Lazhar Karoui Chebbi, ministre représentant personnel du président de la République, a déclaré, mercredi 27 février lors d’une audition devant la Commission santé et affaires sociales sur le projet de la loi sur l’amendement du Code du statut personnel (CSP), en l’occurrence le 7ème chapitre relatif à l’héritage, est conforme à l’initiative du président sur l’égalité des héritages et à la Constitution de la deuxième République.

Chebbi a indiqué que le projet de loi, initiative du président de la République, fait de l’égalité la règle, tandis que l’exception concerne ceux qui n’ont pas l’intention de rentrer sous la férule de cette loi et qui peuvent saisir la justice à cette fin, avant la mort du testateur.

Il a ajouté que le projet de loi repose sur trois piliers, à savoir les accords internationaux obligent l’Etat tunisien à les appliquer et qui prévoient essentiellement l’égalité des droits et des devoirs entre les deux sexes.

Le deuxième pilier concerne les dispositions de la Constitution de 2014, notamment le chapitre 21, qui stipule l’égalité entre hommes et femmes en matière de droits et de libertés et oblige le président de la République à mettre en application la totalité des textes de loi.

Quant Le troisième pilier, il est à chercher dans le vécu de la femme tunisienne, où elle a enregistré des avancées considérables dans le domaine de l’enseignement et qui a conquis des postes clés au sein de l’Etat, outre ses revenus financiers qui lui permettent désormais de contribuer aux dépenses de la famille au même titre que l’homme.

Concernant la controverse sur le respect du projet de loi du texte coranique, Chebbi a précisé que le projet ne porte pas préjudice au texte coranique, au vu du choix donné au citoyen d’appliquer l’ancien Code du statut personnel et de ne pas s’aligner à la nouvelle loi.

Pour sa part, la porte-parole de la présidence, Saïda Garrach, a déclaré que l’initiative présidentielle repose principalement sur la Constitution qui consacre l’égalité entre les deux sexes, d’où la nécessité de mettre en œuvre les dispositions de la Constitution, et ce en plus de l’engagement pris par l’État tunisien de se conformer aux accords internationaux.

Elle a souligné le rôle de la femme dans la société et sa présence aux postes de décision de l’État, notant que 69% des titulaires de doctorat en Tunisie sont des femmes.

Garrach a souligné à cet égard que la question de l’héritage est fondamentalement économique et non pas religieuse, exprimant son étonnement de la contradiction observée entre la reconnaissance du rôle important des femmes dans la société et la résistance “acharnée” à l’instauration de l’égalité dans la question de l’héritage.

Les députés des différents blocs parlementaire ont surtout mis l’accent sur le fait que les arguments en faveur de cette loi restent vagues et ne concernent pas la problématique de l’héritage. Certains députés ont remis en cause le caractère sélectif dans le choix des accords internationaux, entre ceux qui appellent à l’égalité dans l’héritage et d’autres qui stipulent l’égalité tout court.

Bochra Belhaj Hmida, présidente de la Commission des libertés individuelles et de l’égalité (COLIBE), créée par le président de la République, Béji Caïd Essebsi, le 13 août 2017 pour préparer le rapport concernant les réformes législatives relatives aux libertés individuelles et l’égalité, prélude à ce projet de loi, a pour sa part, exprimé sa réserve quant à une seule et unique lecture possible de l’Islam, et les accusation d’apostasie pour ceux qui soutiennent cette loi.

Elle appelle les députés à “surmonter la peur d’être qualifiés de mécréants et d’adopter cette loi pendant la session parlementaire actuelle”, indiquant que “si ce projet de loi ne passe pas lors de cette session là, il ne passera jamais”.

De son côté, Noureddine Bhiri, député du parti Ennahdha, a mis en garde contre le danger du projet de loi qui porte atteinte aux choix de l’Etat de l’indépendance et tous ses acquis, y compris le Code du statut personnel et le style de vie de la société, s’interrogeant sur l’objectif derrière ce projet de loi qui risque, selon lui, de diviser la société tunisienne.

La députée Soulaf Ksantini a de son côté indiqué que ce projet de loi favorisera une scission au sein de la société, en dépit de l’égalité entre les deux sexes qu’il œuvre à établir.

Ahmed Mechrgui estime que le projet de loi comprend de points positifs qu’il importe de débattre, se déclarant confiant que des consensus seront atteints à ce propos, lors des prochaines sessions.