é internet à Pékin, le 12 mai 2011 (Photo : Liu Jin) |
[22/03/2012 16:16:24] PEKIN (AFP) Des rumeurs de coup d’Etat se sont propagées ces derniers jours à Pékin, illustrant selon des experts la nervosité de l’opinion publique après le limogeage du leader controversé Bo Xilai, qui a mis au jour les luttes de succession au sommet du Parti communiste.
L’internet, espace de liberté en Chine sérieusement encadré par la censure, s’est emballé cette semaine autour de folles informations diverses, comme l’accident d’une Ferrari qui aurait coûté la vie au fils d’un dirigeant, des coups de feu qui auraient retenti au coeur de Pékin ou encore d’hypothétiques mouvements de blindés dans la capitale.
“Les gens sont nerveux (car) il n’y a pas beaucoup d’informations disponibles”, a expliqué jeudi à l’AFP Bo Zhiyue, un expert de la politique chinoise de l’Université nationale de Singapour.
“Ils sont avides d’informations nouvelles, et s’il n’y a rien de nouveau, alors ils inventent des informations”, a-t-il ajouté.
Bo Xilai, le chef charismatique du Parti communiste chinois (PCC) de la mégapole de Chongqing (centre ouest), a été limogé jeudi alors qu’il aspirait à devenir cet automne l’un des membres du comité permanent du Bureau politique du Parti, le coeur du pouvoir.
M. Bo a rejoint dans sa chute son ancien bras droit, Wang Lijun, un chef policier aux méthodes radicales sanctionné après une rocambolesque visite dans un consulat américain où il aurait tenté d’obtenir l’asile politique.
Ces péripéties — très rares dans la vie politique chinoise centrée sur un parti unique très opaque — ont brisé l’image d’unité que souhaite donner le PCC et alimenté toutes les spéculations.
L’agence officielle Chine nouvelle n’a en effet donné aucune raison pour l’éviction de Bo, un thème très sensible bien entendu interdit d’enquête pour les autres médias.
Résultat, les rumeurs courent. Dont celle d’une tentative de coup d’Etat fomentée par le très puissant Zhou Yongkang, responsable de la police au sein de la direction du Parti.
Plus tôt cette semaine, des internautes ont commencé à propager sur les microblogs des informations et des photos montrant la présence de chars sur une des artères principales de Pékin, où auraient été entendus des coups de feu. Mais le niveau de sécurité dans la capitale semblait inchangé jeudi, rendant improbable cette thèse.
Un document officiel prétendument divulgué sur le web par des membres de haut rang du Parti, apparaît lui davantage crédible. Il montre que l’un des membres de la famille de Bo Xilai aurait fait l’objet d’une enquête pour corruption.
Selon ce document, M. Bo s’en serait pris à Wang Lijun juste après que celui-ci lui aurait annoncé ces soupçons pour corruption visant l’un de ses proches. Face au courroux de son supérieur, M. Wang aurait alors tenté de demander l’asile au consulat des États-Unis.
Quant à la Ferrari, l’accident mortel semble bien s’être produit à Pékin, sans que l’on ait une confirmation sûre de l’identité du conducteur. Les spéculations ont enflé car ce fait divers a fait l’objet d’une vaste censure automatique sur la Toile.
Celle-ci se poursuivait jeudi: sur Sina Weibo, le Twitter chinois, étaient censurés les mots “coups de feu”, “Bo Xilai”, “Wang Lijun” ou encore “Bo Guagua” (le fils de M. Bo).
“Tout cela signifie que les luttes de faction (au sein du Parti) ont éclaté en plein jour”, a commenté Willy Lam, de la Chinese University de Hong Kong.