Mohammed Ayadi, membre de l’Instance nationale de lutte contre la corruption (juge administratif), a appelé le Parlement à soutenir le Pôle judiciaire financier afin de donner plus d’efficacité à son action sur les questions de corruption

Lors d’une réunion tenue lundi 28 courant par la Commission sur la réforme administrative, la bonne gouvernance, la lutte contre la corruption et la gestion des deniers publics à l’Assemblée des représentants du peuple, Ayadi a relevé la persistance de chevauchements des prérogatives entre les institutions impliquées dans la lutte contre la corruption.

Il a proposé de renforcer la coordination entre les organes en renforçant le rôle du Conseil supérieur de lutte contre la corruption et de recouvrement des biens et des fonds publics.

“Il n’existe pas de volonté sérieuse du pouvoir exécutif d’activer la loi sur la protection des lanceurs d’alerte”, a-t-il dit, faisant état de l’absence d’émission d’ordonnances pour activer cette loi alors que la Commission avait déployé des efforts pour l’activer.

Ayadi estime que le pouvoir judiciaire “fait obstruction” aux demandes de l’Instance de protection des dénonciateurs, soulignant que nombre de juges n’avaient toujours pas manifesté l’importance du principe de la protection des lanceurs d’alerte contre la corruption et privilégiaient les lois régissant le travail aux dépens de la loi de protection des lanceurs d’alerte.

“L’instance nationale anticorruption, à l’instar des rapports de 2016 et 2017, émet des recommandations réitérées à chaque fois”, a-t-il ajouté, indiquant que “l’absence de réaction de l’administration exécutive de ces recommandations se répète dans chaque rapport sur la corruption”.

Pour sa part, le président de l’Instance, Chawki Tabib, a présenté un exposé sur les points les plus importants publiés dans le rapport de la Commission pour 2017.

Lors des débats, Monia Ibrahim (Ennahdha), présidente de la Commission de la réforme administrative, la bonne gouvernance, la lutte contre la corruption et le contrôle des deniers publics, a déclaré que la Commission avait demandé aux chefs de blocs parlementaires ces dernières semaines de choisir leur représentant au Conseil supérieur de lutte contre la corruption et au recouvrement des biens et des fonds publics. Mais la commission n’a pas reçu de réponse à ce jour.

Le député Hedi Sola (Ennahdha) a suggéré à l’instance anticorruption d’accorder plus d’attention aux régions de l’intérieur et d’appuyer l’effort central de partenariat et de développer le travail avec les gouvernorats, ce qui stimulera et sensibilisera sur les questions de la lutte contre la corruption dans diverses régions du pays et de ses administrations régionales et locales.

Le député Hédi Abraham (Ennahdha) s’est interrogé sur le sort de plus de 9.000 dossiers reçus par la Commission et a demandé s’ils étaient renvoyés devant le pouvoir judiciaire. Il a souligné la nécessité de soutenir les efforts visant à lutter contre le phénomène de la corruption, soulignant que “la démocratie n’a pas de sens devant l’ampleur pris corruption”.

Pour sa part, Lilia Younes Kssibi (Bloc de la Coalition nationale) a mis en doute l’utilité et l’efficacité de l’arsenal juridique existant en matière de lutte contre la corruption et les vides juridiques résultant de la corruption, recommandant de créer des clubs de jeunes pour les éduquer sur les idéaux de lutte contre la corruption.

A rappeler que le rapport de l’Instance pour 2017, soumis aux trois présidences, mentionne la réception de 9.189 pétitions, dont 245 ont été transmises au pouvoir judiciaire.

D’autre part, l’INLUCC a reçu 229 demandes de protection pour deux informateurs et a transféré cinq dossiers relatifs à des cas d’abus contre eux.

Plus de 25% des dossiers sont en rapport avec des ministères, dont 5,77% sont liés au ministère de l’Intérieur, 4,91% au ministère de l’Agriculture et 4,68% au ministère des Finances.