Gisèle Halimi, célèbre avocate, écrivaine et politicienne franco-tunisienne connue pour son combat et sa défense des droits des femmes et des oppressés, est décédée mardi 28 juillet 2020 à Paris au lendemain de ses 93 printemps.

De son vrai nom Zeiza Gisèle Taieb, cette native du 27 juillet 1927 est issue d’une famille de confession juive du quartier de La Goulette, en banlieue de Tunis. Le combat de cette avocate est reconnu à Paris comme à Tunis ou même à Alger où elle avait défendu les droits des militants pour l’indépendance.

Après avoir eu son baccalauréat à Tunis, Gisèle Halimi avait fait ses études supérieures en France où elle a eu une licence en droit et en philosophie à l’université Panthéon Sorbonne et à l’Institut d’études politiques à Paris.

De retour à Tunis, en 1949, elle avait rejoint le barreau et commencé à plaider dans des affaires de défense des syndicalistes et militants pour l’indépendance de la Tunisie. Quelques années plus tard, elle rentre à Paris pour entamer, en 1956, une carrière d’avocate engagée dans la défense de plusieurs causes.

La libéralisation de l’avortement et la criminalisation du viol étaient au cœur des causes féministes qu’elle défendait, un combat mené aux côtés de ses contemporains du milieu littéraire et plastique, comme Simone de Beauvoir, Jean Paul Sartre ou Pablo Picasso.

Le féminisme était son cheval de bataille dans une société dominée par les hommes, une réalité dont elle a pris conscience dès son plus jeune âge. Halimi, un nom qu’elle gardait de son premier mariage, est parti laissant un long parcours pour les valeurs universelles consacrant les droits des femmes.

Celle qui a toujours plaidé pour la cause féministe n’a pourtant pas eu de filles. Selon différentes sources, après deux mariages durant lesquels elle avait eu trois garçons, toute sa passion, elle l’avait transmise à sa petite fille qu’elle évoque dans son livre autobiographique ” Histoire d’une passion ” (2011).

Parmi ses multiples ouvrages, “La cause des femmes” (1973), “Le lait de l’Oranger” (1988), “La nouvelle cause des femmes” (1997), ” Fritna ” (1999), “La Kahena” (2006), “Ne Résignez jamais” (2009), et ” Une farouche liberté “, écrit avec Annick Cojean (2020).

Elle est partie deux mois après la mort de son compatriote Albert Memmi (1920-2020) décédé le 22 mai dernier à Paris à l’âge de 99 ans. Ce romancier, essayiste et penseur franco-tunisien, lui aussi, était un natif du quartier juif el Hara au Centre-ville de Tunis. Les deux écrivains avaient en commun d’être nés à Tunis où ils ont commencé leurs carrières respectives avant de partir en France, pays qui les a accueilli jusqu’à leur décès.

A l’annonce de sa mort, Raja Ben Slama, directrice générale de la Bibliothèque nationale de Tunisie (BNT), a dit “avoir voulu l’inviter une première fois il y a deux ans, une invitation qu’elle avait acceptée mais qui n’a finalement pas eu lieu”.

Dans un post en arabe publié mardi 28 juillet sur la page Facebook de la BNT, Ben Slama écrit: “après un second contact avec elle, au début de cette année, l’écrivaine devait venir en Tunisie pour donner une conférence dans le cadre d’un partenariat entre la BNT et l’ambassade de France en Tunisie”.

Le début de la pandémie avait empêché la tenue de ce rendez-vous. Encore une fois, la mort était plus rapide que la venue de celle dont le combat féministe avait commencé alors qu’elle avait à peine 10 ans, lit-on encore. “Enfant, comme beaucoup d’entre nous, elle était confrontée à la discrimination, entre filles et garçons, dans l’exécution des tâches ménagères. Et la petite fille née dans une famille modeste, a grandi pour devenir avocate”.

Ben Slama revient sur le parcours d’une femme qui “tout comme Albert Memmi, avait quitté la Tunisie pour l’autre côte de la Méditerranée où elle était naturalisée française sans pour autant délaisser sa nationalité. Elle admire “son parcours qui était une épopée de combat en faveur des femmes et de toutes les causes justes dont la cause palestinienne”.

Elle indique aussi que la plupart de ses ouvrages sont disponible à la BNT. “Ses textes originaux et créatifs n’ont pourtant pas pu bénéficier de tout l’intérêt qu’on leur doit en matière de lecture, d’étude, d’éducation ou de traduction que se soit en Tunisie, au Maghreb et en région arabe en général”, continue l’écrivaine et dirigeante d’une institution qui a toujours été derrière les plus grands hommages rendus aux personnalités tunisiennes du milieu littéraire.