Au moment où les grands pays industriels affectés par la pandémie du coronavirus tels que la Chine, l’Allemagne, la France, l’Italie et les Etats-Unis mettent les grands moyens pour atténuer, à coût de centaines de milliards de dollars et de taux d’intérêt quasiment nuls, les préjudices économiques subis ou que pourraient subir leurs entreprises par l’effet du Covid-19, la Tunisie traîne encore du pied.

Pour sauver la face, le gouvernement s’est contenté de prendre, le 16 mars 2020, une mesurette sans lendemain. Il s’agit de la création d’une cellule d’écoute mixte entre le ministère des Finances et la centrale patronale (UTICA) pour appuyer les entreprises en difficulté.

Officiellement, cette cellule est impartie d’une mission vague et imprécise. Ainsi, elle aura à organiser des réunions aux fins de présenter des solutions urgentes aux problèmes entravant l’activité des sociétés dans les différents secteurs, fixer les grandes orientations au niveau de l’incitation à l’investissement, l’amélioration du climat d’affaires, et la facilitation des mesures dans les domaines fiscal et douanier et présenter les recommandations pour développer les mécanismes de financement de l’investissement.

Il s’agit pour la plupart de réformes sur le long terme alors que les solutions urgent pour que les entreprises affectées par les conséquences du coronavirus maintiennent une activité minimale et évitent le débauchage de leurs personnels et la perte de leurs clients.

Actionner des mécanismes à même de sauver les PME

C’est qu’au stade actuel où en est le Covid-19, le moment n’est plus à l’écoute des doléances mais à l’action. Car, si rien n’est fait, aujourd’hui, le risque que le pays court c’est de voir, après la maîtrise du virus et son éradication, un grand nombre de ces entreprises disparaître car elles n’ont pas été soutenues à temps.

Pourtant à regarder de près la situation des entreprises impactées et tout en prenant en considération les difficultés dans lesquelles se débattent, actuellement, les finances publiques tunisiennes, le gouvernement dispose de plusieurs marges de manœuvre pour venir en aide à ces entreprises.

Il peut,  à ce propos, actionner, à court terme et en toute urgence,  d’autres dispositifs plus significatifs pour les entreprises impactées par le Covid-19. Ces dernières étant celles qui opèrent, particulièrement, dans le tourisme, le transport, l’artisanat, l’industrie exportatrice, l’enseignement privé…

Au nombre de ces dispositifs, figurent l’application de la bonification de 3 points du TMM instituée au mois d’avril 2019 et jusque là non encore mis en œuvre, le report de certaines échéances fiscales et sociales (cotisations aux caisses de sécurité sociale…), le rééchelonnement des dettes bancaires, l’ajournement des factures d’électricité et d’eau, la réduction du TMM…

Parallèlement à ces dispositifs à la portée des tunisiens, la Banque Mondiale qui a programmé d’importants fonds  pour aider les gouvernements qui le demandent à faire face au Covid-19, a prévu d’autres mesures. Ces dernières doivent être prises, selon la Banque,  en urgence et cibler des investissements prioritaires dans les services publics et privés prioritaires.

Les mesures d’urgence de la Banque mondiale

Dans un article paru le 9 mars 2020, Ceyla Pazarbasioglu, vice-présidente pour le pôle Croissance équitable, Finance et Institutions (EFI), Groupe de la Banque mondiale, a énuméré les quatre actions prioritaires que ces pays doivent entreprendre.

La première consiste « à accroître les dépenses de santé  : dans de nombreux cas, les systèmes de santé publique sont insuffisants, ce qui expose les habitants à une propagation rapide de l’épidémie. Les gouvernements doivent augmenter leurs investissements pour renforcer ces systèmes et favoriser ainsi une prise en charge et un confinement plus rapides ».

La deuxième vise à « renforcer la protection sociale : des transferts monétaires et des services médicaux gratuits pour les plus vulnérables contribueraient à contenir l’épidémie tout en atténuant ses conséquences financières négatives ».

La troisième tend à « soutenir le secteur privé : aucune entreprise ne sera vraisemblablement épargnée, d’où l’importance d’organiser des prêts à court terme, prévoir des exemptions fiscales ou octroyer des subventions ».

La quatrième et dernière mesure aura pour objectif de «contrer les perturbations sur les marchés financiers : les banques centrales des pays en développement — et en particulier ceux sensibles à des poussées d’aversion pour le risque — doivent se tenir prêtes à intervenir en cas de mouvements désordonnés sur les marchés financiers, par exemple en abaissant leurs taux d’intérêt ou en injectant des liquidités pour restaurer la stabilité financière et stimuler la croissance ».

Pour les bailleurs de fonds, l’essentiel c’est d’éviter le protectionnisme

Au cas où la crise perdure, il faudrait négocier, sur le moyen et le long terme, auprès des bailleurs de fonds de nouvelles lignes de crédit en faveur des PME et du secteur privé en général. Ces mêmes bailleurs de fonds (Banque mondiale, FMI) qui ont fait état de leur disposition à venir en aide aux pays en développement.

Tout ce qu’ils posent comme conditionnalité pour décaisser les montants demandés c’est que « les gouvernements doivent se garder de toute tentation protectionniste, qui ne fera qu’exacerber les perturbations dans les chaînes de valeur mondiales et accentuer une incertitude déjà grande. Surtout, ils doivent éviter de restreindre les exportations de denrées alimentaires et de produits médicaux vitaux pour, au contraire, rechercher ensemble des solutions visant à accroître la production et la satisfaction des besoins là où ils sont les plus critiques », lit-on dans l’article de Ceyla Pazarbasioglu.

Le message est on ne peut plus clair. Les bailleurs de fonds ne veulent pas entendre de démondilisation des échanges.