Les patrons tunisiens sont-ils de bons orateurs ?


Par Imed Eddine Boulaâba

L’art de bien parler en
public, d’être rigoureux avec l’expression orale et de pouvoir agencer, en
face d’un auditoire parfois hétérogène, des propos compréhensifs et
mémorables suppose, tout d’abord, une vocation, un travail sur soi et une
farouche volonté de persuasion, de séduction et de communication. Les
patrons tunisiens connaissent-ils les ressorts des différentes stratégies
langagières, capables d’envouter des mass-médias, de charmer des membres
d’un conseil d’administration ou des actionnaires en quête d’un
manager-taurillon, prêt à charger, à gagner ?

 

Les dirigeants
d’entreprise sont-ils de bons orateurs ? Existe-t-il, chez eux, un réflexe
de défiance et de retenue, expliquant, peut-être, la pudeur des uns et le
manque d’énergie de certains, soucieux de respecter à la lettre le vieil
adage «vivons heureux, vivons cachés» ?

 

Il est essentiel et
vital, pour tout meneur d’hommes, de rayonner en public tout en évitant les
tendances monotones, l’étalage des états d’âme et la sur-médiatisation. La
modernisation du patronat et, à terme, la redynamisation des relations des
Tunisiens avec l’entreprise dépendent autant des qualités managériales que
d’une prise de conscience des enjeux de la performance communicative.

 

Décryptage de quatre patrons tunisiens :

 

En s’appuyant sur les
indicateurs d’une agence spécialisée dans la communication, nous avons
observé, décrypté les gestes et les mimiques de quelques grands patrons
tunisiens, visages familiers et furtifs des foyers tunisiens, habitués
plutôt, à travers le petit écran, aux vedettes de la chanson et du show-biz.

 

Hédi Djilani
:
Président de l’U.T.I.C.A.

Contexte : apparition à
la télévision

Points positifs : il
présente bien et utilise ses mains de façon harmonieuse. Son visage dégage
beaucoup de sympathie, ce qui lui permet de fluidifier ses relations avec
ses interlocuteurs

Suggestions : il faut
varier le ton et la vitesse du débit afin d’éviter le phrasé monotone, les
mouvements répétitifs et les réponses longues dont la teneur trahit un souci
pédagogique, par ailleurs louable.

 

 

Hammadi
Ben Sedrine

: Vice-président de
l’UTICA, chargé des affaires sociales

Contexte : la Chambre des
conseillers.


P
oints
positifs :
il semble formuler clairement ce qu’il veut dire. C’est
visiblement un homme de communication, cela s’entend quand il parle
puisqu’il varie le rythme de son débit. En ponctuant certains mots, il
parvient à maintenir son auditoire en éveil.

Suggestions : délié,
cultivé, raffiné et tonitruant patron d’un secteur réputé virile et
fougueux, il gagnerait à doser ses apparitions publiques.

 

 

Hadj El Fehri
:
président du Conseil d’affaires tuniso-marocain :

Contexte : Réunion des
instances régionales de l’U.T.I.C.A à Nabeul.

Points positifs : Il est
clair qu’avec ce patron provinciale, joviale jusqu’à l’excès, l’aspect
débonnaire et le franc-parler jouent un rôle primordiale dans la promotion
des réflexes partagés, des ambitions convergentes au sein de son entourage
immédiat

Suggestions : pour bien
communiquer, il faut être détendu. Dès que l’on arrête de jouer un rôle, on
paraît beaucoup plus naturel aux yeux de ceux qui nous regardent.

 

 

Hamdi Meddeb

: A
la tête d’une grande holding agroalimentaire.

Contexte : En compagnie
de l’Espérance Sportive de Tunis

Suggestions : c’est
visiblement un introverti. Il a côté ça-me-suffit avec la conviction que la
tranquillité vient de l’extériorité. C’est le temps de l’anti-héros,
redoutant sa timidité et ses raideurs. Dévoré par le sport et le challenge,
il devrait jouer de l’authenticité de son tempérament pour se réformer
lui-même.