Grèce : le pléthorique secteur public au centre de la crise de la dette

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à Salonique, en Grèce, le 11 mars 2010 (Photo : Sakis Mitrolidis)

[21/03/2010 10:40:47] ATHENES (AFP) La crise financière qui secoue la Grèce a mis sur le devant de la scène le service public grec, malade d’une longue tradition de clientélisme politique qui a nourri le désastre de la dette publique, relèvent les commentateurs grecs.

Les gouvernements de tous bords y ont toujours placé leurs partisans, au point qu’aujourdhui le secteur public est si pléthorique que les responsables ne savent par où commencer pour le réduire.

“Personne, pas même le Premier ministre, ne peut dire avec certitude le nombre réel de fonctionnaires”, a récemment affirmé Constantinos Michalos, le président de la Chambre de commerce et d’industrie d’Athènes.

“Nous avons évalué le nombre de fonctionnaires à 1,2 million de personnes incluant les employés contractuels, la Fédération des fonctionnaires le porte à 700.000 et le ministère des Finances parle de 800.000 personnes”, a-t-il ajouté.

Le gouvernement socialiste de Georges Papandréou a annoncé des coupes de 12% des allocations et la suppression à 90% du 14ème mois de l’ensemble du personnel du secteur public, soulevant un tollé des fonctionnaires.

L’équipe au pouvoir essaie de résorber une dette de quelque 300 milliards d’euros alimentée par un déficit public qui a culminé à 12,7% du PIB en 2009, plus de quatre fois le seuil de 3% du Pacte de stabilité, fixé par l’Union européenne.

Selon le ministère de l’Intérieur, le nombre de fonctionnaires permanents a augmenté de plus de 28.000 personnes entre 2006 et 2008.

M. Michalos, ancien secrétaire général du ministère des Finances, ne tarit pas d’histoires sur les excès du secteur public.

“Des femmes de ménages et des attachés de presse au ministère des Finances reçoivent un salaire double par rapport à leurs collègues des autres ministères, …au parlement, les employés travaillent 12 mois mais reçoivent 16 mois de salaires, …les fonctionnaires obtiennent des primes pour bien se vêtir et se présenter à l’heure au travail”, assure-t-il.

“Cette monstruosité a été créée par les politiciens,” a affirmé le politologue Stefanos Kassimatis dans le quotidien libéral Kathimerini. “Ils se sont engagés sous la pression des syndicats et ont continué à attribuer des privilèges jusqu’à ce que la machine s’emballe et échappe à tout contrôle”.

La Fédération des fonctionnaires, Adedy, affirme que les primes sont essentielles pour soutenir les salaires de base de ses membres qui sont “les plus bas d’Europe”. Selon le syndicat, les fonctionnaires gagnent 1.350 euros en moyenne.

“Il existe des dysfonctionnements pour protéger des groupes divers ou courtiser des électeurs potentiels”, affirme de son côté Yannis Stournaras, directeur général de la Fondation pour la recherche économique et industrielle (IOVE).

M. Papandréou a promis d’utiliser la crise pour éradiquer des décennies de corruption et de mauvaise gestion dans la fonction publique.

Des études ont montré à plusieurs reprises que le secteur était un refuge de corruption, principalement dans les bureaux du fisc, les services urbains et les hôpitaux publics.

Selon la section grecque de l’ONG anticorruption Transparency international le problème a empiré en 2009, atteignant un montant de 790 millions d’euros de dessous de table, en hausse de 50 millions euros par rapport à 2008.

“La fonction publique grecque est le domaine où la crise est la plus évidente”, a déclaré à l’AFP, Théodore Pelagidis, professeur d’économie à l’Université du Pirée. Mais la cause du problème, selon lui, est “la manière dont l’économie est organisée et qui est déplorable: le pays a appris à vivre aux frais des fonds de l’Union européenne, des recettes de la marine marchande et du tourisme”.