“Près de huit Tunisiens sur dix (79%) estiment que le pays est sur la mauvaise voie, et 72% qualifient la situation économique de mauvaise ou de très mauvaise”, a souligné, lundi 3 septembre, Youssef Meddeb, fondateur et directeur général de l’Institut de sondage One to One for Research and Polling.

Présentant les résultats de la troisième vague de l’Afrobaromètre sur la démocratie et la gouvernance en Tunisie, il a précisé que le sondage a été effectué entre le 1er avril et le 5 mai 2018 sur un échantillon représentatif de la population composé de 1.200 personnes, âgées de 18 ans et plus. Ces individus sont issus des milieux urbain et rural des 24 gouvernorats du pays.

Comparativement aux vagues de l’Afrobaromètre réalisées sur la Tunisie en 2013 et 2015, Meddeb souligne que le soutien populaire au système démocratique a nettement baissé, puisqu’il est passé de 71% en 2013 à seulement 46% en 2018.

Les résultats du sondage montrent que 62% des Tunisiens estiment que la Tunisie n’est pas un pays démocratique ou du moins le pays connaît des difficultés cruciales. 29% des interviewés ont classé la Tunisie comme un pays non démocratique alors que ce taux était de 14% en 2015.

Renversement de la situation…

En 2013, 71% des Tunisiens préféraient la démocratie comme “système de gouvernance” et 78% rejetaient “le régime de la dictature”. En 2018, ces taux sont passés successivement à 46% et 51%.

Près de 51% des individus sondés se sont dits insatisfaits du processus démocratique en Tunisie mais 64% soutiennent toujours l’option électorale pour le choix de leurs dirigeants.

Toutefois, les résultats ont montré que 57% des citoyens n’étaient pas intéressés par les élections municipales et 84% n’avaient aucune information à propos de cette échéance.

L’ISIE n’a plus la cote auprès des Tunisiens

Les mêmes résultats ont révélé une baisse de confiance en l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) puisqu’en 2015, trois personnes sur dix ont déclaré avoir totalement confiance en l’ISIE alors qu’en 2018 ce taux est de 16%.

Le sentiment des libertés individuelles gagne du terrain

S’agissant de la perception du niveau des libertés, entre 45% et 55% des Tunisiens estiment qu’il y a une amélioration à tous les niveaux (pluralisme politique (55%), liberté de la presse et critique du gouvernement (50%), libre opinion politique (47%), liberté d’adhésion aux mouvements politiques 45%).

Près du tiers des Tunisiens approuvent le lien religion-politique

Pour ce qui est du rapport de la religion avec la politique, les résultats du sondage ont montré que 29% des Tunisiens approuvent l’idée que le régime de gouvernance soit inspiré de l’islam, 26% trouvent qu’il serait préférable que les hommes religieux puissent occuper des postes publics dans l’Etat, 25% considèrent que la démocratie est contradictoire aux principes de l’islam.

22% des interviewés pensent que dans un pays musulman, les non musulmans doivent bénéficier de moins de droits politiques et 54% des Tunisiens préfèrent que le pays soit gouverné par les lois civiles.

Il ressort également du sondage que 58% des Tunisiens soutiennent la redevabilité du gouvernement alors que seulement 41% approuvent le pluralisme politique.

Les trois plaies de la Tunisie…

Evoquant les trois premiers problèmes auxquels est confronté le pays, les personnes interviewées ont cité en premier lieu la gestion de l’économie 58%, le chômage en second lieu 37% et la corruption en troisième lieu 22%.

Selon Youssef Meddeb, l’évaluation négative du rendement du gouvernement persiste notamment dans la résolution des trois principaux problèmes majeurs évoqués (la gestion de la situation économique 68%, la création d’emplois 80% et la lutte contre la corruption 65%).

A noter que l’objectif de l’Afrobaromètre est de donner une voix au citoyen pour qu’il puisse s’exprimer. Les données recueillies sont ensuite soumises aux décideurs pour les aider dans l’élaboration des politiques publiques, ajoute Meddeb.