Il existe bien un paradoxe marchand, chez nous. Qu’est-ce qui fait que les prix sont le plus souvent à la hausse quand bien même la demande ralentit ? Mystère !

Le choix du titre est à contre-courant. Nous l’avons fait à dessein. Nous prenons soin de ne pas choquer nos lecteurs, en tempérant ce billet dominical. On ne veut pas mettre le feu à l’esprit des lecteurs, mais c’est bien de cela qu’il s’agit.

Le juste titre serait la flambée des prix. Et celle-ci consume nos bourses et carbonise notre pouvoir d’achat. Et on ne voit encore à ce jour aucune parade ignifuge qui nous protègerait. Le phénomène, envers et contre tout, continue de se propager.

La valse des étiquettes

En réalité, le phénomène n’est pas nouveau. Les prix, sous notre ciel, ont toujours dansé plus vite que la musique. Cela fait que la valse des étiquettes nous fait tourner la tête, en permanence. Et, au passage, elle siphonne nos portefeuilles.

En vérité, on est plus détenteur, en ces temps difficiles, de porte-monnaie. Le marché fou nous a toujours pris en otage. Ceci vaut en temps ordinaire. Mais en temps de confinement, nos boussoles se retrouvent déréglées. La demande a chuté et, malgré cela, les prix lui font un insolent pied de nez. Et c’est encore plus rageant, en temps d’abondance. On annonce une récolte record de la fraise. En bout de course, le prix monte en flèche. A l’étalage, là où je vais, il est autour de six dinars. Et les marchands le conditionnent en barquette, voisine du kilo, empêchant d’acheter au détail.

Pareil pour la pomme. Cela se vérifie, une fois encore avec la banane flambée, alors qu’en bonne logique, en confinement on s’attendrait à une “banana-split”. Rien de tout cela ! Payez et partez, il n’y a rien à comprendre.

L’inélasticité du marché est incompréhensible. Les prix sont ceux que l’on voudrait qu’ils soient. Ainsi soient-ils !

Le comportement irrationnel du consommateur local 

Ne cherchez pas à comprendre, cet exercice n’est pas fait pour ça. Cependant, le consommateur local a des poussées de fièvre acheteuse qui sont parfois déconcertantes.

Tenez, au mois de Ramadan, dans sa définition, mois de l’abstinence. He bien ! les Tunisiens en font une parenthèse rabelaisienne. On peut leur pardonner ce petit grain de folie, portés qu’ils sont sur la bonne chère. Ailleurs on fait pareil.

Observez, à titre d’exemple, la surexcitation acheteuse des fêtes de fin d’année. Mais cela dure le temps de deux réveillons. Chez nous c’est carton plein. Tel est l’art de vivre à la tunisienne. Et ce n’est pas près de changer.

Relevons tout de même que c’est découplé de la réalité. A titre d’exemple en France, lors du déconfinement, l’épargne a augmenté. En dépit de la réduction des salaires, du fait du chômage partiel, les Français se sont tournés vers le bas de laine. L’épargne des particuliers aurait augmenté de prés de 60 milliards d’euros. Chez nous on ne lève pas le pied, possédés que nous sommes par la surconsommation. Et la fièvre n’en baisse pas.

Epicurien de nature ou de culture, allez savoir, le consommateur local s’obstine à mettre le feu à son portefeuille. Quitte à s’en brûler les doigts, en retour. Mais ce n’est pas pour autant qu’il faut lui griller tous ses billets. Les mercuriales nous disent que non, et pourtant les étiquettes chez les marchands de légumes et autres primeurs, on tombe sur une autre réalité. 

Un paradoxe marchand, bien de chez nous

Mais où est donc l’INC (Institut national de la consommtion), on la cherche de partout? Je suis familier de ses SMS récurrents en temps ordinaires. Voilà qu’il s’est éclipsé. Ses textos me manquent, personnellement. Ses messages nous alertaient sur toutes sortes de dépassement afin d’éduquer notre sens de l’achat. L’alerte sur la consommation abusive de pain, était alarmiste. Il s’ensuit un gaspillage regrettable. Et cela donne à réfléchir.

La communication de l’INC interpelle notre conscience et nous conduirait à réfléchir sur la manière de gérer notre portefeuille. C’est bien cela, en bout de course, l’acte de consommation.

Il semble que la gestion du revenu du ménage ait été, selon les anciens et les économistes, à l’origine de la théorie de rationalisation des choix budgétaires. Cette thèse s’accompagne d’une consigne ultra rigoureuse, qui consiste à raisonner sous contrainte. Et c’est peut-être ce qui fait sauter les plombs au consommateur local.

Mis sous tension permanente, celui-ci disjoncte, immanquablement. Et consomme à tort, quand il n’est pas bien drivé. Mais il manque un élément au puzzle. On essaie de le téléguider pour consommer, “malin”.

Mais comment le protéger ? Et c’est bien là la question qui fâche.

Réactiver le recours au boycott ?

Il existe bien des organisations de défense du consommateur. Elles s’activent. Elles font ce qu’elles peuvent. Elles font la politique de leurs moyens. Il faut bien les doter, leur donner une force de frappe, pour qu’elles aient de l’efficacité. On s’attend à ce qu’elles ruent dans les brancards.

Les bonnes gens ont besoin de spectacles et d’actes spectaculaires. Et quand ça ne vient pas, ils se lancent eux-mêmes dans l’arène. C’est un peu ce qui est arrivé, il y a quelques mois quand il y a eu un appel sur les réseaux sociaux.

L’observatoire citoyen, ça existe. Et on a pu casser les prix de plusieurs produits. Des plus chics aux plus basiques. On a ramené les prix de la pomme de terre à la raison. Pareil pour les fruits exotiques. Cela n’a tenu qu’un temps. Et pourtant, il faut que ça dure.

On sait ce qui reste à faire. On a la recette et on l’a éprouvée. Allez, bon dimanche.

Ali Abdessalam