Banque européenne d’investissement (BEI) : 500 millions d’euros par an à la Tunisie, si…

Par : Tallel

 

En marge de la signature de l’accord-cadre tripartite de partenariat et de financement entre la Banque tuniso-koweïtienne (BTK), la Banque européenne d’investissement (BEI) et le Réseau Entreprendre Tunis, en faveur des PME et TPE tunisiennes (lire notre article) Philippe de Fontaine Vive, vice-président de la BEI nous a accordé une interview express ci-dessous) à Webmanagercenter.com.

fontaine-bei-btk-01.jpgWMC : Comment voyez-vous l’avenir de la Tunisie en termes d’investissement, de création d’emploi, et donc de croissance?

Philippe de Fontaine Vive : La Tunisie est une nation avec une démographie très dynamique, avec un retard de pouvoir d’achat par rapport au voisin européen, mais avec un rôle régional au Maghreb et vis-à-vis de l’Afrique subsaharienne qui peut être développé.

Ces 3 raisons là (la démographie, le marché et l’ouverture à l’international) font qu’il est urgent de relancer l’investissement en Tunisie. D’où l’opportunité de cette conférence internationale sur l’investissement (NDLR: “Investir en Tunisie, Start-up democracy“)… et l’investissement, j’allais dire, tous azimuts.

C’est-à-dire que l’investissement public, avec la révolution, a reculé, parce que, pour des questions sociales et politiques, on a préféré recruter et réduire les investissements publics; l’investissement privé a lui-même souffert de la crise économique et de l’instabilité politique. Aujourd’hui, l’instabilité politique disparaît grâce à la Constitution et aux élections qui vont avoir lieu. C’est maintenant que les chefs d’entreprise privés doivent se relancer, surtout les grandes entreprises.

Quant à la 3ème composante, elle a trait à tout ce qui concerne les PPP, qui sont évoqués mais qui n’ont pas été concrétisés, pour mieux équiper la Tunisie en transport, en énergie, en énergies renouvelables, en eau de meilleure qualité plus facilement disponible, en traitement des déchets… Tout ça c’est autant d’occasions d’investissement en Tunisie. Donc, on voudrait aider à ce que ces différents chantiers se mettent en branle.

Justement, cette conférence, est-ce que ce gouvernement, qui n’est transitoire devrait l’organiser étant donné qu’elle engage l’avenir de tout un pays?

Vous avez pointé du doigt le grand succès du gouvernement Mehdi jomaa qui est d’avoir réussi un dialogue national pendant lequel il (le gouvernement) ne s’est pas contenté de prendre des mesures transitoires. Au contraire, il s’est attaqué à des réformes structurelles difficiles, tels que la fraude fiscale, le secret bancaire, la lutte contre les infractions douanières, etc. Des choses très lourdes et très courageuses, mais même s’il n’a pas été élu, il a tout de même osé dire publiquement et traiter clairement les problèmes structurels dont a hérité la Tunisie après la révolution.

Cela veut dire que, comme ce dialogue national a abouti à une feuille de route qui est présentée à la conférence, les gouvernements qui seront souverainement élus par les Tunisies d’ici la fin de l’année ont une feuille de route évidente: continuer, mettre en œuvre, être de plus en plus efficace sur tous ces sujets qui ont freiné la croissance tunisienne. A noter que la croissance est tombée à seulement 2% l’année dernière alors que, du point de vue de la démographie tunisienne, il est important de passer au-dessus de 4-5%.

Il y a les moyens. Et ce gouvernement n’a rien de transitoire en fait, il aura vraiment créé les bases, et j’espère que cette conférence nous donnera tous rendez-vous en 2015 avec des autorités élues pour réussir cette feuille de route. Mais c’est aux Tunisiens d’en décider.

La BEI va-t-elle augmenter ses investissements en Tunisie?

Vous savez, il faut voir les choses très concrètement: depuis janvier 2011, avec les signatures que je vais signer dimanche et lundi (7 et 8 septembre), nous avons apporté plus d’1 milliard d’euros de financement à la Tunisie sur les années 2011, 2012, 2013 et 2014. Dès lors que les autorités tunisiennes mettent en œuvre la feuille de route du gouvernement Jomaa, je pense que nous pouvons passer à un niveau de soutien de 500 millions d’euros par an. C’est grâce aux moyens que nous a donnés la nouvelle Commission européenne que nous allons pouvoir accroître notre soutien, pour autant que les réformes se poursuivent en Tunisie.