L’Etat américain vient au secours de Bank of America, passée dans le rouge

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à Washington, le 15 septembre 2008 (Photo : Nicholas Kamm)

[16/01/2009 22:17:24] NEW YORK (AFP) Les pouvoirs publics américains ont dû venir à la rescousse de Bank of America, la première banque du pays par les actifs, qui a plongé dans le rouge en fin d’année et voit la situation s’aggraver en 2009, alors même qu’il lui faut digérer l’acquisition de Merrill Lynch.

La banque de Charlotte (Caroline du Nord, sud-est), sortie considérablement agrandie de la recomposition du paysage bancaire de l’an dernier, a affiché sa première perte trimestrielle en 17 ans (-1,7 milliard de dollars), tout en se maintenant dans le vert sur l’ensemble de l’année (+4 milliards de dollars).

Mais après l’absorption de la banque d’affaires Merrill Lynch, qui a affiché 15,3 milliards de pertes trimestrielles, le PDG Kenneth Lewis n’a pas dissimulé qu’il s’attendait à rester dans le rouge un bon moment.

“Tout ce que nous voyons actuellement laisse présager qu’il n’y aura pas de relâchement dans les provisions (pour créances douteuses) pendant au moins plusieurs trimestres”, a-t-il dit devant les analystes financiers.

En conséquence, M. Lewis a évoqué un scénario marqué par plusieurs trimestres de pertes “supérieures ou égales” à celles du quatrième trimestre.

Sur les trois derniers mois de 2008, la banque a déjà augmenté de 2,1 milliards ses provisions pour créances douteuses, pour les porter 8,5 milliards. Elle a dû aussi passer par pertes et profits quelque 5,5 milliards de créances irrécupérables.

Pour l’aider, le Trésor a annoncé dans la nuit une nouvelle injection de 20 milliards de dollars, portant à 45 milliards les sommes accordées par l’Etat au groupe depuis octobre.

L’Etat a aussi accepté de prendre à sa charge la plus grande partie des pertes générées par un portefeuille de 118 milliards de dollars d’actifs “toxiques”, à 75% amenés par Merrill Lynch, a fait valoir M. Lewis.

“Au final, ce qu’on voit, c’est que le (plan de sauvetage du système financier) fonctionne pour éviter une restriction encore plus grave du marché du crédit”, a souligné l’analyste Brian Bethune d’IHS Global Insight.

Mais le marché a sanctionné les pertes et le pessimisme. Déjà au plus bas depuis 1991, l’action de Bank of America a perdu encore 13,70% vendredi à 7,15 dollars.

L’agence d’évaluation Moody’s a pour sa part dégradé d’un cran, à “A1”, la note de Bank of America et Merrill, en s’inquiétant qu’il puisse rester des actifs pourris dans leur bilan, même après l’accord avec l’Etat.

Mis en cause par certains pour s’être emparé de Merrill Lynch sans en avoir les moyens, M. Lewis a souligné qu’il ne pouvait pas anticiper l’accélération des pertes de la banque d’affaires fin décembre.

Alors qu’il envisageait de renoncer à la fusion devant l’ampleur du désastre, il a été convaincu par le Trésor que remettre en cause le rapprochement risquait une nouvelle fois de provoquer le chaos sur les marchés mondiaux.

“Nous sommes allés voir les autorités de régulation pour leur dire qu’on ne pouvait pas boucler la transaction sans leur aide”, a-t-il relaté. “Le gouvernement a pensé que renoncer ou reporter (la fusion) pourrait engendrer une inquiétude considérable et faire du mal au système” financier, et a préféré accorder une nouvelle aide.

“Nous avons fait la bonne chose pour le pays” en avalant Merrill Lynch comme prévu au 1er janvier, a assuré M. Lewis.

La banque a également souligné qu’elle prenait sa part pour faire fonctionner l’économie en ayant accordé “plus de 115 milliards de dollars de nouveaux crédits” durant le quatrième trimestre.

Interrogé par des analystes sur l’inconfort d’être si largement dépendant de l’aide publique, M. Lewis a souligné qu’il espérait se défaire “le plus vite possible” de la tutelle qu’elle induit.

Mais la banque a dû déjà payer le prix de son sauvetage, en ramenant à la portion congrue (0,01 dollar), la rémunération de ses actionnaires, comme l’Etat lui en a fait obligation. Son dividende était jusque là de 0,32 dollar.