Shell arrête sa production sur un site au Nigeria après une attaque

 
 
[19/06/2008 19:30:28] LAGOS (AFP)

photo_1213869559690-5-1.jpg
Vue partielle du puit offshore du gisement de Bonga (Photo : Jacques Lhuillery)

Le Mouvement d’émancipation du Delta du Niger (MEND) a revendiqué l’attaque qui a visé jeudi un important puits offshore de Shell, obligeant la compagnie à interrompre la production et confirmant sa détermination à perturber l’industrie pétrolière du Nigeria.

“Ce matin à 00H45 nos combattants ont investi la prétendue forteresse de Bonga. La salle informatique de contrôle de la production était notre principale cible que nous voulions faire sauter, mais nous n’avons pas pu y accéder”, affirme le MEND dans un courriel à l’AFP.

Shell a dû interrompre sa production à Bonga, à la suite de l’attaque.

“Nous avons arrêté la production sur le champ pétrolier de Bonga après l’attaque ce matin par des militants inconnus,” a déclaré le porte-parole de Shell Precious Okolobo.

Cette fois les assaillants ont pris pour cible le champ FPSO Bonga (Floating, Production, Storage and Offloading), situé à 120 km au large de Lagos, un monstre haut comme un immeuble de douze étages, 305 mètres de long, 58 de large et 32 de haut.

Bonga a une capacité pouvant aller jusqu’à 250.000 barils par jour et 150 millions de pieds cubes de gaz, qui partent vers le terminal de Bonny par des gazoducs sous-marins.

L’attaque inquiète les milieux pétroliers, compte tenu de la situation du site visé, jusqu’alors considéré comme inatteignable par les groupes armés.

“C’est très très préoccupant. On touche à la zone la plus garantie de production. Cela veut dire qu’il n’y a désormais pas de limite pour les attaques”, a dit à l’AFP un responsable d’une multinationale.

“C’est une tendance très dangereuse, un très mauvais signal pour le pays. Le gouvernement doit réagir très fermement et violemment”, renchérit un dirigeant de la compagnie nationale nigériane NNPC.

“Les grands champs offshore sont nos sauveurs”, estimait récemment Levi Ajuonuma, un responsable de la NNPC.

“Notre prochaine visite sera différente, et l’installation ne sera pas épargnée”, a averti le MEND affirmant avoir enlevé un américain, Jack Stone, travaillant pour une autre société para-pétrolière, et qu’il serait libéré dans la journée.

Effectivement, un citoyen américain “a été relâché” jeudi soir par ses ravisseurs, a annoncé un responsable américain, sans confirmer son identité.

Le ministre nigérian de l’Information a déploré une attaque “très malheureuse” qui “légitimise la criminalité”.

“La cible d’aujourd’hui a été délibérément choisie pour prouver une fois pour toute que l’exploration offshore n’est pas hors d’atteinte”, a commenté le MEND qui demande à toutes les multinationales de faire partir leurs employés du Nigeria “jusqu’à ce que la question du Delta du Niger soit résolue”.

“Les navires pétroliers et gaziers sont également avertis d’éviter les eaux nigérianes sous peine d’attaques”, conclut le MEND.

Affirmant se battre pour les populations de la région afin qu’elles obtiennent une plus grande part de la manne pétrolière, le mouvement a répété que ses attaques faisaient partie d’une “Opération Cyclone” visant à “ruiner l’industrie d’exportation pétrolière du Nigeria”.

Le baril de pétrole a atteint les 137 dollars, après cette attaque.

Le site de Bonga, ouvert en novembre 2005, a permis à Shell d’exporter 100 millions de barils en mai 2007 et est détenu à 55% par Shell, 20% par le géant américain Exxon Mobil, 12,5% par l’Italien Agip, et 12,5% par le groupe français Total, via Elf Petroleum Nigeria.

Cette attaque est la dernière d’une séries visant les intérêts de Shell.

Les violences dans le Delta du Niger ont privé le Nigeria d’un quart de sa production de pétrole depuis janvier 2006.

Le pays a perdu en avril sa place de premier producteur africain au profit de l’Angola selon l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (0PEP). L’Angola a produit 1,873 million de baril par jour en avril, contre 1,818 million de b/j pour le Nigeria.

 19/06/2008 19:30:28 – Â© 2008 AFP