En France, une cigarette sur cinq achetée hors des bureaux de tabac

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Des cigarettes dans un cendrier (Photo : Andrej Isakovic)

[10/07/2012 16:53:33] PARIS (AFP) Une cigarette sur cinq fumée en France est achetée hors du réseau des buralistes, échappant à toutes taxes, selon plusieurs études. Et à en croire les fabricants cette concurrence, souvent illégale, profite surtout au crime organisé.

Une étude du cabinet KPMG, commandée par le fabricant Philip Morris, et publiée mardi, évalue précisément à 21,1% la proportion de cigarettes achetées à l’étranger ou de manière illégale en France.

Ces chiffres confirment de précédentes études réalisées par d’autres cigarettiers et même par les Douanes françaises.

En septembre, l’administration avait publié une étude confirmant qu’environ 20% des cigarettes ne sont pas achetées dans les bureaux de tabac de l’Hexagone et échappent donc à toutes taxes (82% du prix du paquet). Soit un manque à gagner évalué à plus de 2,5 milliards d’euros par an pour les caisses de l’Etat.

Tout ce tabac venu d’ailleurs n’est pas pour autant illégal.

Sont légales, les cigarettes achetées à l’étranger ou dans le duty-free d’un aéroport par un fumeur pour sa consommation personnelle et en quantité définie (5 cartouches maximum).

Sont illégales, celles achetées sous le manteau, dans la rue, sur internet, dans certains petits commerces généralement ouverts tard le soir. Selon KPMG, elles représentent les trois quarts des cigarettes n’étant pas achetées dans un bureau de tabac: 15,8 des 21,1%.

KPMG se base sur des chiffres officiels de vente, des entretiens avec des consommateurs, mais aussi sur une étude dite “paquets vides” qui consiste, deux fois par an, à ramasser dans certaines rues (représentatives) de 52 villes, 10.000 paquets de cigarettes vides pour examiner leur provenance.

De leur côté, les Douanes estiment que seulement 5 de ces 20% sont issues de la contrebande et de la contrefaçon.

Interrogé, Klaus Berg, responsable de la lutte anti-contrefaçon pour l’Europe du Nord chez Philip Morris, n’a pas d’explication pour justifier cette différence. Il met en avant la récurrence de cette étude réalisée chaque année depuis 2006 et dont la méthode est validée par l’Olaf (l’office européen de lutte antifraude).

Egalement sollicitées par l’AFP, les Douanes n’ont pas donné suite.

Crime organisé

La contrebande et la contrefaçon sont des “phénomènes d’envergure mondiale”, qui ont des conséquences “économiques et sanitaires”, a expliqué Renaud Gaillard, directeur des affaires publiques de la filiale française de Philip Morris International.

Il a souligné la nécessité “d’avoir une approche globale”, d’évaluer “les conséquences en matière de développement du commerce illicite de produits du tabac”. M. Gaillard a notamment visé “les projets européens de paquets génériques” (des paquets uniformes sans logo, ni couleur) et la suppression des rayons chez les buralistes, qualifiant ces “mesures réglementaires” d'”excessives”.

Ce commerce illicite, rappelle Klaus Berg, est le fait du “crime organisé” car il est très lucratif. Selon Philip Morris, un paquet fabriqué en Chine pour 20 centimes d’euros est revendu illégalement en France pour 3 euros.

Le tabac provoque chaque année en France 73.000 décès.

Le gouvernement a annoncé une prochaine hausse de 6% du prix du tabac à l’automne, faisant passer tous les paquets vendus en France à 6 euros au moins.

L’augmentation est jugée insuffisante par les associations anti-tabac, qui réclament au moins 10% pour être efficaces.

Quant aux industriels et aux buralistes, ils craignent une nouvelle baisse des ventes, alors que le marché est déjà en baisse de 4,7% depuis le début de l’année. D’autant que ce recul des ventes ne refléterait pas nécessairement une baisse de la consommation, mais plutôt une hausse du commerce illicite.