Comme annoncé dans l’article précédent, voici le second volet de ce chapitre consacré aux échanges internationaux.
Du concept d’avantage comparatif au modèle de Production Equitable.
Faire évoluer le concept d’avantage comparatif relève de la même démarche
	que la remise en cause du concept de développement durable que nous avons
	fait évoluer vers le concept d’écosocionomie. Il s’agit en effet de tirer
	les leçons des échecs de ces concepts au regard de l’évolution de notre
	économie et de notre société pour rétablir un modèle plus équitable.
A cet effet, et fort de l’analyse précédente, il convient d’enrichir notre
	Théorie du Libéralisme Equitable par un nouveau concept de Production
	Equitable.
Ce faisant, nous serons amenés à revisiter le rôle joué par certaines
	Organisation Internationales dont les attributions pourraient utilement
	servir la cause défendue. En particulier, nous nous intéresserons au credo
	officiel de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) qui met la théorie
	traditionnelle du commerce international et son concept principal d’avantage
	comparatif au cœur de ses négociations. 
Les leçons à tirer du bilan écosocionomique du concept d’avantage comparatif …
1- Le capitalisme est facteur de création de richesse et de progrès
	technologique …
Il est malheureusement nécessaire de le rappeler car on finirait presque par
	en douter, tant le capitalisme sauvage nuit à l’idée même de capitalisme.
Par l’action du capital, les entreprises peuvent croitre, et dans une
	économie de marché ouverte la croissance passe inévitablement par
	l’internationalisation. 
… mais trop de capitalisme tue le capitalisme !
Comme nous l’avons évoqué dans le chapitre « des vertus du Libéralisme
	Equitable sur l’emploi et les revenus », notre société ne souffre pas du
	capitalisme mais plutôt d’une trop grande immobilisation du capital.
Et ce comportement typique de l’ultra capitalisme (qui ne cherche que
	l’enrichissement toujours plus grand des détenteurs de capitaux à leur
	profit unique) est totalement absurde car il entraine sa propre perte.
En fait, le Libéralisme équitable apporte, entre autre, une réponse au
	rapport à l’argent qu’entretiennent les capitalistes ! 
2- L’apport des IDE enrichit les pays en développement.
C’est en cela que l’on peut affirmer qu’il y a un effet bénéfique aux
	délocalisations puisqu’elles apportent de la richesse aux pays d’accueil
	lors de l’arrivée d’IDE. Par l’afflux de capitaux nouveaux, les pays
	bénéficiaires peuvent s’enrichir en infrastructures et en emplois. La
	croissance de leur PIB confère une nouvelle dimension à leur parti(cipa)tion
	dans le concert des nations. 
… mais les « redélocalisations » appauvrissent les nations !
Le phénomène de dépendance des pays d’accueil d’IDE a été expliqué plus
	haut. Après une période d’enrichissement liée à l’arrivée d’IDE, le pays
	souffre au départ de ces mêmes investisseurs étrangers. Or, si l’on s’en
	tient à l’objectif de recherche d’avantages compétitifs pour les
	entreprises, rien aujourd’hui, et surtout pas le concept d’avantage
	comparatif, ne permet, en l’état actuel des choses, de bloquer ces
	redélocalisations.
Sur ce point, on aborde naturellement les limites du libre échange qui, s’il
	doit être défendu pour ses vertus, doit cependant être débarrassé des effets
	déstabilisateurs qu’il induit sur les économies par l’absence d’un minimum
	de régulation. Car une nouvelle fois, tout ce qui nuit à l’équilibre général
	des économies nuit aussi à l’intérêt particulier des acteurs économiques
	dans leur ensemble.
3- L’apport des IDE enrichit les habitants …
Les nations ne sont pas seules à bénéficier des investissements étrangers.
	Par la distribution de pouvoir d’achat, on peut parler d’effet
	d’enrichissement des populations. Il n’y a qu’à observer l’évolution du
	pouvoir d’achat sur les 10 dernières années en Europe centrale pour s’en
	convaincre.
… mais accroît les inégalités !
	Pour autant, cet effet d’enrichissement ne profite pas à tous. Comme nous
	l’avons observé plus haut, les investisseurs étrangers font appel à une main
	d’œuvre certes meilleur marché que dans leur pays d’origine, mais
	sélectionnent cependant les plus qualifiés. Ce faisant, une minorité de la
	population va profiter de l’effet d’enrichissement tandis que la plus grande
	partie subira un effet d’éviction.
	D’une part on peut noter que la plupart de la population n’a pas accès à la
	consommation du produit final transformé par l’entreprise avec les salaires
	versés localement (c’est encore plus vrai dans les pays très pauvres
	d’Afrique ou d’Asie).
	D’autre part, l’effet de richesse du pays entraînant une hausse des prix des
	biens de consommation, il y a un effet de perte réelle de pouvoir d’achat
	pour la population qui n’accède pas aux emplois revalorisés. 
4- L’avantage comparatif attire les capitaux …
	Si l’intérêt des entreprises pour les pays offrant les meilleures conditions
	de compétitivité est bien compris, il ne l’est pas moins pour les pays
	accueillants qui trouvent avec ces fonds venus de l’extérieur des ressources
	pour améliorer le niveau de vie des citoyens ainsi que le développement des
	infrastructures comme nous l’avons évoqué dans le point 2. En cela,
	l’économique rejoint le politique. 
… mais génère des abus !
	Parce que la politique est impliquée dans les choix économiques d’un pays,
	les phénomènes de corruption apparaissent dans la plupart des pays en
	développement concernés !
	Parce que par construction de ce concept, la production nationale excède la
	consommation nationale (et vice versa) on observe des déséquilibres de la
	balance des paiements.
	Parce que les échanges sont de plus en plus développés, le coût écologique
	augmente.
	Parce que les flux sont de plus en plus conséquents, leur importance vient
	jouer sur la valeur des devises et des taux de change, générant des effets
	spéculatifs parfois excessifs.
	Pour toutes ces raisons, dans les cas les plus extrêmes (crise mondiale par
	exemple), cette situation peut entrainer un pays à la faillite ! 
Les leçons à tirer de notre bilan sont bien plus nombreuses encore. Mais ces
	différents éléments suffisent à dénoncer les insuffisances caractérisées de
	l’organisation de notre modèle économique actuel. Pour résumer, libre
	échange et mondialisation ne font pas bon ménage lorsqu’ils s’exercent sans
	régulation renforcée !
Régulation, et non Protectionnisme. Car il ne s’agit pas de remettre en
	cause le libre échange, mais ses modalités de fonctionnement qui excluent
	l’homme et l’écologie des décisions économiques et qui conduisent nos
	économies à la surproduction et à la surconsommation. 
	Une chose est sûre : le libre échange n’est pas écosocionomique ! C’est
	pourquoi il faut le remodeler en fixant des règles contraignantes. A cette
	fin, le remplacement du concept d’avantage comparatif par celui de
	Production Equitable est une première étape cruciale.
… et les solutions applicables pour développer le modèle de Production
	Equitable
Si l’on veut présenter le modèle de Production Equitable comme une solution
	à cette situation, commençons par en définir les contours.
Equitable au sens de la Théorie du Libéralisme Equitable signifie donc
	conforme au concept d’écosocionomie. En conséquence, les solutions que nous
	préconisons pour s’opposer au concept d’avantage comparatif, ou plutôt, pour
	ne pas reproduire les conditions favorables à l’apparition d’un avantage
	comparatif, sont des solutions respectant à la fois l’environnement
	écologique, sociologique et économique. Appliquées aux échanges
	internationaux à l’échelle planétaire, ces solutions visent l’enrichissement
	durable des nations et des peuples.
	Et si le pari semble ambitieux rappelons tout de même qu’il existe pléthore
	d’organismes supranationaux qui, mieux utilisés, pourraient utilement
	contribuer à l’atteinte de cet objectif. Nous aurons le loisir de passer ces
	organismes en revue dans un chapitre dédié dans lequel nous traiterons des
	aspects réglementaires induits par le Libéralisme Equitable.
Alors comment appliquer ces solutions !
	En premier lieu, il convient d’établir un bilan géographique des flux de
	marchandise.
	L’objectif est de dresser une carte des centres de production et de
	consommation au niveau mondial avec un but à atteindre : maîtriser les
	délocalisations. Car, comme nos exemples l’ont montré, il n’y a pas de sens
	à faire voyager des marchandises dans le seul but de réaliser un profit
	supplémentaire. Profit qui, nous l’avons aussi évoqué, ne revient qu’au seul
	capital et laisse la facture écosocionomique à la collectivité !
	Ce bilan géographique nous amène donc à proposer la relocalisation de la
	production de biens et services au plus proche des lieux de consommation.
	Face aux défauts de la mondialisation, le Libéralisme Equitable propose la
	Régionalisation des échanges. Car l’idée est bien de favoriser le libre
	échange sur des zones politiques, économiques et géographiques (écologie
	oblige !) suffisamment homogènes pour supprimer les effets anti-écosocionomiques
	de la mondialisation, sans priver pour autant les économies des progrès
	technologiques et du profit liés à l’internationalisation des échanges. Un
	libre échange régionalisé donc pour mieux maîtriser les flux de production
	et de consommation en vue de rééquilibrer les termes de l’échange !
	Maîtriser, mais non stopper les délocalisations ! Au contraire, en créant
	les conditions favorables à l’équilibre des échanges on encourage
	l’investissement partout où un besoin apparait. Et qui mieux que des
	entreprises étrangères peut apporter un savoir faire et du capital
	nécessaires à ces investissements !
	Cette approche se justifie d’autant plus aisément qu’à force de rechercher
	l’avantage compétitif le plus fort on finit par se couper de son marché qui
	faute de revenu ne peut plus se payer le produit fourni. L’investisseur a
	donc effectivement accumulé du capital en plus grande quantité, mais
	celui-ci n’a plus de valeur faute de marché (l’immobilier en est la
	meilleure preuve).
	Sous cette forme, les modes de production doivent désormais se tourner vers
	la recherche d’un équilibre écosocionomique et non plus vers la recherche de
	la seule maximisation des profits. De même, la question de l’avantage
	comparatif des états s’inscrit désormais dans un cadre interrégional et non
	plus intra-régional.
	Cette organisation des échanges a donc pour conséquence de réduire la
	destruction écologique et la précarité sociale, la concurrence ne jouant
	plus désormais sur le seul facteur prix mais sur la qualité et le service.
	En second lieu, il convient d’évaluer l’impact technologique du concept de
	Production Equitable.
	Puisque les coûts de production ne peuvent plus « bénéficier » de l’avantage
	salarial lié aux délocalisations sur le plan intra-régional, l’entreprise va
	se trouver confrontée à une double obligation pour développer son marché :
	innover et améliorer la qualité.
	La situation à ce jour, on l’a vu, offre des opportunités de croissance,
	tant pour les entreprises que pour les nations, mais limite cette croissance
	dans le temps. Et les désordres économiques que cela engendre sont
	caractérisés par ce que l’on qualifie de cycles économiques. Le plus
	étonnant est que les économistes ont toujours considéré que la lutte contre
	les crises générées par ces cycles passait par des politiques de relance de
	la croissance (par l’offre ou la demande, au gré des époques et des
	influences idéologiques !)
	Mais considérons un instant que ces crises sont justement le fait de la
	croissance et non de l’absence de croissance ! Et si par l’absence de freins
	à la course aux avantages (compétitifs et comparatifs) cette croissance
	n’avait d’autre issue que la crise !
	Cette approche singulière nous amène donc à modéliser un peu plus le concept
	de Production Equitable sous l’angle de la maîtrise de la croissance,
	contenue à la fois géographiquement (nous l’avons présenté plus haut) mais
	aussi quantitativement et qualitativement.
	Et sur ces deux derniers points, l’impact technologique du concept de
	Production Equitable parait primordial puisqu’il met en avant la notion de
	transfert de technologie pour tous les I.D.E. En effet, comme nous l’avons
	montré, le « jeu » des délocalisations-relocalisations agit comme un élément
	à part entière de croissance-récession sur les pays impliqués (accueillant
	ou perdant les I.D.E.).
	Pour pallier à cette difficulté, on doit s’interroger sur la possibilité de
	développer une production nationale se substituant aux investisseurs
	étrangers : l’obligation de transfert de technologie pour installer
	durablement la production apportée dans le pays.
	Posé sous cet angle, l’un des enjeux de la régulation des déséquilibres du
	Commerce International parait accessible ! En effet, les transferts de
	technologie contribuent à la régionalisation des centres de production (au
	plus proche de leur marché) et permettent aux nations de faire une
	transition vers des modes de Production conformes au concept d’écosocionomie
	et donc Equitables.
	Evidemment, cette réponse n’est que partielle face aux nombreux
	déséquilibres liés a la mondialisation. Et nous aurons en particulier
	l’occasion d’aborder la question de la régulation financière dans un
	prochain chapitre.
	Enfin, pour s’assurer du bon fonctionnement de la Régionalisation, le
	concept de Production Equitable doit faire l’objet d’un environnement
	réglementaire renforcé.
	On relève 4 missions principales à exercer dans le cadre réglementaire : 1-
	s’assurer de la stabilité des échanges sur le long terme, 2- garantir aux
	nations que les échanges intra-régionaux sont équitables, 3- traiter de l’inter-régionalisation
	des échanges, 4- assurer l’équilibre des emplois et des revenus dans le
	cadre d’une Production et d’un Commerce Equitables.
	Cette responsabilité doit nécessairement être assumée par des instances
	représentatives des nations concernées (comme l’OMC, le FMI, l’OIT …), ce
	que nous développerons dans le chapitre « Des vertus du Libéralisme
	Equitable sur l’équilibre public privé».
CONCLUSION :
Dans cette première partie de notre analyse des échanges internationaux nous
	venons de prendre clairement parti pour un système de répartition équitable
	de la production de richesses en vue d’assurer une répartition tout aussi
	équitable des richesses produites.
	Nous avons bien observé en effet que les modalités de fonctionnement des
	échanges internationaux sont responsables d’une forme d’aveuglement des
	marchés face aux risques écosocionomiques engendrés et qu’un dépoussiérage
	de la théorie du Commerce International s’impose. En particulier, la
	bipolarité de notre modèle de société avec les pays émergents d’un coté et
	les pays riches de l’autre met en évidence des désordres qu’il convient de
	mieux maîtriser.
	Ce concept de Production Equitable devient donc l’un des éléments clé de la
	Théorie du Libéralisme Equitable et complète utilement le concept d’Ecosocionomie
	dans l’objectif que nous nous sommes fixé de « remettre l’homme au cœur du
	système de production ».
	Bien sûr, l’approche de régionalisation des économies que nous venons de
	proposer peut paraitre anachronique au regard d’une économie que l’on
	qualifie depuis des décennies de « globalisée » et qui est largement
	dérégulée. Pourtant, loin d’être une marche arrière, cette approche se veut
	consensuelle mais sans concession sur l’essentiel : atteindre un point
	d’équilibre écosocionomique qui assure une croissance maîtrisée des
	économies et un repositionnement de l’homme lui permettant d’être auteur,
	compositeur et interprète de l’évolution de son environnement.
	Les prochaines étapes de notre analyse contribueront à démontrer que cette
	approche est non seulement cohérente au regard de l’évolution des économies
	mais aussi indispensable si l’on veut éviter les crises systémiques.
	(Source : 
	http://www.agoravox.fr)
 
		

