Une des mesures phares de la loi de finances 2024 qui vient d’être paraphée par le Président de la république Kaïs Saïed, l’institution, à la dernière minute, d’une amnistie fiscale sous forme de réconciliation pénale pour les sanctions et pénalités financières émises en matière pénale.

Cette amnistie viendrait, semble-t-il, pallier un des ratages de la loi de finances 2023 dont des mesures portant relèvement du plafond des pénalités de retard, des pénalités de paiement et des frais de poursuites n’ont pas pu être menées totalement à terme, ce qui a perturbé le schéma de recouvrement.

Conséquence, l’objectif déclaré serait d’y remédier en 2024, de booster, ainsi, le système de recouvrement fiscal et de développer les ressources du Trésor public.

Qui sont concernés ?

Discutée dans des circonstances pas très claires, le samedi 9 décembre 2023, par l’Assemblée des représentants du peuple(ARP) et adoptée par 80 votes pour, 38 contre, et 7 abstentions, cette disposition supplémentaire porte sur la conciliation pénale des peines financières.

“L’amnistie fiscale viendrait, semble-t-il, pallier un des ratages de la loi de finances 2023.”

Sont concernées par cette amnistie fiscale, les dettes fiscales consignées par le receveur des finances, avant le 1er janvier 2024, les dettes fiscales non inscrites avant le 1er janvier 2024, ayant toutefois fait l’objet d’un accord de conciliation, résultant d’une reconnaissance de dette ou définies par un arrêté de taxation d’office notifiés avant le 20 juin 2024, et les dettes fiscales définies par un jugement lié à un impôt sujet d’un litige et inscrites avant le 1er juin 2024.

Les principales dispositions de l’amnistie

L’amnistie fiscale proprement dite est articulée autour de plusieurs axes : les créances fiscales constatées, les pénalités de retard, les irrégularités des déclarations fiscales et le droit de circulation.

Le principal volet concerne les créances fiscales constatées. L’amnistie prévoit l’abandon des pénalités de retard et de recouvrement liées à des dettes fiscales inscrites sur les journaux comptables du receveur des finances. Elle concerne également les pénalités relatives aux dettes fiscales faisant l’objet d’une conciliation, d’un acte de reconnaissance, d’une sentence juridique ou à des taxations d’office. Dans cette perspective, un échéancier de quatre tranches s’étendant sur une période de cinq ans doit être établi avec cette nuance : la première doit être obligatoirement payée en intégralité avant le 30 juin 2024.

“Sont concernées par cette amnistie fiscale, les dettes fiscales consignées par le receveur des finances, avant le 1er janvier 2024.”

Le second volet porte sur les pénalités et des amendes fiscales administratives. L’amnistie prévoit, à ce propos, un abandon total, à condition qu’elles soient inscrites sur les journaux comptables du receveur des finances avant le 1er janvier 2024 et qu’elles ne dépassent pas la somme de cent dinars par pénalité.

Pour les pénalités et amendes fiscales administratives constatées avant le 20 juin 2024, l’amnistie permet de payer uniquement 50% de leurs valeurs.

“L’amnistie fiscale proprement dite est articulée autour de plusieurs axes : les créances fiscales constatées, les pénalités de retard, les irrégularités des déclarations fiscales et le droit de circulation.”

Quant à l’amnistie relative aux taxes et droits de circulation, l’article élaboré, à cette fin, précise que cette amnistie concerne les années 2020, 2021 et 2022, ainsi que les taxes ayant fait l’objet d’un procès verbal rédigé avant le 1er janvier 2024. L’article fait une mention spéciale pour les années 2023 et 2024 au cours desquelles les taxes doivent être payées, et ce, avant le 31 décembre 2024. Ce serait la condition sine qua non pour bénéficier de l’amnistie.

S’agissant des irrégularités des déclarations fiscales, l’amnistie stipule l’abandon des pénalités liées à ces déclarations, à condition de régler la dette à l’origine de ces pénalités.

L’amnistie fiscale n’était pas du goût de la ministre des finances

Chose bizarre, cette amnistie n’a pas été du goût de la ministre des Finances Sihem Boughdiri Nemsia.

Cette dernière a déclaré que « la tendance générale est basée sur la conformité fiscale ». Elle a expliqué que le maintien de la mesure d’amnistie fiscale porterait atteinte au principe de justice fiscale et encouragerait les pratiques d’évasion fiscale.

Néanmoins, la réaction de la ministre des finances est bizarre. Elle vient illustrer un manque de coordination criant entre l’exécutif et le législatif à moins que ce ne soit pas une mise en scène où les rôles sont partagés. Nous ne pouvons pas nous interdire de faire ce constat surtout lorsqu’on sait que les deux pouvoirs relèvent d’un même sponsor référentiel, la présidence de la république.

Abou SARRA