L’urgence de corriger les pratiques de gouvernance des entreprises publiques tunisiennes

tunisie-debout-1.jpgLe thème de la bonne gouvernance des entreprises, notamment publiques, doit mobiliser aujourd’hui en Tunisie et à la lumière des événements actuels et des profonds changements,   l’ensemble des forces vives du pays qui doivent ériger, en ce moment même, la justice, l’éthique et la performance comme étant des objectifs d’intérêt suprême. La gouvernance des entreprises publiques porte sur des enjeux énormes et aucun système économique ne peut occulter les recommandations et les guides de bonnes pratiques, qui fleurissent aussi bien dans les pays développés que ceux en développement. Ces «bonnes pratiques» nécessitant plus de perfection afin de réussir à endiguer tout risque de malversation, de destruction de valeur et de mauvaise gouvernance de nos firmes nationales.  

La gouvernance des entreprises publiques en Tunisie était défaillante jusqu’à une date récente et le fonctionnement interne de ces entreprises était miné par une absence d’organes de contrôle et de surveillance indépendants. Les pouvoirs étaient trop concentrés aux mains des PDG qui dirigeaient les entreprises de l’Etat selon des intérêts plus au moins personnels ou claniques. Aucun partage de pouvoir, aucun contre-pouvoir, aucune représentation d’aucune autre partie prenante dans des instances supposées de contrôle, comme le Conseil d’administration!

Des fleurons de l’économie tunisienne, comme Tunisair, SNDP, STAR… étaient exclusivement aux mains de PDG véreux et peu scrupuleux! Les salariés ne pouvaient pas s’exprimer et les cadres n’étaient pas valorisés dans les processus de prise de décision.

En outre, la création de valeur n’était pas optimisée et la répartition de cette même valeur n’était pas assurée d’une manière équitable! Une «clique» de personnes en profitait au détriment de l’intérêt général!  

Aujourd’hui, des mesures doivent être prises urgemment et des solutions proposées pour introduire plus d’indépendance et plus de diligence dans le fonctionnement des différents organes de gouvernance de nos entreprises publiques. Ces mesures doivent être sans cesse accompagnées par une prise de conscience et une sensibilisation des acteurs sur le terrain, mais aussi et surtout une responsabilisation de ces acteurs pour les amener à plus de probité et à plus de maturité au niveau des prises de décision, du contrôle des prises de décision et de la communication qui suit les prises de décision.  

Le premier principe qui sous-tend la gouvernance d’entreprise publique est la responsabilité et l’intégrité des dirigeants et des administrateurs. Ces deux mandataires sociaux, au cœur du système de gouvernance de l’entreprise, jouent un rôle prépondérant dans la conduite des affaires, le contrôle de la performance et de la bonne marche de l’entreprise. Ils interagissent au sein du Conseil d’administration, croisent leurs compétences et conjuguent leurs efforts pour le seul intérêt social et national de la firme publique. 

Malheureusement, la réalité est différente et les choses ne se sont pas déroulées de cette manière ces dernières années en Tunisie, du moins dans un certain nombre de cas où l’opportunisme des dirigeants combiné à la passivité des administrateurs et aux dysfonctionnements des mécanismes de contrôle ont entraîné la déconfiture et la faillite de quelques fleurons de l’économie nationale.

Dirigeants et administrateurs doivent être mis sur la sellette et leur responsabilité dans les scandales financiers et les malversations qui peuvent ébranler notre système économique et porter un coup de plus à notre compétitivité.  

Plus concrètement,  des mesures urgentes doivent être mises en œuvre:

– séparation des pouvoirs de contrôle et des pouvoirs de décision;

– renforcement du contrôle en mettant en place des Conseils d’administration composés en grande partie d’administrateurs indépendants et compétents;

– instauration des Comités spécialisés : Comité d’audit, Comité des nominations, Comités des rémunérations.

– renforcer l’indépendance et l’intégrité des Commissaires aux comptes et des auditeurs externes, et garantir la transparence de leurs rapports annuels;

– s’assurer de la fiabilité de l’information financière et comptable communiquée aux tiers.

– assurer une bonne représentation des salariés et des parties prenantes dans les organes de gouvernance de l’entreprise.

Une entreprise publique est propriété de l’Etat, on doit absolument s’assurer de son bon fonctionnement et de sa contribution dans le développement économique et social du pays, en lui garantissant surtout une bonne gouvernance selon les principes précités.