Albadil Attounssi (L’Alternative tunisienne) a été un think tank baptisé «Al Bada3il» avant de devenir «Al Badil». Nombreux et nombreuses y ont cru. Pour eux, pour elles, il pouvait offrir une bouée de sauvetage à une Tunisie dévastée par des crises qui n’en finissent pas. Héritage de 6 gouvernements dont celui de la Troïka qui a démantelé l’Etat et a produit par le biais d’une Constituante formée en grande partie par des islamistes, un système politique bâtard où tout le monde gouverne et personne ne gouverne.

Al Badil, un parti qui se dit sélectif formé de compétences triées sur le volet, ne répondrait plus à ce qu’il paraît aux attentes de ceux et celles qui le voyaient comme un Messie.

Lotfi Saibi, membre fondateur et démissionnaire du bureau politique d’Al Badil, avait déclaré en 2013 qu’il était rentré des USA en Tunisie pour aider à sa reconstruction:

«Je me suis impliqué dans la vie politique partisane bien avant les élections d’octobre 2011, et j’ai poursuivi mon engagement en pensant aider au rassemblement des forces démocratiques lors de la création du Joumhouri.

Un an plus tard, je me rends compte que j’étais en quelque sorte très naïf en dépit de mes années d’études de leadership et de travail avec différents dirigeants politiques.

Dix-huit mois se sont écoulés depuis les élections, et la Tunisie continue de tourner en rond. Les partis politiques sont plus préoccupés par leur positionnement individuel et leurs petits calculs que par ce qu’ils étaient censés représenter. J’ai vécu cela aux premières loges du Joumhouri en tant que membre de son comité central.

Et après des mois de travail pour colmater les brèches qui ont fissuré le parti dès sa naissance, après des mois de tentatives pour faire comprendre à ces dirigeants que le monde qu’ils connaissaient sous Ben Ali n’est plus celui de cette jeunesse vive et marginalisée et que l’implication de tous et l’élaboration d’une vision commune n’est plus un luxe mais une nécessité vitale, je me suis résolu au fait que mes efforts seraient plus fructueux ailleurs.

Il est clair que la politique ambiguë du parti depuis quelques mois, ses changements de position imprévisibles et incohérents n’ont pas arrangé la situation».

Lotfi Saibi avait ensuite rejoint le parti Afek Tounes avant d’adhérer à «Al Badil» qu’il vient de quitter. Apparemment, le descriptif qu’il avait donné d’Al Joumhouri de 2013 correspond à tous les partis agissant aujourd’hui en Tunisie ou pire ceux qui comptent reprendre le flambeau.

Pareil pour Sana Ghnima, qui avait été une militante active au sein du parti Nidaa Tounes pour ensuite le quitter parce que les promesses faites pendant «l’ère électorale» pour une plus grande présence des femmes aux postes de décisions n’ont pas été honorées et parce que les deux lignes que l’on croyait parallèles et qui ne pouvaient se joindre se sont finalement trouvées entrelacées.

L’un des démissionnaires a été aussi Souhail Ennabli apparu dans le paysage politique tunisien après le 14 janvier et auquel on ne connaissait pas d’affinités politiques auparavant.

Ainsi, les trois acteurs politiques cités plus haut viennent de publier le communiqué suivant :

«Nous signataires de ce communiqué tenons à informer tous ceux que ceci intéresserait sur notre départ définitif du parti AL BADIL ATTOUNISSI en tant que membres fondateurs et membres du bureau politique. Notre ambition étant d’ancrer un changement profond pour une Tunisie qui saigne, d’instaurer le projet transformateur dont rêvent les Tunisiens et de faire la politique autrement pour un avenir radieux, nous continuerons à porter ce rêve et cette ambition pour notre patrie.

Nous œuvrerons pour ce changement et pour la construction d’une Tunisie meilleure et prospère et ce dans un projet qui non seulement porte le rêve mais qui le concrétisera au quotidien».

Que c’est triste que 7 ans après une prétendue révolution, aucun parti n’ait la capacité de retenir ses militants et encore moins de les convaincre de sa vision ou de ses projets de réédification de notre pays. C’est à croire que les partis politiques s’apprêtent plus à des SA qu’à des structures politiques solides qui réellement peuvent offrir le change à un pays en souffrance.

WMC