi peine à passer surtout qu’elle permettra de renflouer les caisses vides des banques et aidera une économie agonisante, sachant qu’un concurrent de taille opère actuellement à Ben Guerdane”, s’est-il questionné.

Dans ce contexte, il a fait remarquer qu’une vraie banque -plutôt centrique que centrale- existe à Ben Guerdane avec un système de transfert financier des plus complexes et des plus innovants. “Le cours de devises peut changer à deux fois par jour vu le nombre des transactions”, a-t-il dit.

Hidoussi cite également l’impact négatif de l’économie parallèle, indiquant qu’il serait peut-être temps d’envisager de changer les billets de banques vu que l’argent ne se trouve plus dans les banques, selon lui.

“Aidez-nous à continuer à croire en ce pays et aidez-nous à continuer à y investir”, a-t-il souligné à la fin de son intervention.

De son côté, Foued Lakhoua, président de la CTFCI, dira que la Tunisie a plus que jamais besoin d’impulser les investissements étrangers dans les différents secteurs d’activités à l’effet de booster son économie, stimuler la croissance, créer des richesses et notamment de nouveaux emplois.

A cet effet, jouer la carte de l’assouplissement et de la transparence des procédures constitue pour elle la meilleure des pistes à emprunter.

Dans ce cadre, Lakhoua a mis l’accent sur l’importance des dispositions contenues dans la circulaire 2018-14 de la Banque centrale de Tunisie (BCT) qui fixe les procédures et les modalités d’engagement des investissements des non-résidents en devises soumis à la déclaration de la banque centrale de Tunisie ainsi que les procédures de réalisation des transferts des revenus y afférents et le produit de leur cession et liquidation.

“Cette circulaire est un bon message et une étape dans un processus de libéralisation qui devrait concerner les opérations de changes et aboutir à la convertibilité totale du dinar”, a-t-il dit.

Présentant la circulaire 2018-14 de la Banque centrale, Raoudha Boukadida, directrice des opérations en capital à la BCT, explique que celle-ci vise à digitaliser la fiche d’investissement via une plateforme électronique hébergée auprès de la Banque centrale de Tunisie (fiche-invest.bct.gov.tn/FichInvest).

“C’est un support essentiel qui justifie les financements en devises et la régularité de l’investissement en Tunisie”, a-t-elle dit.

Il s’agit également d’instaurer le cadre réglementaire régissant les transferts à réaliser par les IAT (intermédiaires agréés en Tunisie) en faveur de non-résidents au titre de produit réel net de cession ou de liquidation de leurs investissements en Tunisie, en application de l’article 1er du Code des changes et du commerce extérieur et à fixer les conditions de conversion des avances en compte courant associées accordées en devises par des non-résidents, au capital d’une société établie en Tunisie, en application des dispositions du décret gouvernemental n°2017-393 du 28 mars 2017.

L’intervenante a ajouté que cette circulaire favorise la transparence vis-à-vis de l’investisseur, à travers le regroupement dans un même texte des obligations et des droits.

“L’investisseur est informé de ses droits en matière de transferts au titre de son investissement en Tunisie et des obligations lui incombant pour se prévaloir de ces droits”, a-t-elle expliqué, indiquant que cela permet de renforcer la confiance de l’investisseur.

Il s’agit, en outre, d’encadrer pour les IAT le principe de la liberté de transfert (délégation) par le caractère obligatoire de la régularité de l’investissement (opportunité + financement en devises) et d’uniformiser les procédures et modalités d’exécution des transferts réalisés, dans le cadre de la délégation, au titre des revenus et des produits de cession ou liquidation des investissements.

La circulaire permet également de confirmer aux investisseurs non-résidents le bénéfice de la garantie de transfert prévue par l’article 1er du Code des changes et de commerce extérieur au titre de leurs investissements antécédents, de consacrer la fiche d’investissement et l’attestation bancaire d’investissement digitales (selon le cas) en tant que document exclusif confirmant la garantie de transfert et de consolider les systèmes d’informations de la BCT liés à l’investissement en Tunisie, préalable à toute prise de décision se rapportant à la libéralisation progressive du compte capital.

Des investisseurs étrangers et tunisiens, des experts-comptables et des juristes ont assisté au débat et évoqué plusieurs problématiques liées notamment au cadre juridique et aux procédures administratives.