Tunisie – Feux croisés : Un petit coup de main de Lobbying

Initiative
originale de
l’Atuge qui s’interroge, à l’occasion de son rendez-vous mensuel,
sur l’image de notre industrie à l’international. La démarche est rationnelle.
‘’Quel résultat a produit la politique de promotion de
l’investissement
industriel étranger
dans notre pays ?’’ est une question bien légitime. Elles
étaient 200 entreprises étrangères à avoir pris pied dans le pays dans les
années 80. Elles dépassent les 2000 aujourd’hui. C’est devenu une composante
réelle du paysage économique tunisien.

Cependant, les flux restent en deçà du potentiel du pays. Comment dès lors
booster la question ? Mongia Khemiri, DG de la FIPA, et Mohamed Ben Abdallah,
DGA de l’API, invités d’honneur de ce déjeuner débat, sans s’attarder sur les
bilans de ces deux agences dédiées, ont surtout levé le voile sur leurs actions
futures collectives. Nécessaire mais est-ce suffisant ?

Les avantages comparatifs : L’effet vitrine

L’offre à l’adresse des investisseurs étrangers a toujours été articulée autour
des «avantages comparatifs» du site national. Dans les années 70, les coûts des
facteurs, seuls, faisaient la différence. Un pays ne peut offrir que ce qu’il a.
En ces temps éloignés, le secteur manufacturier a pu induire une dynamique de
croissance mais pas une politique d’accumulation. Les industries exportatrices
étaient restées enclavées et n’ont pas diffusé, et n’ont pas , à proprement
parler, ce levier pour le «décollage» de l’industrie. Pourtant, les success
stories n’ont pas manqué.
Lee Cooper, à titre d’exemple, a fait de Ras El Jebel
la «Capitale mondiale du jean». En quinze ans d’activité, la société avait
distribué, sous forme de dividendes, dix fois le capital investi. Et l’usine
tunisienne générait 60% des bénéfices du groupe. Cela ne suffisait pas.

Un environnement d’affaires favorable

Pour doper l’afflux d’IDE, le pays a bien compris que c’est l’environnement des
affaires
dans sa globalité qui devait s’émanciper. Il s’est résolu à libérer, et
l’ouverture est actuellement une réalité tangible. Bien plus, on a touché aux
tabous. Le pays a reconfiguré le code du travail et reformaté la justice
prud’homale. La flexibilité est bien installée et bien réglementée. Tout
récemment, dans certains secteurs, l’annualisation des salaires a été introduite
et elle n’est presque plus contestée. Un pas supplémentaire a été franchi et le
pays a compris qu’il fallait, dans une logique de mondialisation bien comprise,
s’affranchir et aller prospecter «far away».

Là-dessus, on a multiplié les canaux et on a vu naître le Symposium de Carthage
pour l’investissement
. On a osé aller en dehors de nos périmètres traditionnels
et ce rendez-vous était destiné aux investisseurs asiatiques et nord-américains.
A sa onzième édition, en juin 2009, l’offre avait complètement changé d’allure
et le pays choisissait ses partenaires et avançait ses préférences, et c’était
le contenu de la perspective industrielle 2016. On ciblait les secteurs à haute
valeur ajoutée, les IT et les projets innovants. Le pays avait bien pris la
vague. Mais toujours pas assez.

Figurer sur la «Short list» mondiale

Sur sa trajectoire de promotion de son industrie, la Tunisie a compris que
l’étape suprême était de se faire lister parmi le peloton des méritants. Un
travail en profondeur a été réalisé et
Davos a validé. Premier de la classe au
niveau du continent africain, c’est une performance en soi. Mais plus on
progressait et plus on suscitait l’effet d’appel. Et le pays a bien convenu
qu’il fallait intégrer la «short list» des pays de l’OCDE. Et là-dessus le
travail de promotion avait pu s’enrichir et s’améliorer. Et si tout au début, la FIPA avait trouvé pour slogan «Tunisia, a country that works», et c’est toujours
valorisant d’être un pays en marche, peut-être faudra-t-il monter en gamme et
proposer «The country that moves and performs», ce qui serait plus proche de la
réalité.

Le triptyque productivité -compétitivité-attractivité

L’offre a été reprofilée et l’expérience nous a enseigné que l’apostrophe doit
comporter non pas une seule proposition d’avantages comparatifs mais un bouquet
de prestations. Et c’est le triptyque productivité–compétitivité-productivité
qui appelle l’intérêt des investisseurs. Toutefois, cette offre doit exister et
cartonner ! Eh oui, à présent les investisseurs mesurent le degré de performance
globale du site. A l’heure actuelle, la compétition d’un site est celle de sa «supply
chain
» et ça se mesure en temps de livraison et en coût bien entendu. Les
constructeurs auto mesurent ainsi l’efficacité d’un pays de délocalisation. Et
c’est en se basant sur cette considération que le pays a engagé les fameux plans
de développement des exportations (PDE 1 et 2).

Un petit coup de main de Lobbying

A présent, on sait comment s’adresser aux milieux d’affaires internationaux, le
pays a capitalisé sur l’expérience des délocalisations structurantes et des
émissions de souverain sur le marché de la dette internationale. Maintenant son
offre est mieux calibrée puisqu’on en est à proposer des pôles de compétitivité,
c’est-à-dire nos technopoles, et c’est un environnement d’investissement idoine.

Nos hommes d’affaires ont prouvé que CEPEX avec FIPA et API communiquent d’une
seule voix à l’avenir comme ils se proposent de le faire à l’occasion de leur
installation au Japon, c’est une excellente initiative. Qu’il faille parfois
s’en remettre à des professionnels de la com’ à l’international est aussi une
action d’appoint à ne pas négliger. Faire du
lobbying comme l’a recommandé le
forum Atuge de 2008 est aussi une idée de raison.

Les Atugéens avaient déploré que notre déficit de lobbying nous a gêné dans
notre travail de marketing pour garnir
la technopole d’Elghazala alors que «Casa Nearshore», du fait d’un marketing plus affûté, a été vendue sur plan. En
matière de réglementation et de procédure, il est aussi utile de secouer le
cocotier et d’alléger les délais et les temps de réponse. Le pays a besoin de
tout cela à la fois pour contrer l’handicap de la taille de son marché intérieur
qui a toujours fait douter les investisseurs. On sera toujours lesté par cette
donnée et la seule façon d’y répondre est d’enregistrer des avancées
significatives sur le triptyque productivité-compétitivité-attractivité et
également de bien mettre à profit nos accords régionaux qui nous donnent une
extension physique sur nos marchés de proximité, en parade à notre exiguïté.

Les accords d’Agadir ou de
l’UPM prennent tout leur relief dans cette
perspective en attendant que l’UMA prenne un jour forme.