Tunisie : 12ème Plan, des objectifs ambitieux, mais il faut que le terrain suive

Pour le prochain quinquennat, les objectifs du gouvernement sont ambitieux. Le
12ème Plan de développement prévoit une croissance annuelle du PIB de 5,5 %, le
renforcement de l’investissement global de 2% par an, le développement des
exportations de plus de 40%, l’augmentation de la part des activités à fort
contenu de savoir de 30% en 2014 et un revenu moyen par tête d’habitant de 8.300
dinars. Ces grandes lignes du 12ème Plan ont été présentées au Parlement, le 6
juillet 2010.

Mohamed Ghannouchi, Premier ministre, a précisé que les efforts cibleront la
réduction de la dette extérieure à moins de 30% du
PIB en 2014, l’abaissement du
taux de la dette publique à 40,4% du PIB et la maîtrise de la couverture des
besoins de financement de l’économie nationale. Il a également indiqué que les
indicateurs sociaux ont été améliorés à tous les niveaux. La Tunisie figurant
parmi les premiers pays dans le monde en la matière.

Les infrastructures de base auront la part du lion au niveau des dépenses
publiques, soit 26,5 milliards de dinars consacrés au développement de
l’infrastructure de base, des équipements collectifs et à l’encouragement de
l’initiative privée. Le développement des réseaux de routes classées, de réseaux
autoroutiers et de routes régionales ainsi que la consolidation des liaisons
entre les régions de l’intérieur. D’un autre côté, plus d’efforts seront fournis
pour attirer les entreprises mondiales opérant dans les activités technologiques
à haute valeur ajoutée, pour arriver à un volume d’investissement global de 17,2
milliards de dinars, soit environ 29% du total des investissements du secteur
privé.

Hédi Djilani, député et président du patronat, est intervenu lors de cette
journée de présentation du 12ème Plan au Parlement et a évoqué l’importance de
la transparence et de la bonne gouvernance. Il a insisté sur le rôle des
employés dans la bonne marche d’une entreprise. «Il ne faut pas que les
travailleurs faillissent à leur devoir d’être productifs et impliqués dans les
performances de l’entreprise à laquelle ils appartiennent. L’absentéisme affecte
la rentabilité et la compétitivité de l’entreprise par des temps où la
concurrence est de plus en plus rude», a-t-il souligné. Le président de l’UTICA
a appelé à revoir certaines dispositions du Code du travail, en particulier
celles qui concernent la prise en compte des heures de travail. M. Djilani a
également insisté sur l’importance de reconsidérer le Code des Investissements,
de le simplifier et de l’actualiser pour inciter les opérateurs privés à
s’internationaliser et investir plus dans leur économie, surtout dans les
projets à haute valeur ajoutée.

Bien entendu, le problème récurrent du commerce parallèle n’a pas échappé au
discours du président du patronat, vu ses conséquences négatives sur l’économie
nationale, et qui a fini par toucher tous les secteurs, et particulièrement les
piliers de notre économie, a-t-il indiqué, en ajoutant que les risques sont
grands sur les plans sécuritaire et sanitaire. Les ménagères consomment de plus
en plus des produits en provenance d’Asie, ce qui n’aiderait pas au
développement des produits locaux ou à celui des échanges commerciaux avec nos
partenaires classiques.

Objectifs louables mais…

Les objectifs fixés par le gouvernement sont louables et nous poussent à
l’optimisme, si ce n’est qu’un revenu de 8.300 DT par tête d’habitant ne
satisfait pas aux besoins d’une famille tunisienne. En 2010 déjà, au vu de la
cherté de la vie allant des matières de base jusqu’aux soins de santé et aux
commodités nécessaires comme l’électricité et l’eau courante. Un coût de la vie
élevé et des moyens réduits expliqueraient peut-être pourquoi nos ménagères se
réfugient dans la consommation de produits venus d’Asie au détriment de leur
propre santé et celle économique du pays. Sans parler des activités exercées par
des milliers de personnes dans l’économie informelle en toute illégalité.

D’autre part, c’est bien beau d’encourager les activités à haute valeur ajoutée
et à haute portée technologique et d’attirer les investisseurs internationaux
sur le site Tunisie pour y opérer, encore faut-il que toutes les infrastructures
répondent aux impératifs qu’imposeront ces activités quant à la rapidité et la
réactivité, notamment des réseaux télécoms. Il faut espérer que les pouvoirs
publics consentent plus d’efforts humains et financiers pour apporter les
améliorations nécessaires à la logistique de base s’agissant d’activités
avancées technologiquement, d’autant plus que nous voulons attirer un plus grand
nombre d’opérateurs dans les secteurs aéronautique et électronique, par exemple.

D’autre part, et concernant le taux de productivité des travailleurs tunisiens
et sans vouloir généraliser, il est quand même regrettable que dans certaines
usines et particulièrement celles du textile, les ouvrières continuent à
Travailler dans une chaleur torride sans climatisation ou ventilation
suffisante.

Il est normal d’exiger d’un travailleur qu’il s’implique dans son travail, qu’il
assure et qu’il soit productif, mais quoi de plus naturel au 21ème siècle dans
un pays que l’on veut soucieux des droits de l’homme que de respecter les
besoins élémentaires de l’employé et qui sont sensés lui procurer un minimum de
confort pour qu’il soit aussi productif.

Les inspections de travail, la médecine du travail ont un rôle important à jouer
pour que le travailleur tunisien garde sa dignité et que l’entreprise soit plus
performante parce qu’elle offre à ses employés un climat convenable et humain
dans lequel ils peuvent évoluer et être performants.