Divisés, vindicatifs les uns vis-à-vis des autres et complètement déconnectés des préoccupations du peuple, l’opposition politique en Tunisie, focalisée sur la destitution de l’artisan du 25 juillet, le président Kaïs Saïed, peine à se faire entendre tant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Son désarroi est tel qu’elle commence à divaguer et à s’imaginer des victoires fictives.

Gros plan sur des opposants, de tout bord (gauche – centre – droite), qui prennent leurs hallucinations pour des réalités.

Incapable de déboulonner, un tant soit peu, le locataire du Palais de Carthage, l’opposition est simplement en train de gaffer et de faire de mauvais calculs à tous les niveaux. Plusieurs indices le montrent.

La manifestation, en rangs dispersés, le 14 janvier 2023 pour célébrer le déclenchement des émeutes du mois de janvier 2011, a été un échec cuisant pour cette opposition.

Une manifestation ratée

En dépit de sa bonne préparation et les nombreux appels à descendre dans la rue, cette manifestation n’a mobilisé que 1 500 personnes de tout le pays, selon le ministère de l’Intérieur, quelques milliers selon d’autres sources.

Elle a illustré de manière éloquente l’absence d’ancrage de cette opposition dans la population, et ce en dépit de «perdiemes conséquents» remis aux manifestants, selon nos informations : 100 dinars pour les personnes qui se sont déplacées de l’intérieur du pays et 50 dinars pour le Grand Tunis.

Pratiquement, les responsables d’une vingtaine de partis se sont trouvés seuls à manifester, sur l’avenue Habib Bourguiba (centre de Tunis) sans appui populaire visible. La défiance de la population vis-à-vis des partis est édifiante. Et pour cause, les préoccupations de ces partis sont loin d’être celles des Tunisiens.

Ainsi, le mot d’ordre de la principale manifestation, organisée par le parti islamiste Ennahdha et son parechoc, le Front de salut national (FSN), était la dénonciation du “coup d’État” mené par le chef de l’Etat le 25 juillet 2021.

D’autres manifestants se réclamant de partis progressistes et centristes sont venus protester, mollement, contre la dégradation de leurs conditions socio-économiques.

L’échec de cette manifestation sur laquelle l’opposition avait beaucoup misé pour renverser le rapport de force et gagner en popularité n’a pas empêché cette dernière de poursuivre, le lendemain, son combat contre la démocrature de Kaïs Saïed.

Nouvelle tactique : exagérer les contreperformances officielles

Exagérer la tactique suivie consiste à s’attribuer des victoires fictives et à exploiter, à cette fin, les contreperformances de la feuille de route tracée par le chef de l’Etat : consultation populaire, adoption d’une nouvelle Constitution et élections législatives du 17 décembre 2022.

Ainsi, des dirigeants du FSN, appendice du parti Ennahdha, n’ont pas hésité à déclarer, à gorge déployée et sans aucune gêne sur les plateaux audiovisuels, que les 90% des Tunisiens qui se sont abstenus lors des récentes législatives, soit plus de 7 millions d’électeurs tunisiens, sont tout simplement leurs adhérents qui ont refusé d’aller voter. « Ce sont nos enfants », a-t-on martelé sur les plateaux.

Bien évidemment, il s’agit d’un mensonge abject lorsqu’on sait que l’abstentionnisme aux élections en Tunisie est un phénomène structurel. Son taux a toujours varié entre 50 et 60%. C’est aussi une fake news lorsqu’on sait que le nombre d’adhérents du parti intégriste Ennahdha et ses dérivés n’a jamais dépassé les 500 000. En référence aux dernières élections générales de 2019, ils étaient au nombre de 450 000.

La gauche affabule à son tour

La gauche tunisienne, à défaut de popularité et d‘enracinement fort dans la société, est elle aussi tombée dans l’affabulation.

Pour ne citer que le cas le plus récent, les divagations d’Aymen Alaoui, dirigeant du Parti unifié des patriotes démocrates (El Wated), un parti qui a accepté de se faire petit, voire de se terrer carrément depuis les élections générales de 2019.

Invité vendredi 20 janvier 2023 par la chaîne privée Attessaa, ce dirigeant a été interpellé sur l’absence d’activité d’El Wated. Dans sa réponse, Aymen Alaoui a prétendu que son parti a toujours défendu les milliers de jeunes indignés qui manifestent, depuis quelques temps, dans les quartiers populaires, tout autant que les Tunisiens qui descendent dans la rue pour protester contre la pollution urbaine et industrielle.

Seulement sur le terrain, et de mémoire de journaliste, nous n’avons jamais vu des dirigeants d’El Wated parrainer officiellement les mouvements des jeunes dans les quartiers populaires ou se déplacer à Sfax, à Gafsa et à Gabès pour soutenir les victimes de la pollution industrielle générée par l’extraction du phosphate et sa transformation.  Cela pour dire qu’à défaut d’imagination et innovation et de remise en cause, la gauche tunisienne est en train de signer sonner son glas.

Quand le PDL rejoint Ennahdha

Et pour ne rien oublier, la récente manifestation des troupes du Parti destourien libre (PDL) devant les locaux des institutions de l’Organisation des Nations unies (ONU). Sa présidente, Abir Moussi, a appelé l’ONU à se désolidariser de Kaïs Saïed et à ne pas « reconnaître » le processus électoral courant en Tunisie qui, selon elle, a été boycotté par la majorité des électeurs.

Plus grave, le parti de Abir Moussi a également exigé des Nations unies d’appeler ses États-membres à mettre un terme au financement indirect de l’activité politique « sous prétexte d’accompagner la transition démocratique » pour contrôler la scène politique du pays.

Au regard de ses appels, le PDL rejoint ainsi Ennahdha et ses relais à l’étranger quand ils avaient demandé aux Etats-Unis de mettre la pression sur le FMI pour qu’il n’accorde pas au gouvernement de Kaïs Saïed des facilités de paiement vitales pour le pays.

Tout donne l’impression que la haine contre le président Kaïs Saïed a non seulement uni ses opposants mais surtout les a aveuglés au point d’occulter les véritables préoccupations des Tunisiens et leur besoin urgent de bénéficier de l’aide internationale pour réussir leur transition politique et économique.

Conséquence : nous sommes en droit de penser que cette opposition est en pleine incohérence et dérision. Elle a l’air de prendre ses hallucinations pour des réalités.