Une étude intitulée “Pour un pôle bancaire public régénéré et redimensionné”, a été élaborée par le président directeur général de la CAP BANK, Habib Karaouli, dans laquelle il a inscrit les pistes possibles pour une reconfiguration du paysage bancaire public tunisien.

Selon le diagnostic de Karaouli, “le secteur bancaire est asymétrique. D’une part, les banques privées qui arrivent à équilibrer leurs comptes, même si elles ont des difficultés de croissance qu’elles peuvent surmonter en développant des synergies et en favorisant le rapprochement entre elles. D’autre part, les banques publiques où la crise est plus visible. Ces banques, déjà fragilisées, ont été pénalisées par l’audit engagé qui était techniquement infondé et politiquement inopportun.

Karaouli considère cependant que “ce contexte peut offrir une opportunité pour les banques de se positionner durablement et de redéfinir leurs offres. Le développement de ce positionnement doit s’inscrire dans le cadre d’une vision stratégique sur la longue période”.

Les axes d’une réforme en profondeur du secteur bancaire

Karaouli estime que “l’instauration d’une réforme en profondeur passe par la mise à plat des données du problème. L’Etat doit être le seul maître à bord dans les banques qu’il choisira de maintenir dans son périmètre”.

Ensuite, il estime que “l’un des enjeux, pour préserver le secteur, protéger le contribuable contre tout risque excessif de prise en charge du coût de la restructuration et préserver les emplois, est de trouver des sources de financement qui puissent alléger l’intervention publique et notamment budgétaire pour restructurer et reconsolider les fondamentaux des banques publiques”. Pour ce faire, “l’Etat sera amené à céder les participations non stratégiques, notamment les participations minoritaires et les participations dans les banques mixtes qui, à partir du moment où elles sont devenues des banques universelles, sont entrain, d’une manière ou d’une autre, de concurrencer les autres participations de l’Etat dans des banques où l’Etat est plus présent”.

Les ressources dégagées peuvent, selon lui, “être utilisées pour consolider les fonds propres des banques qui seront gardées et pour permettre à l’Etat de lancer une OPA (offre publique d’achat) dans la banque principale (STB) pour acheter les participations minoritaires et celles des petits porteurs pour que l’Etat puisse être le seul maître à bord et faire les restructurations qu’il faut sans porter d’éventuels préjudices ou être bloquées par les actionnaires minoritaires ou de class actions”.

Karaouli pense aussi qu’afin de désengager les petits porteurs et dans l’objectif de ne pas leur faire subir les pressions et les coûts de la gestion publique, l’Etat peut aller jusqu’à retirer cette banque publique de la cote de la Bourse de Tunis (BVMT) par le biais d’une offre publique de retrait “OPR”.

Ainsi, considère-t-il, la solution la plus adéquate est la “nationalisation d’une banque publique” avec une gouvernance indépendante, renouvelée et en conformité avec les exigences de la concurrence et des standards internationaux. C’est une condition sine qua non à la réussite de la réforme.

“L’objectif à terme est d’avoir un effet de taille important et développer des champions nationaux publics capables de jouer pleinement leur rôle dans le financement de l’économie et des entreprises et d’être en mesure d’accompagner les entreprises tunisiennes sur les marchés à l’international, notamment en Afrique Subsaharienne qui offre aujourd’hui un potentiel de croissance important. Pour cela, il faut une vision, une stratégie et un plan d’actions décennal, pour mettre à niveau la contribution de l’Etat au financement de l’économie, tout à fait indispensable, dans le contexte que vit la Tunisie et dans le contexte probable des prochaines années ” , précise-t-il encore.

Dans cette étude, Karaouli a également proposé les options envisageables et les scénarios de concentration possibles devant permettre d’instaurer un pôle bancaire intégré (STB+BH+BNA versus STB+BFPME+BTS+TF Bank), expliquant les tenants et les aboutissants de chaque scénario.

Il a par ailleurs soulevé l’impératif, pour le secteur bancaire tunisien de “réussir la transition numérique et d’adapter la structure de financement à l’économie numérique et au financement de l’innovation”.