Allan Meltzer, économiste américain : la régulation protège les banques et non le public

meltzer-1.jpgAllan Meltzer, professeur d’économie politique à l’université
américaine Carnegie Mellon et chercheur invité à l’American Enterprise Institute,
a débattu avec Stuart Mackintosh, directeur exécutif du Groupe des Trente, un
organisme consultatif sur les affaires économiques et monétaires
internationales, des avantages et des inconvénients de la réglementation comme
moyen d’éviter une nouvelle crise financière. M. Meltzer s’est fermement exprimé
contre la réglementation. «Ça ne marche pas, ça ne marche pas, a-t-il affirmé.
L’histoire de la réglementation montre qu’elle protège les banques, pas le
public».

M. Meltzer a déclaré à propos de la Réserve fédérale avait été inefficace
contre la crise des caisses d’épargne et celle de la dette de l’Amérique
latine dans les années 80. Elle avait été tout aussi incapable de réagir à
la crise engendrée par l’effondrement du secteur de la haute technologie à
la fin des années 90. Il n’est donc pas surprenant de constater qu’elle a
été incapable d’éviter l’actuelle crise du marché du crédit. Selon lui,
cette crise a surgi non pas à cause d’un manque de réglementation, mais
parce que les banques et les institutions financières ont appris à la
contourner. « Le premier principe de la réglementation est que lorsque des
bureaucrates et des avocats créent un règlement, les banquiers et les
marchés apprennent comment le contourner. » Il s’est moqué de l’actuel
mouvement au sein de la politique économique en faveur d’un «
super-régulateur » qui renforcerait la surveillance publique des marchés
financiers.

« L’histoire montre que la Réserve fédérale n’a jamais su anticiper une
crise. La SEC (Commission des opérations en bourse) a reçu des pages et des
pages décrivant les agissements du financier Bernard Madoff, et elle n’y a
rien vu. Renforcer leur pouvoir de réglementation est une ineptie. »
La solution consiste plutôt, selon lui, à éliminer toute assistance venant
des contribuables envers les institutions financières désormais considérées
comme « trop importantes pour qu’on les laisse faire faillite ». « Si nous
ne nous débarrassons pas de ces institutions, nous nous retrouverons, tôt ou
tard, aux prises avec une nouvelle crise, parce que le label “trop important
pour faire faillite” incite les banques à ne penser qu’aux bénéfices,
laissant aux contribuables le soin d’absorber les pertes. »

M. Mackintosh a quant à lui comparé la crise financière à un « quartier
chaotique » où des parents adeptes du laissez-faire auraient renoncé à
contrôler leurs enfants, citant pour illustrer ses propos des institutions
financières comme Lehman Brothers, Citigroup, Bear Stearns Companies et
American International Group (AIG). « Ils ont fait des paris risqués et ont
dépensé le maximum avec leurs cartes de crédit », a-t-il dit. Pour le
gouvernement Obama, la tâche consiste maintenant à « établir de nouveaux
règlements pour ce quartier », règlements qui devront être assortis d’une
supervision financière plus stricte.

Il était clair que M. Mackintosh était en complet désaccord avec M. Meltzer
sur le rôle de la réglementation. Il a affirmé que l’idée selon laquelle les
marchés peuvent s’auto-réglementer était un oxymore en soi. La grande
question qui anime le débat économique aujourd’hui est celle de déterminer
dans quelle mesure on peut réglementer, comment on peut le faire, quelles
activités on va réglementer, et quels marchés on va surveiller.

En tant que directeur exécutif du Groupe des 30, M. Mackintosh supervise la
compilation de propositions de réformes financières que le gouvernement
Obama va ensuite envisager de soumettre au Congrès aux fins de promulgation.

«Ces banques ont pris des risques énormes et mis l’ensemble du système
financier, en fait la réelle économie, en danger. Nous ne pouvons pas
permettre que cela se reproduise.» Il était toutefois d’accord avec M.
Meltzer sur un point, à savoir qu’il fallait mettre en place un mécanisme
qui laisserait les banques faire faillite de façon contrôlée.

D’après le site America.gov