Contrairement à une idée fortement répandue, « l’Afrique n’importe que 16% de ses besoins alimentaires ».

Cette phrase est signée Bio Goura Soulé, professeur-chercheur et assistant technique élevage et pastoralisme à la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), cité dans une interview accordée au site Agence Ecofin.

Il vient de co-publier un livre titré “L’économie africaine 2023“, qui est une analyse des grandes tendances macroéconomiques du continent africain, du nord au sud, de l’ouest à l’est en passant par le centre.

A cet effet, un chapitre concerne la question de l’insécurité alimentaire en Afrique.

A ce sujet, le chercheur balaie d’un revers de la main certaines idées reçues, entre autres la dépendance alimentaire du continent vis-à-vis de l’extérieur. Voici ce qu’il dit : « Sans l’aide alimentaire, l’Afrique n’importe de l’extérieur que 16% de ses besoins alimentaires ».

Pour étayer ses propos, Goura Soulé explique ce qu’on entend par “insécurité alimentaire“ qui « est toujours un phénomène omnipotent, omniscient en Afrique. Elle se manifeste de plusieurs manières, que ce soit sous forme de sous-alimentation globale, aiguë ou modérée, ou sous forme de malnutrition… La grande nuance qu’il y a lieu de faire est qu’en Afrique, l’insécurité alimentaire n’est pas aussi extravertie qu’on le pense. Sans l’aide alimentaire, l’Afrique n’importe que 16 % de ses besoins alimentaires. C’est-à-dire que pour l’équivalent de 100 francs de biens alimentaires que nous consommons, nous n’avons que l’équivalent de 16 francs qui vient de l’extérieur ».

Ceci étant, il tient à faire un distinguo entre les pays et les produits. «… Globalement, les mieux nantis, c’est-à-dire ceux qui dépendent le moins de l’extérieur pour se nourrir, c’est le Maghreb en première position, ensuite l’Afrique australe. L’Afrique de l’Ouest vient en troisième position. Les moins nantis, ce sont d’abord les pays d’Afrique centrale et en queue ceux de la corne de l’Afrique ».

Mais ce qui est paradoxal, c’est de constater que des pays comme le Gabon, le Congo-Brazzaville, la Guinée équatoriale, pays essentiellement forestiers, dépendent à plus de 80% de l’extérieur, notamment pour les céréales et autres produits laitiers, dit-il.

Pour leur part, les pays d’Afrique de l’Ouest, ce sont particulièrement ceux du Sahel qui rencontrent les plus grandes difficultés, « du fait des effets du changement climatique, de la faible productivité des systèmes agricoles, auxquels est venue s’ajouter ces dernières années l’insécurité qui fait déplacer beaucoup de populations ».

Voici le verdict du professeur-chercheur Bio Goura Soulé : « On a bien l’impression que l’Afrique, c’est un continent où il y a tellement de famine, où tout le monde meurt tous les jours, etc. Non, ce n’est pas vrai ».

Toutefois, il convient de relativiser, car chaque pays ou de pays a sa situation particulière.