Non. L’UTICA n’a pas du tout apprécié les menaces brandies par la centrale ouvrière quant à la possibilité de décréter une grève dans le secteur agroalimentaire à cause de la non adoption de certains avenants relatifs à l’augmentation des salaires dans certains secteurs. Le patronat estime avoir été assez conciliant dans sa quête d’une stabilité sociale fragile depuis des années.

Les grèves à répétition dont beaucoup étaient sauvages ont mis à mal le tissu entrepreneurial national et ont été la cause de la fermeture de centaines d’entreprises et du départ de centaines d’autres.

Les agents, les ouvriers et les structures syndicales des secteurs du lait et de ses dérivés, des boulangeries, de la pâte alimentaire, du café, du couscous, des conserves et des semi-conserves alimentaires ont décrété une grève sur tout le territoire nationale mardi 2 avril. Une grève justifiée par la situation de vulnérabilité dont souffrent les travailleurs de ce secteur et le refus du patronat de signer les avenants régulateurs relatifs à la majoration salariale des travailleurs dans certaines activités de l’agroalimentaire.

L’UTICA affirme, pour sa part, que sur les 40 conventions sectorielles, 31 ont été signées, alors que le reste est toujours à l’étude.

Nombreuses sont les activités liées au secteur agroalimentaire en crise à cause des réglementations en vigueur, de la tarification et au Fonds général de l’indemnisation des produits compensés.

L’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat rappelle, à ce propos, que sa position était claire, depuis la signature de l’accord-cadre relatif à l’augmentation des salaires dans le secteur privé, le 19 septembre 2018. Il était alors question de prendre en considération la situation critique des secteurs concernés. En premier, remettre sur pied ces entreprises, juguler leurs pertes, préserver leurs équilibres financiers et prendre en compte les coûts et frais d’exploitation.

Précisons à ce propos que les entreprises du secteur agroalimentaire sont constituées, en grande majorité, de petites et moyennes entreprises réparties sur tout le territoire national et concentrées au niveau du littoral pour des raisons de proximité avec les grands centres de consommation.

L’UTICA affirme vouloir éclairer l’opinion publique sur la situation critique du secteur agroalimentaire à cause de la hausse du prix de revient et de l’absence de stratégies claires œuvrant pour sa pérennisation et son développement, et ce partant de la production agricole à la collecte des denrées et des aliments, en passant par la fabrication, le stockage et la distribution.

Et bien que cette chaîne de valeurs représente une garantie pour la sécurité alimentaire de la population, les entreprises dans ces secteurs sont marginalisées, non organisées et menacées de faillite. Les seuls gagnants sont les spéculateurs et les intermédiaires corrompus qui progressent aux dépens des agriculteurs, des industriels et des commerçants, d’où l’importance des réformes sectorielles.

L’UTICA renvoie aux cris d’alarme lancés par les acteurs du secteur agroalimentaires dans toutes ses composantes ainsi que les nombreux séminaires, journées d’étude et autres correspondances (des centaines) avec les instances concernées, réclamant la sauvegarde des mécanismes de production de céréales, de lait, d’huile, de volaille et de viande rouge. Appels ignorés par les autorités de tutelle et ceux qui gèrent les circuits de production, de distribution et de régulation dont le seul souci est d’assurer la disponibilité des produits à des coûts très bas, ce qui engendre des pertes substantielles aux producteurs et est à l’origine de leur incapacité à respecter leurs engagements.

Le patronat rappelle que les réformes sectorielles concernent les secteurs des stations-services et de transport de marchandises en attente de l’achèvement des mesures coercitives en direction du commerce parallèle et l’adoption de tarifs permettant d’assurer la couverture des coûts par les opérateurs. Lesquels opérateurs, créent de l’emploi, travaillent dans la légalité et s’acquittent des impôts et de la CNSS.

La centrale patronale tient à préciser que les problèmes des secteurs productifs ne doivent pas être un motif de désaccord entre les partenaires sociaux, qui doivent, tout au contraire, se consulter, négocier et entreprendre un dialogue franc et transparent touchant les dimensions économiques et sociales des activités dans le secteur agroalimentaire, y compris les prix et les politiques tarifaires.

«La grève n’est pas la meilleure manière de traiter la crise de l’appareil productif, même si elle est un droit que nous respectons dès lors qu’elle est exercée dans le respect de la loi sans entraver le droit au travail et recourir à la violence».

Cependant, un patronat qui n’arrête pas de rappeler le droit à la grève, cela n’existe qu’en Tunisie post-révolutionnaire et «démocratique». Si ce n’est pas caresser l’UGTT dans le sens du poil !

A lire et relire le communiqué, on a l’impression que l’argumentaire n’est pas autant une prise de position critique de la posture de l’UGTT tenant à faire grève contre vents et marées qu’une prière adressée à la centrale ouvrière pour calmer le jeu en prenant pour témoin le large public. La vindicte patronale a touché plus le gouvernement !

L’UTICA donne de plus en plus le sentiment qu’elle a plus peur de l’UGTT que de tous les organes de l’Etat réunis, ce qui met à mal l’équilibre des forces entre partenaires sociaux censés être égaux en importance et en poids !

Fausse impression ?

A.B.A