France : vers un “grand emprunt” modéré sous la surveillance de Bruxelles

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ée nationale, le 29 janvier 2008 à Paris (Photo : Mehdi Fedouach)

[10/11/2009 18:07:53] PARIS (AFP) A quelques jours de la remise de son rapport à Nicolas Sarkozy, la commission Juppé-Rocard semble pencher, pour financer les investissements d’avenir de la France, pour un “grand emprunt” d’un montant modéré qui risque néanmoins de se heurter aux réticences de Bruxelles.

L’emprunt annoncé en juin par le chef de l’Etat sera “un accélérateur de compétitivité”, a déclaré mardi le ministre du Budget Eric Woerth. Il faut “faire en sorte que la France soit plus compétitive avec le grand emprunt qu’elle ne l’aurait été en continuant à investir comme elle le fait, c’est-à-dire relativement peu”.

Le débat s’est jusqu’ici focalisé sur le montant de cette opération prévue pour 2010.

Alors que le Trésor juge que la France, déjà lourdement endettée, a une capacité d’emprunt supplémentaire de 20 à 30 milliards d’euros, une partie de la majorité plaide pour un effort plus ambitieux de 50 à 100 milliards.

La commission sur l’emprunt pilotée par Alain Juppé et Michel Rocard, qui remettra son rapport au président d’ici le début de la semaine prochaine, doit tenir mercredi son ultime réunion.

Mais Alain Juppé a déjà évalué, devant des militants UMP, le montant du grand emprunt à 35 milliards d’euros, selon le quotidien Sud-Ouest. Soit au coeur de la fourchette retenue dernièrement par Nicolas Sarkozy dont l’arbitrage final ne se situera “pas en-dessous de 25 milliards et pas au-delà de 50 milliards d’euros”.

Au-delà, des experts redoutent une détérioration de la notation de la France et donc de ses conditions de financement sur les marchés, notamment par rapport à l’Allemagne.

Et la Commission européenne, qui doit rappeler à l’ordre la France mercredi pour qu’elle fasse refluer un déficit et une dette publics record (respectivement 8,5% et 84% du PIB attendus en 2010), a prévenu qu’elle évaluerait les finances françaises en tenant compte de l’emprunt.

Pour M. Woerth, l’emprunt doit donc être “compatible avec nos finances publiques” et son coût “minimisé”. Autant de conditions qui plaident pour un emprunt lancé sur les marchés et non auprès des particuliers.

Une partie devra en outre financer des dotations ou des avances remboursables, comme ce fut le cas pour les aides à l’automobile et aux banques pendant la crise, de manière à ne pas être comptabilisée dans le déficit public, explique-t-on à Bercy.

La ministre de l’Economie Christine Lagarde a aussi précisé que les 13 milliards qu’ont depuis remboursés les banques à l’Etat seraient “affectés” aux investissements d’avenir, ce qui réduira d’autant le montant de l’emprunt.

“Notre mission porte sur les investissements d’avenir, pas sur la façon ou les modalités de lever l’argent nécessaire pour investir”, souligne le rapporteur de la commission, Olivier Ferrand, président du think tank Terra Nova proche du PS.

Selon lui, un “consensus général” s’est dégagé pour des investissements en faveur de “l’économie de la connaissance” et de la “croissance verte”.

Parmi les secteurs les plus cités figurent le très haut débit, les nanotechnologies ou encore les TGV. Mais partis, syndicats, collectivités locales et patronat y sont tous allés de leurs suggestions plus ou moins intéressées.

La commission Juppé-Rocard “n’est pas un guichet de distribution du grand emprunt” et “ce n’est pas non plus à l’Etat de le faire”, prévient Olivier Ferrand, qui souhaite une “mise en concurrence” tranchée par “des jurys compétents”.

Le ministre de la Relance Patrick Devedjian a expliqué que cette “gouvernance” du grand emprunt pourrait être confiée à “une autorité transversale à tous les ministères”.