Dans une première depuis son ouverture officielle en 1888, le Musée National du Bardo abrite une des plus grandes découvertes de pièces anciennes de monnaie en or, nichée dans une nouvelle salle d’exposition baptisée “Le trésor de Chemtou”, un projet mené dans le cadre d’une coopération tuniso-allemande.

L’inauguration officielle de cette nouvelle composante au musée du Bardo a eu lieu lundi après-midi en présence notamment de la ministre des affaires culturelles Hayet Guettat Guermazi, de l’ambassadeur de la république Fédérale allemande en Tunisie Peter Prugel, du secrétaire général de l’Institut archéologique allemande Philipp Von Rummel, ainsi que d’un grand nombre d’ambassadeurs et de représentants de missions diplomatiques accrédités en Tunisie.

Vu la valeur exceptionnelle de cette découverte, le choix s’est porté sur le musée National du Bardo pour être le meilleur écrin à accueillir ce trésor monétaire et à le rendre visible au large public, a mentionné Hayet Guettat Germazi.

Cette découverte, a-t-elle relevé, est l’une des plus grandes découvertes de pièces de monnaie en or réalisées dans la région du Maghreb sur le plan archéologique et historique. Moyennant un coût de l’ordre de 147 mille euros (environ 450 mille dinars tunisiens), cette nouvelle salle muséographique mérite bien le détour pour découvrir ces pièces antiques, a-t-elle lancé.

A son tour, l’ambassadeur de la République fédérale d’Allemagne, Peter Prügel, a mis l’accent sur la solidité des relations bilatérales dans les divers domaines de coopération notamment dans le secteur de la culture et du patrimoine. Soulignant la richesse du patrimoine archéologique et culturel dont regorge la Tunisie, il a exprimé la volonté de poursuivre cette coopération afin de faire naitre de nouveaux projets susceptibles de renforcer davantage les relations bilatérales.

Une découverte…un pan de l’histoire

Le projet “Trésor de Chemtou” a une longue histoire, liée à la coopération tuniso-allemande de longue date entre l’Institut National du Patrimoine (INP) et l’institut Archéologique Allemand depuis près de 60 ans, explique le secrétaire général de l’institut archéologique allemande Philipp Von Rummel.

Au départ, a été construit il y’a trente ans dans le cadre de cette coopération, un musée sur le site archéologique de Chemtou pour présenter les résultats de la recherche, avec un accent particulier sur l’extraction antique du marbre jaune de Numidie, le fameux “giallo antico. De manière tout à fait surprenante, c’est pendant les travaux de construction de ce musée qu’a été porté au jour, le 12 mai 1993, le trésor de pièces de monnaie aujourd’hui exposées dans cette nouvelle salle. C’est grâce aux soins de l’historien, archéologue et épigraphiste tunisien Mustapha Khanoussi, qui a découvert ces pièces, que ce trésor a pu être sauvegardé, explique-t-il.

Les pièces ont ensuite été traitées scientifiquement par Hans Roland Baldus, membre de la commission de Munich de l’Institut archéologique allemand et par Mustapha Khanoussi. La publication monographique de la découverte est parue en 2014 dans le volume 4 de la série commune “Simitthus”.

Parallèlement à la préparation de ce volume, les premières idées pour cette exposition ont vu le jour en 2013. En 2014, l’exposition a été planifiée et était déjà bien avancée en 2015, lorsque les événements tragiques survenus au Musée du Bardo (18 mars 2015) ont empêché la concrétisation de ce projet, qui, après également des années de pandémie, a pu être mené à terme.

La découverte qui est exposée constitue, avec ses 1648 pièces en or (à l’exception d’une en argent trempée dans l’or), et une, la plus grande découverte de pièces en or de la fin de l’Antiquité et de tout l’Empire romain. “L’oureus solidus” était la pièce de monnaie standard de l’Antiquité tardive. En 324, l’empereur Constantin 1er l’avait introduite comme nouvelle pièce de monnaie standard et monnaie principale, a indiqué Philipp Von Rummel dans un bref rappel historique.

La pièce la plus récente date de l’année 418, c’est-à-dire du règne de l’empereur Honorius. D’après les informations fournies, a-t-il mentionné “le trésor monétaire a été réuni en une masse monétaire. C’est ce que prouvent les frappes dites pseudo-impériales, c’est-à-dire des frappes en or ordonnées par un souverain wisigoth qui reste anonyme et qui imitent celles de l’empereur romain. Comme la plupart des pièces sont fraiches et n’ont donc guère circulé, il pourrait s’agir de la fortune d’une caisse d’Etat”.

“Le trésor monétaire” de l’ancienne ville romaine “Simitthus Chimtou”, qui représente, selon la conservatrice du musée Fatma Nait Yghil, plus de 7 kg d’or, met en lumière les multiples facettes de la signification de la numismatique antique. L’exposition raconte également l’histoire de l’Antiquité tardive, une époque fascinante de transformation au cours de laquelle l’Empire romain a été remplacé par les nouveaux structures.

L’exposition qui “déploie un panorama fascinant de la vie antique à travers une présentation historique et culturelle du plus grand dépôt de pièces en or connu de l’Empire romain de l’Antiquité tardive”, couronne également la longue coopération tuniso-allemande dans le domaine de l’archéologie, à Chemtou, à Carthage, à Henchir Bourgou à Djerba ainsi que dans différents autres projets de mise en valeur du patrimoine tunisien.