La banque de Grèce lance une alerte au “Grexit” avant un Eurogroupe sans illusion

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à Athènes, le 17 juin 2015 (Photo : Angelos Tzortzinis)

[17/06/2015 16:49:21] Athènes (AFP) La Banque de Grèce a lancé à son tour mercredi une mise en garde alarmiste au gouvernement du pays sur le risque d’une sortie de l’euro, voire de l’UE en cas d’échec des négociations prévues jeudi avec les créanciers sans perspective de dénouement immédiat.

Faute d’accord, le couperet tombera, avertit la Banque de Grèce : “défaut de paiement de la Grèce puis, au bout du compte, sortie du pays de la zone euro et, très probablement, de l’Union européenne”, écrit l’institution dans son rapport annuel, tout en soulignant que “peu de chemin reste à parcourir” vers un compromis.

Syriza, le parti du Premier ministre Alexis Tsipras, a reproché au gouverneur de la banque centrale Yannis Stournaras, ancien ministre des Finances du gouvernement de coalition droite-socialiste d’Antonis Samaras battu en janvier, d’outrepasser ses fonctions par cette intervention à la tonalité très politique.

L’incompréhension mutuelle entre la Grèce et ses créanciers, qui s’est accrue ces derniers jours, rend le scénario d’un accord de dernière minute sur le déblocage d’une tranche de prêts vitale de 7,2 milliards d’euros moins probable qu’un Grexit, une sortie de la Grèce de la zone euro, selon les analystes de Berenberg.

Le Trésor britannique a d’ailleurs indiqué mercredi se préparer à l’éventualité d’un défaut de paiement grec dont le risque va “croissant”.

Une fois n’est pas coutume, c’est du président de la zone euro, Jeroen Dijsselbloem, qu’est venue une incitation à la retenue contre les “conclusions hâtives”.

Il conduira jeudi la reprise du dialogue entre les deux parties lors de la réunion des ministres des Finances à Luxembourg jeudi. Mais le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a confié à des députés avoir peu d’espoir d’un dénouement à cette occasion.

Signe de la faiblesse des attentes, le commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, s’est contenté d’espérer que ce rendez-vous sera “utile”.

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à Athènes, le 26 février 2015 (Photo : Louisa Gouliamaki)

Alexis Tispras sera lui en Russie à partir de jeudi, pour un forum économique à Saint-Petersbourg, et une rencontre avec le président Vladimir Poutine qui sera scrutée avec attention.

Les Etats-Unis ont appelé mardi la Grèce à prendre une “initiative sérieuse” pour trouver un compromis, soulignant les risques que font peser cette “incertitude” sur l’économie mondiale.

Mais M. Tsipras a martelé mercredi que “si l’Europe insiste sur les retraites (l’un des points d’achoppement des négociations, ndlr), elle devra en accepter le prix”.

– Donnant donnant –

Le Premier ministre grec ne cesse d’affirmer sa volonté d’un accord mutuellement bénéfique.

Premier dirigeant d’un pays européen à venir à Athènes depuis l’arrivée au pouvoir du parti de gauche radicale, le chancelier autrichien Werner Faymann a tenté de mettre de l’huile dans les rouages en prônant des solutions “qui n’accroissent pas la pauvreté”.

Dernière occasion pour une solution de dernière minute: le sommet européen prévu fin juin, ou un sommet exceptionnel dans l’intervalle.

Sans le feu vert des créanciers, la Grèce pourrait être dans l’incapacité de rembourser les quelque 1,5 milliard d’euros qu’elle doit au FMI d’ici à la fin juin.

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ènes, le 15 juin 2015 (Photo : Louisa Gouliamaki)

Pour éviter la rupture, la banque centrale grecque appelle les deux camps à faire preuve de souplesse. Elle invite le gouvernement à reconnaître que l’abaissement des objectifs d’excédent primaire (solde du budget avant remboursement de la dette) accepté par l’UE et le FMI lui donne “quelques degrés de liberté supplémentaire dans la conduite de la politique budgétaire”, et demande de l’autre côté aux créanciers de “préciser leur volonté” d’octroyer à la Grèce un allègement de sa dette publique “comme initialement prévu” en 2012.

Si l’effort demandé à Athènes est désormais trois fois moindre, avec un objectif d’excédent primaire — avant paiement de la charge de la dette — revu à 1% du PIB en 2015 contre 3% auparavant, les moyens de réaliser ces économies continuent de diviser la gouvernement grec et les institutions (UE, BCE, FMI) qui lui prêtent de l’argent depuis que le pays a plongé dans la crise fin 2009 en raison d’une dette publique explosive.

La pression venue des rangs de Syriza est également forte: le parlement grec a entendu mercredi les premières conclusions d’une “Commission pour la vérité sur la dette publique” formée en avril.

Selon un de ses membres, la commission estime que “la Grèce ne devrait pas payer sa dette car elle est illégale, illégitime, et odieuse”, et que le pays a été victime “d’une attaque concertée” de ses créanciers pour sauver les banques au détriment des citoyens.

Un rassemblement devant le parlement grec, contre l’intransigeance imputée aux créanciers est prévu en fin de journée.