Les phénomènes psychologiques du marché financier tunisien : Constats, Analyses et Remèdes

Par : Autres

h-mokdadi1.jpgMOKDADI
HAMADI, Observateur avisé de la finance Tunisienne et internationale et
opérateur actif, poursuit avec persévérance ses réflexions sur la situation des
marchés financiers (focalisé sur la collecte de l’épargne) pour nous expliquer,
à cette occasion, l’importance que devrait accorder tous les intervenants aux
phénomènes psychologiques qui guident le comportement des épargnants. Une
réalité que nous devrions considérer pour sauvegarder les acquis et se projeter
sans complexes dans des meilleures situations. L’analyse de MR MOKDADI,
conditionnée certainement par les diverses réactions à la crise financière
internationale, est pertinente parce qu’elle fait émerger les facteurs
psychologiques qu’ils considèrent indissociables des autre critères d’analyses
des fondamentaux du marché financier tunisien. Voici son analyse :

Faut il aborder l’extrapolation des effets de la psychologie
de l’épargnant ou celle du marché financier pour développer une relation de
confiance durable entre les investisseurs et les intermédiaires financiers, et
ce en tant que deux acteurs indispensables à la pérennité du marché.

Ainsi, la psychologie de placement en produits financiers prend toute sa
valeur, essentiellement à travers toutes les stratégies adoptées.

Plus que des nouvelles sur l’économie en général et sur les entreprises,
c’est l’interprétation que feront les investisseurs qui guident les évolutions
du marché financier. Celle ci se manifeste notamment dans l’appréciation des
publications des résultats et à l’occasion des communications financières. Il
n’est pas rare de constater que le prix d’une action peut chuter à la suite
d’une bonne nouvelle et augmenter sur une mauvaise. Le revers de cette situation
c’est que plus les prix montent, plus l’investisseur est tenter d’acheter,
l’espoir de gain devient trop fort. Il faut prendre conscience que cette façon
de faire alimente en permanence un bulle spéculative. Le mimétisme est à bannir !!

C’est à quoi je vais m’atteler pour aborder les atouts de la psychologie
différentielle, qui dicte que les différences dans les conduites des individus
et des groupes, doivent être largement observées.

Les méthodes utilisées reposent sur l’exploitation des résultats des tests
préalablement répertoriés liées étroitement à la psychologie cognitive, qui
suppose que le traitement de l’information est sujette à une interprétation très
active de point de vue des structures ou des processus de traitement par
l’ensembles des intervenants.

En ces périodes particulières, il est intéressant de décrypter la psychologie
des intervenants et de voir leur comportement basé sur le savoir faire, le
niveau des fonds investi et la recherche de l’effet de levier maximum.

L’espoir de gain ou la crainte de moins values va dicter la psychologie d’un
investisseur. Ainsi, les mauvaises anticipations peuvent contribuer au
retournement du marché, de mêmes les mauvaises nouvelles en provenance du
système financier international et de l’économie mondiale agissent sur le
comportement des épargnants locaux.

Ces informations, nous pouvons le certifier, n’ont aucune relation directe
avec la réalité de notre environnement.

En d’autres termes, l’évolution de la physionomie de la bourse est la
conséquence d’émotion et de peu de critères fondamentaux tangibles.

Du coté de la psychologie des investisseurs, un tel comportement est très
intéressant à élucider.

Attendre une hausse supplémentaire du marché avant de céder ses positions,
conjuguées souvent à des mauvaises anticipations, contribue dans tous les cas à
un retournement du marché lors des ventes massives. Ce scénario offre plusieurs
stratégies et non une seule avec objectif de retrouver ses anciennes lignes.

Mais la vérité est entre les deux, où volatilité et volume important sont
juxtaposées traduisant une période de forte baisse suivi d’un retour haussier
piégeant les vendeurs en privilégiant les acheteurs (PER bas) ; plus tard c’est
ces mêmes acheteurs se sentent frustré contribuant sans doute au moment de
panique généralisé, que nous avons connu pendant deux à trois semaines (début
octobre 2008).

Ces situations instables, entraînant un désintéressement provisoire, sont les
effets de nombreux éléments psychologique que nous allons détaillé et expliqué
plus loin.

Ainsi, s’il n’ y a aucun changement dans les fondamentaux des sociétés cotées
et de l’économie en générale (mais ils se consolident), ni dans les circuits et
les techniques de cotation, la baisse d’un marché est souvent la résultante des
ventes forcées ou d’appel de marge (margin call), justement guidée par les
difficultés de trouver les stratégies d’optimisation du ratio de rendement /
risque très variable.

Normalement cette baisse incite aux nouvelles acquisitions, mais généralement
l’attitude des détenteurs d’un titre est partagée entre vendre ou attendre !
Difficile de réaliser, il faut à cet instant s’armer de beaucoup de patience.

De plus les actions ne représentent qu’une partie du portefeuille, d’autres
produits de substitution sont aussi intéressant : les SICAV, les obligations
publiques et privées à court, moyen et long terme, qui permettent de diversifier
le contenu et améliorer la qualité des positions.

Ces phénomènes ont incité les spécialistes de la psychologie des réactions
des investisseurs de tracer le chemin de l’épargnant en bourse et ses
sentiments, nous les résumons ainsi :

placement-450.jpg

En prolongement à ce chemin et faisant la liaison avec les
écrits d’Alain Sueur (Essai sur les outils de la stratégie boursière, Ed
Eyrolles 2007), ces sentiments sont traduits en plusieurs comportements de prise
de décisions ; (l’investisseur en 4 dimensions).

macro450.jpg

Ainsi, il démontre qu’aujourd’hui la psychologie commande et que
le meilleur stratège est celui qui se place au milieu pour se focaliser sur les
approches pour les analyser en permanence, où toutes les informations provenant
des économistes, des analystes, des investisseurs…, sont utiles et peuvent
servir à agir avec doigté et sans pessimisme excessif.

D’ailleurs, les indices mis en place pour refléter les performances des secteurs
et des entreprises représentatives du marché, comme par exemple :

– En France : CAC 40 : cotation assistée en continu, regroupent 40 sociétés
cotées.

– Au USA : Dow Jones : l’indice boursier composé des 30 principales valeurs
industrielles cotées à la Bourse de New York et l’indice boursier des valeurs
technologiques américaines « NASDAQ ».

– A Londres : FTSE 100 : Financial Times Stock Exchanges qui regroupe 33
valeurs.

– A Tunis : le TUNINDEX : Tunis Index qui regroupe 43 valeurs, qui méritent d’être analyser de très prés sur des périodes plus ou moins
longues.

En prenant les exemples du TUNINDEX et du CAC40, nous concluons que leurs
courbes d’évolution sont imprégnées par le chemin de l’épargnant (présenté plus
haut).

indice-450.jpg

Le constat est édifiant, l’évolution de la courbe est influencée
par des phénomènes psychologiques que personne ne peut écarter, ni ignorer pour
identifier les évolutions intermittentes d’un marché financier quelconque.

Notre marché ne déroge pas à cette règle ( voir courbe TUNINDEX)

Plusieurs études on démontré que des indices classiques ne comptent que pour 40
% dans la prise de décision, et l’analyse de la volatilité, exprimé généralement
par des phénomènes psychologiques pour 60 %. Les indices reflètent certes une
réalité économique intrinsèque mais aussi et surtout la psychologie des
épargnants.

Pour cela, il faut chercher en permanence des informations exceptionnelles qui
conditionnent le décalage des cours à la hausse ou à la baisse et pour booster
les rendements, il faut toujours conseiller d’acheter le titre dans une période
de forte déprime boursière.

Sachant pertinemment que l’épargne financière souffre de carences visibles dans
le traitement de l’information que ce soit de la part des émetteurs ou des
analystes. Les sources d’information, difficilement accessibles et irrégulières,
n’offrent guère au public même le plus avisé, la possibilité d’être actif sur le
marché et d’injecter en permanence des liquidités pour développer davantage
l’efficience du marché.

La mission du marché financier est fort intéressante pour mieux comprendre
pourquoi on a développé cet espace d’échanges.

Un épargnant, désirant placer une partie de ses économies en produits
financiers, se trouve en face de 2 raisons fondamentales pour mener ses
interventions sur le marché :

– Croire à une entreprise et à la réussite d’un secteur pour récupérer les
dividendes (placement stratégique).

– Réaliser des plus values sur le comportement du titre coté.

D’ailleurs, des dictons et des déclarations pertinentes se rapprochent de cette
réalité et l’inspire : « je me sers de mon argent pour faire des économies et je
me sers de mes économies pour dépenser de l’argent » disait l’humoriste français
Francis Blanche.

De son coté, RENE DORIN déclare que « lire attentivement les cours de bourse
c’est une étude, acheter quelques valeurs c’est une leçon ».

Rappelons aussi ce qu’affirme VACLAV HAVEL (politicien tchèque) : le marché ne
peut exister qu’à condition de s’appuyer sur une morale.

Quand à KENNETH CHANG constate qu’un marché est la combinaison des comportements
de milliers de personnes répondant aux informations, à la désinformation et à
leurs caprices.

En ce moment précis, tout le monde observe de très près les régulateurs et leur
capacité à soutenir le marché.

Un bon équilibre psychologique exige qu’il faut écouter les économistes, les
analystes, toutes les déclarations des émetteurs et pourquoi pas la réaction des
spéculateurs, ce qui permet d’obtenir de bonnes performances.

Enfin, si en bourse il faut acheter la rumeur et vendre la nouvelle, peut on se
contenter de dire que c’est le seul endroit ou l’on peut se faire comprendre
qu’on parlant le langage des cours.

Absolument pas, les effets psychologiques des acteurs du marché sont importants
et qu’il est urgent que les intermédiaires financiers invitent les épargnants à
adhérer activement à la gestion collective ; plan assurance-vie, plan d’épargne
logement, SICAV, FCP…..pour pouvoir contenir les effets directs, surtout qu’au
niveau du circuit économique global les principaux agents à capacité d’épargne
sont les ménages, qui alimentent en permanence le besoin de financement de
l’économie. Ainsi, le rôle des organismes collecteurs d’épargne est important,
en promettant aux épargnants, un retour sur leur investissement à court, moyen
et long terme. On peut citer par exemple, les compagnies d’assurance, la gestion
collective, la gestion privée et la gestion sous mandat.

Et parce que le marché financier est un outil de financement formidable pour l’Etat
et pour les entreprises, qui souhaitent lever des capitaux pour se développer,
qu’il faut pour cela une vision à long terme et non une attitude à court terme
qui influencent les stratégies sans pour autant satisfaire les actionnaires.

Des connaissances longues et solides ainsi qu’un apprentissage régulier aux
mécanismes du marché financier permettent aux investisseurs, au fil du temps, de
réaliser les stratégies adéquates pour développer leur patrimoine financier.

Ainsi, la vérité est établie au niveau de l’Appel public à l’Epargne (APE), on
se demande souvent pourquoi les dirigeants des entreprises favorisent le
financement bancaire au financement direct (8 % seulement dans le financement
des investissements privés), apport en fonds propres, emprunts obligataires,
portage, OPS…. et s’écartent de la volonté d’introduire leurs sociétés en
bourse, en dépit des encouragements des pouvoirs publics et les séries
d’incitation mis en place.

Les phénomènes psychologiques comptent beaucoup, l’omniprésence du financement
bancaire surtout dans la prise de décision d’investissement et de financement.

La crainte de ne pas réaliser son Business plan, de répondre en permanence à des
interrogations légitimes de la part des actionnaires, mais font partie du
domaine confidentiel, de voir son titre instable et trop volatil, de ne pas
réussir une ouverture de capital (OPV / OPS), de ne pas servir des dividendes,
de ne plus être éligible à la cote de la bourse…etc. Une série de réactions qui
pèse sur le noyau dur (actionnaires de références) qui manifeste généralement sa
volonté de se projeter et faire appel à un potentiel d’actionnaires beaucoup
plus large.

D’ailleurs, notre précédente analyse sur le comportement des investisseurs et
des traders interpelle directement les émetteurs qui demeurent concernés par
l’ensemble des événements heureux ou malheureux issus des différents échanges
sur le marché financier.

Le marché financier, essentiellement la bourse, respecte les différences des
personnes, leurs connaissances de base, leur capacité financière et leur
sensibilité aux risques ainsi que les horizons de placement et les objectifs
sous jacents.

Pour cela, les intermédiaires financiers de la place de TUNIS ( y compris les
banques) doivent les conseiller et les soutenir à franchir ce cap avec objectif
de les rassurer et les fidéliser.

Du coté des commerciaux « conseillers » et les négociateurs, leurs psychologies
d’action sont confrontées en permanence aux réalités du marché. C’est ainsi que
des anciens traders, en l’occurrence RICK Swope et AJ Monte (Publication : The
Market Guys’ Five Points for Trading Success) ont dégagé 5 situations édifiantes
pour expliquer les psychologies des équipes des intermédiaires financiers :

1- Comment traitez la direction de la tendance.

2- Etablir un niveau clair de soutien, ainsi on peut déterminer le niveau de
sortie si la transaction se retourne.

3- Etre vigilant pour que le pivot s’oriente vers la hausse après un achat.

4- Calcul de la perte maximale à 1 % de la valeur du portefeuille et d’exercer
un suivi sans relâche.

5- Agir une fois que vous avez constitué le portefeuille, en plaçant votre Stop loss (seuil de déclenchement) au dessous du niveau de soutien

Cette méthodologie enrobée par des comportements incomparables, classe les
intermédiaires financiers par catégorie, permettant aux épargnants de trouver le
bon interlocuteur , le bon négociateur et en finalité le bon conseiller pour
mieux diversifier son patrimoine financier.

Beaucoup de spécialistes, parmi eux RICHARD DENNIS, défendent l’idée que les
décisions de l’intermédiaire financier doivent être effectuées de manière peu
émotionnelle que possible. Pour cela, il faut avoir une perspective large et
éviter de se focaliser sur le résultat à court terme.

Et parce que le gestionnaire est absorbé par la recherche des opportunités
générées par les événements intervenus dans la vie de l’entreprise :
filialisation, fusion, potentiel de développement, business plan…, ainsi que
dans l’appréciation des avantages et des inconvénients de la liquidité, de la
transparence et du risque, qu’il faut adopter une stratégie préventive dans la
gestion des émotions, ce qui traduit inéluctablement plus de performance et de
meilleurs résultats.

De ce qui précède, on ne peut qu’authentifier l’importance de la psychologie des
intermédiaires financiers, des investisseurs et des régulateurs et ce dans la
détermination et l’analyse du niveau souhaité dans le développement du marché
financier Tunisien.

En effet, une nouvelle discipline « la finance comportementale » s’est
développée pour essayer d’éclairer et d’analyser l’efficience des marchés. Cela
permet de comprendre plusieurs phénomènes, comme les événements exceptionnels
qui viennent de se produire ces derniers mois véhiculés par la crise financière
internationale.

(Source : Article publié par l’économiste maghrébin du 4/12/2008 n° 485)