Tunisie-Libye : Les Tunisiens se bercent-ils d’illusions?


tunisie_libye-06022012-art.jpgAvant même que la chute du régime mis en place par Mouammar Kadhafi, le 1er
septembre 1969, soit consommée, le gouvernement de transition tunisien dirigé
par Béji Caïd Essebsi a mis sur pied une Task Force, coordonnée par Saïd El Aydi,
alors ministre de la Formation professionnelle et de l’Emploi, chargée à la fois
de gérer les problèmes –sécuritaires, politiques, économiques, sociaux, etc.-
que posait la phase transitoire et de préparer l’avenir des relations
tuniso-libyennes.

Et si d’autres organisations –comme l’Alliance nationale pour la paix et la
prospérité (ANPP), côté société civile, l’Union tunisienne de l’industrie, du
commerce et de l’artisanat (UTICA) et la Confédération des entreprises
citoyennes de Tunisie (CONECT), pour le patronat, etc.- se sont également
engagées depuis sur ce terrain, aucune n’a pris la peine d’engager une réflexion
de fond sur le devenir et l’avenir des relations tuniso-libyennes.

Il aura fallu attendre que l’association Forum pour une Nouvelle République (Nou-R)
prenne l’initiative de lancer le débat sur cette question –lors du séminaire
organisé samedi 28 janvier pour répondre à la question «quel nouveau modèle pour
le partenariat?»- et de bien le cadrer.

Ainsi, alors que beaucoup, en Tunisie surtout, se sont fondés sur le soutien
apporté par différentes composantes de la société tunisienne à nos frères
libyens au plus fort de leur soulèvement contre le régime dictatorial de Kadhafi
et sur l’écho que cela a eu en Libye, tant au niveau populaire qu’officiel, pour
clamer voire réclamer un traitement de faveur des Tunisiens –travailleurs et
entreprises- sur le plan économique, la manifestation organisée par le Forum
pour une Nouvelle République aura eu le grand mérite d’appeler nos concitoyens à
faire preuve de réalisme dans leur manière d’appréhender les relations
tuniso-libyennes.

Les organisateurs de la rencontre y ont du reste préparé le terrain en rappelant
que «les problèmes économiques, sociaux, et politiques que la Libye et la
Tunisie devront résoudre dans le sillage de leurs révolutions sont énormes» et
qu’ils devront –en priorité, pourrait-on ajouter- «trouver des formules
politiques qui soient acceptables aux différentes composantes de leur
population».

D’ailleurs, les responsables politiques libyens présents à cette rencontre
(Ahmed Jehani, conseiller auprès de Mustapha Abdeljelil, président du Conseil
National de Transition et ex-négociateur à la Banque mondiale pour la Libye;
Wahib Borchane, conseiller auprès du
CNT, chargé du secteur privé, et Abdallah Chamia, chargé de l’Economie au de l’exécutif transitoire libyen) ont été on ne
peut plus clairs au sujet des attentes exprimées par les Tunisiens concernant
les relations économiques et commerciales tuniso-libyennes. «On ne peut
transposer les sentiments partagés par les peuples tunisien et libyen dans des
décisions stratégiques. Toutefois, les futures institutions élues traduiront
certainement cela dans des décisions», observe Wahib Borchane.

Un son de cloche auquel répond en écho Mohamed Ali Ben Jemia. Pour ce directeur
exécutif de la filiale libyenne de STUDI International, «contrairement aux
Tunisiens, les Libyens sont réalistes. Pourquoi les Tunisiens demandent-ils un
traitement spécial? Les Libyens ont raison de dire: Libya first (la Libye
d’abord)».