tunisie-gov-essid-2Jadis, avant le 14 janvier 2011, un ministre, un secrétaire d’Etat ou tout autre responsable politique n’avait pas, souvent, à se soucier de son avenir une fois qu’il a quitté le poste qu’il occupe. Sous Ben Ali, il devait s’inquiéter surtout de sa cote auprès de la Présidence. S’il a l’heure de jouir de sa confiance, il peut être quasiment sûr de ne pas être «éjecté» du système et d’être tôt ou tard «recyclé».

S’il s’agit d’un ministre, il peut être casé comme conseiller auprès du président de la République. Ex-conseiller au Palais de Carthage, il peut faire le chemin inverse et atterrir à La Kasbah, comme ministre ou conseiller. L’un et l’autre peuvent également être nommés à la tête ou sein d’une grande institution politique (la Chambre des députés ou la Chambre des conseillers), ou d’une entreprise publique, ou «injectés» dans l’appareil diplomatique comme ambassadeur, dont la localisation, donc l’importance, dépend de l’étroitesse de ses rapports avec le «Sommet».

Aujourd’hui, le recyclage des anciens responsables dans les différentes structures relevant de l’Etat et du secteur public devient plus compliqué. Pour deux raisons au moins. D’abord, les chefs de l’Etat de l’après-14 janvier 2011 –Moncef Marzouki, hier, et même Béji Caïd Essebsi aujourd’hui- n’ont plus le pouvoir que détenait Ben Ali. Ensuite, certaines structures ne se laissent plus faire comme par le passé par le président de la République ou le chef du gouvernement. C’est notamment le cas du ministère des Affaires étrangères dont les fonctionnaires, syndiqués après le 14 janvier 2014, ont imposé des limites à l’exécutif en matière de nominations de personnalités politiques à la tête d’ambassades.

Certes, une nouvelle filière pour le recyclage des ministres et secrétaires d’Etat semble se dessiner aujourd’hui. C’est celle des partis politiques eux-mêmes qui réintègrent leurs cadres après la fin de leur expérience gouvernementale. Mais ce ne sont pas tous les partis qui peuvent se le permettre, car il faut pour cela des formations ayant des moyens financiers conséquents. Comme c’est le cas du mouvement Ennahdha qui, ce n’est pas un hasard, est le parti politique qui a le plus «absorbé» responsables gouvernementaux pour leur confier des tâches au sein de ses différentes structures (Ali Laarayedh, Rafik Abdessalem, Abdelkarim Harouni, Ryadh Bettaieb, Ridha Saïdi, etc.).

En dehors de cela, le secteur privé tend à devenir la principale «voie de garage» pour les ministres et les secrétaires d’Etat après la fin de leur parcours gouvernemental. C’est ce que démontre le parcours que se sont tracés d’anciens membres du gouvernement dirigé par Habib Essid. Ainsi, son porte-parole chargé des Relations avec le Parlement, Khaled Chouket, a décidé d’endosser l’habit de consultant en créant la Société Teeba International Consulting & Investment Sarl.

D’autres membres du gouvernement sortant ont fait le même choix avant. C’est le cas par exemple de Noomane Fehri, qui a lancé “21 Century Consulting“, cabinet d’audit et d’expertise en technologie.

Ministre-conseiller auprès de l’ancien président de la République, Moncef Marzouki, Aziz Krichen a fait le même choix (Société d’Etudes et de Conseil, conseil et prestations en rapport avec les questions économiques et la réforme des institutions), après avoir fait brièvement partie du groupe One Tech, en tant que conseiller de son président, Moncef Sellami.

L’ancien ministre de l’Energie et des Mines, Mongi Marzoug, et l’ex-secrétaire d’Etat auprès du ministre des Affaires étrangères chargé des Affaires africaines et arabes, Touhami Abdoulli, ont quant à eux fait le choix de s’expatrier. Le premier rentre tout simplement au bercail en l’occurrence en France où il vit depuis très longtemps et réintègre le groupe Orange pour la deuxième fois –la première ce fut après avoir fait partie du gouvernement Jomaa en tant que ministre des Technologies de la communication. Le second s’exporte au Koweït où il a été recruté comme directeur exécutif d’Al Babtain Foundation.

MM