En cette période d’extrême précarité, des centaines de milliers de tunisiens peuvent respirer et trouver une relative sérénité pour peu que trois initiatives soient valorisées et appliquées en urgence. Il s’agit de deux projets de loi, l’un traitant du statut de l’autoentrepreneur tandis que l’autre porte sur la systématisation de l’économie solidaire. La troisième initiative concerne une micro-assurance innovante dédiée aux travailleuses rurales.

Les trois réformes présentent l’avantage d’être concoctées en partenariat entre la société civile et le gouvernement, de responsabiliser les citoyens et de mettre fin à l’assistanat de l’Etat. Gros plan sur ces réformes.

La première initiative concerne un projet de loi sur le statut de l’auto entrepreneur. Ce projet, qui moisit, depuis des mois, dans les tiroirs de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) est une réponse à l’informel. Il s’agit d’un cadre législatif inclusif dédié à environ 1,4 million de travailleurs informels dont 40% travaillent pour leur compte propre.

Le statut de l’autoentrepreneur, proposé par la société civile en partenariat avec le ministère de l’emploi et de la formation professionnelle comme une réelle alternative pour le secteur informel.

Ce secteur présente un manque à gagner pour l’Etat estimé à 2 millions de dinars. A travers ce projet de loi on s’attend à intégrer 10% des activités informelles dans le secteur formel. Il s’agit d’un régime simplifié et libéral visant à encourager les entrepreneurs individuels à lancer leurs affaires en toute légalité en simplifiant les procédures fiscales et sociales et en réduisant les démarches administratives.

Combattre l’informel

Objectifs : lutter contre un chômage endémique, combattre une économie informelle en fraude du fisc et remédier à l’insuffisance frappante au niveau de la création d’entreprises.

Concrètement, grâce à ce projet de loi, tout tunisien, sans exceptions, peut devenir autoentrepreneur. Ils peuvent l’être à titre principal comme le cas des étudiants ou les chômeurs qui créent une activité ou à titre complémentaire pour les salariés les fonctionnaires et les retraités du secteur privé, un fonctionnaire…

Le cumul du statut de l’autoentrepreneur avec celui de salarié pourrait être un des grands avantages de ce nouveau régime.

Au plan macro-économique, la réussite de ce régime permettra de démocratiser les activités entrepreneuriales en réduisant les barrières à l’entrée pour les très petits entrepreneurs.

A la faveur de ce nouveau statut, la communauté des travailleurs informels, qui vit actuellement au quotidien, angoisse et stress, pourrait trouver la sérénité en intégrant dans la légalité la plus totale le circuit formel et contribuer à l’accroissement des recettes fiscales de l’Etat. Et pour cause.

Ce statut a pour finalité de développer via des avantages fiscaux, autoentrepreneuriat. Il permettra de réduire considérablement le taux de chômage grâce à l’auto-emploi, et appuiera la lutte contre la concurrence déloyale générée par l’informel. Une fois le projet adopté et entré en vigueur, il permettra d’intégrer environ 15% de ceux qui exercent actuellement dans le secteur informel, dans le circuit formel lesquels devraient générer d’importantes recettes fiscales pour l’Etat.

Le projet de loi définit l’autoentrepreneur comme toute personne physique résidente en Tunisie exerçant seule, une activité industrielle, commerciale, artisanale, ou de prestation de services, dont le chiffre d’affaires encaissé n’excède pas les 100.000 dinars par an pour les activités industrielles, commerciales et artisanales, et 50.000 dinars, par an pour les prestations de services.

Tout Tunisien peut opter pour le statut d’autoentrepreneur

Toujours selon le texte de ce projet de loi, tout Tunisien qui opte pour le statut d’autoentrepreneur bénéficie de plusieurs avantages : comptabilité simplifiée et réduite au maintien d’un registre recettes/dépenses, dispense de l’obligation d’inscription au registre du commerce et de la publicité au Journal officiel de la République tunisienne, régime fiscal particulier (exonération de la TVA…), affiliation à la sécurité sociale et droit à la retraite, cotisations sociales calculées en fonction du chiffre d’affaires et non des bénéfices…

Point d’orgue de ces avantages, l’autoentrepreneur peut exercer son activité à sa résidence principale laquelle est, selon le projet de loi, insaisissable de droit par les créanciers financiers pour couvrir les dettes dues, éventuellement, à ladite activité.

Et pour ne rien oublier, le formalisme est allégé non seulement pour la création de l’activité mais pour son arrêt aussi. Une simple demande suffit.

S’inspirer d’expertises étrangères

Pour enrichir le débat sur ce projet de loi, particulièrement, lors de son examen en commission ou en séance plénière au parlement, nous rappelons qu’un pays comme le Gabon où l’informel représente 50% de son économie a recouru à une expertise suédoise pour formaliser ce secteur en fraude du fisc.

Ce pays s’est fait aider, il y a un mois, par la société suédoise Red Flash, entreprise spécialisée dans la digitalisation de micro-taxes, pour collecter les impôts dans le secteur informel et élargir, ainsi l’assiette fiscale.

La solution proposée par Red Flash, consiste en « une solution informatique comprenant l’identification de l’opérateur, la numérisation du fichier et la production d’une carte digitale à code unique que le système enregistre les données.

Cette application, expérimentée au Sénégal, apporte plus de transparence et de lisibilité dans les activités des acteurs. C’est grâce à ces cartes que le fisc arrive à définir quel type de taxe prélever et quel type d’activité le commerçant exerce.

A bon entendeur.

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