France Crise GouvernementCe rapport propose un classement historique des chefs de gouvernement les plus éphémères en France, de la IIIe à la Ve République, mesuré en jours entre la formation/nomination et la démission ou le renversement effectif. Il unifie les titres de Président du Conseil (IIIe–IVe) et Premier ministre (Ve) pour comparer l’instabilité exécutive dans des régimes aux logiques différentes.

Le ressort institutionnel de l’éphémère

Sous les IIIe–IVe Républiques, la souveraineté parlementaire et la fragmentation partisane rendent les coalitions instables : la brièveté des mandats y est structurelle. La Ve République rompt avec cette logique via un parlementarisme rationalisé (art. 49), faisant de l’éphémérité une anomalie révélatrice d’une crise politique ou de coalition.

Palmarès historique

La IIIe République concentre les records : Paul Painlevé (II) chute en 3 jours (1925) sur un projet financier ; Jules Dufaure (1873) tombe en 7 jours lors d’un affrontement constitutionnel ; Rochebouët (1877) dure 20 jours dans un bras de fer avec une Chambre hostile. La IVe, chroniquement instable, présente aussi des durées très courtes (André Marie II, 9 jours en 1948).

L’anomalie contemporaine (Ve République)

La Ve République a longtemps amorti l’instabilité. Mais la XVIIe législature (2024–2025), sans majorité absolue, réactive des schémas de fragilité : Barnier (97 jours) est renversé via 49.3 + censure ; Bayrou (270 jours) chute après un refus de confiance (49.1). Sébastien Lecornu (oct. 2025) établit un record absolu : démission en quelques heures après l’annonce de son gouvernement, sans vote parlementaire — implosion de coalition et « paralysie préventive ».

Enseignement

La brièveté d’hier signalait la prééminence du législatif ; celle d’aujourd’hui révèle une incapacité de formation gouvernementale dans un espace partisan hyper-fragmenté. Le cas Lecornu redéfinit le seuil de l’éphémérité sous la Ve République et interroge la capacité du régime à stabiliser l’exécutif sans majorité cohérente.