Elle a de l’ambition. Elle a de la vision… très africaine. Mais surtout, elle possède une audace rare en Tunisie. Elle, c’est la Chambre de commerce et d’industrie de Sfax (CCIS) qui, après avoir intéressé plusieurs structures –publiques et africaines- dans les secteurs du bâtiment et des travaux publics pour son Salon MEDIBAT (qu’on ne présente plus), a décidé d’“africaniser“ celui-ci, au figuré comme au propre.

L’ambition

La direction de la CCIS et la Chambre de commerce, d’industrie, des mines et de l’artisanat du Cameroun (CCIMA), vont organiser, du 17 au 22 avril 2017, le Salon africain du bâtiment et des métiers connexes “AFRIBAT Cameroun 2018“ à Yaoundé. Vous aurez compris, il s’agit de la version africaine du MEDIBAT.

L’événement est d’autant plus important qu’il se déroule dans un pays-carrefour entre l’Afrique de l’Ouest, l’Afrique centrale et l’Afrique australe, avec tout ce que cela pourrait entraîner comme opportunités d’affaires pour les entreprises tunisiennes. Certes, majoritairement le pouvoir d’achat n’est pas très élevé, mais la demande pour certains produits et services tunisiens peut se développer rapidement. Nous avons même des exemples d’entreprises tunisiennes (on ne va pas les citer pour éviter de faire des jaloux) qui réalisent, depuis plus de six ans maintenant plus de 80% de leurs chiffres d’affaires en Afrique subsaharienne.

On peut dire, sans risque de nous tromper, que la Chambre de commerce et d’industrie de Sfax réalise, à travers l’organisation de cette manifestation en dehors des frontières tunisiennes, une ambition nourrie (mais pas très avouée) depuis longtemps.

Une chose est sûre, si côté pouvoir, la Tunisie n’a pas –ou n’avait pas- une politique africaine, c’est loin d’être le cas pour au moins deux chambres de commerce et d’industrie, en l’occurrence celles de Sfax et de Tunis. Dans ces deux institutions, les affaires “économiques” priment.

La vision

La vision de la Chambre découle de son ambition. En fait, nous le savons très bien à force de le côtoyer depuis plusieurs sessions du MEDIBAT, Ridha Fourati, le président de la CCIS, et les cadres de la Chambre ont toujours voulu faire profiter les adhérents de la CCIS –particuliers et entreprises- des opportunités qui existent aussi bien en Tunisie qu’ailleurs, notamment en Afrique –surtout ces dernières années.

Donc, en décidant de “délocaliser“ annuellement le MEDIBAT dans un pays africain (car si tout va bien comme prévu, il y aura une session de MEDIBAT en Tunisie les années impairs, et une session AFRIBAT en Afrique les années pairs), la CCIS compte offrir davantage d’opportunités à ses adhérents. Et c’est bien vu, puisque tous les experts s’accordent aujourd’hui sur un point : la croissance économique mondiale se trouve désormais en Afrique, et pour plusieurs années voire décennies encore.

L’audace     

Il faut bien admettre que dans le subconscient collectif tunisien, faire des affaires en Afrique c’est un exercice risqué, pense-t-on, et ce pour plusieurs raisons, entre autres l’instabilité politique (qui ne favorise pas le déroulement normal des affaires), pas suffisamment de liaisons aériennes entre Tunis et les principales villes africaines, et surtout la concurrence turque, asiatique et autre européenne (avec des entreprises qui disposent des moyens financiers autrement plus importants que ceux des entreprises tunisiennes).

Par conséquent, il a fallu une forte dose d’audace, de perspicacité et de confiance en soi de la part de la direction de la CCIS pour prendre une telle décision. Et nous imaginons… sans aucune aide de nos pouvoirs publics.

Cependant, les entreprises tunisiennes en général doivent suivre la CCIS en Afrique subsaharienne. Surtout que nous croyons savoir qu’AFRIBAT n’est qu’un début, d’autres événements dans d’autres secteurs sont dans le programme de la Chambre. Et ce sera tout bénéfice pour l’économie tunisienne dans son ensemble. Mais il faut avoir de l’ambition, de la vision et des tripes. Mais c’est un risque calculé.

AFRIBAT, l’événement à ne pas rater…

Maintenant un mot sur cette première édition d’AFRIBAT (prévue en avril prochain au Parc des Expositions de Tsinga dans la capitale camerounaise), pour dire que, selon les données qui nous ont été récemment communiquées, 5 grands groupes africains ont déjà confirmé leur participation.

Ensuite, la manifestation est placée sous le patronage du Premier ministre du Cameroun et parrainée par la Confédération permanente des Chambres consulaires africaines et francophones (CPCCAF), ce qui constitue une opportunité supplémentaire d’accéder aux différents marchés africains. Et si vous ajoutez la capacité d’organisation de la CCI de Sfax, vous obtiendrez des résultats à la hauteur des attentes.

En somme, gare aux absents du côté des professionnels tunisiens, dirons-nous, ils risquent, peut-être, de le regretter, car AFRIBAT se veut un espace de rencontres et d’opportunités entre professionnels et experts du BTP venus de nombreux pays européens et africains (on parle de 400 exposantes, 10.000 visiteurs professionnels, et pas moins de 200 rendez-vous d’affaires B2B…).

D’ailleurs, dans plusieurs pays africains, d’importants projets BTP, habitat et autres sont en cours et dont bon nombre seront présentés justement à l’occasion d’AFRIBAT. Des occasions qu’il ne faudrait pas rater.

Tallel BAHOURY