«Il n’y aura pas de saison touristique cette année». C’est ce qu’a décidé le Conseil national de la Fédération tunisienne de l’hôtellerie (FTH).

L’instance représentative des hôteliers a pris cette décision deux jours après que le ministère du Tourisme a annoncé, vendredi 12 juin 2020, les nouvelles mesures d’accès aux frontières. Mesures que la FTH trouve excessives et inadaptées.

En effet, le communiqué du Conseil national de la FTH, tout en déclarant «comprendre les contraintes sanitaires auxquelles la Tunisie fait face», estime que «l’imposition d’un test PCR et autres obligations (conditions de transport et de séjour) à l’inverse des destinations touristiques concurrentes est une contrainte certaine et dissuasive à l’accès à notre destination». Et affirme qu’en conséquence, «nous avons enregistré des annulations massives de réservations qui étaient enregistrées pour les mois de juillet et août 2020 entraînant ainsi l’annulation de programmations aériennes».

Chantage au gouvernement ?

Aussi, les hôteliers recommandent «au gouvernement de faire évoluer rapidement ces mesures ou de prendre la décision courageuse de fermer les frontières aux touristes. Ces demi-mesures ne feront pas de la Tunisie une destination touristique cette année».

Mais alors que le Conseil national de la FTH indique que «dans les conditions actuelles une grande partie des hôtels demeureront fermés», le président de cette instance, Khaled Fakhfakh, est allé plus loin. En effet, il a déclaré le même jour de la publication du communiqué qu’«il n’y aura pas de saison touristique en Tunisie cette année».

Pourquoi une décision aussi extrême qui peut être perçue comme du chantage fait au gouvernement ? N’aurait-il pas moyen de sauver ne serait-ce qu’en partie les meubles grâce au tourisme intérieur ?

Le président de la FTH n’est pas de cet avis. Pour lui, “le marché local demeure très insuffisant pour sauver la saison”. Un marché local qui, d’après lui, ne pèserait que 20% de l’activité du secteur.

Khaled Fakhfakh a-t-il raison de défendre ce point de vue ? Ce choix est-il judicieux et justifié ? La réponse est non si on observe ce qui se passe ailleurs.

Les exemples italien, français, espagnol…

Alors que les hôteliers tunisiens s’entêtent à négliger le tourisme intérieur, d’autres pays, et non des moindres, en font le moteur principal de leur industrie touristique. C’est le cas de l’Italie et de la France (premier touristique au monde en termes de nombre de touristiques), où le nombre de touristes locaux est plus élevé que celui des étrangers. Dans ce dernier pays, la consommation touristique intérieure a généré plus de 107 milliards d’euros en 2019, contre seulement 66 milliards pour les touristes étrangers.

En outre, ces deux pays, en plus de l’Espagne, ont décidé de miser sur le tourisme intérieur comme solution à la baisse du flux étranger en raison de la crise du coronavirus.

… et marocain

Plus près de nous, le Maroc, où le tourisme intérieur pèse déjà 30% de l’activité touristique, a fait le même choix. Et depuis assez longtemps.

En effet, dès début mai 2020, le directeur de la stratégie et de la coopération au ministère du Tourisme, Tarik Sadik, déclarait que «nous étudions plusieurs scénarios où le tourisme domestique occupera une place essentielle», que «durant la période de crise qui va durer, il va représenter 100% pendant au moins quelques mois». Car, estime-t-il, «même après la réouverture des frontières, les touristes seront effrayés à l’idée de monter dans l’espace confiné d’un avion…».

M.M.