Ouverture de lignes d’autocars : le secteur prêt à embrayer

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ège du groupe de transport Transdev, le 9 avril 2014 à Issy-les-Moulineaux (Photo : Bertrand Guay)

[13/12/2014 13:51:15] Paris (AFP) L’ouverture à la concurrence de lignes d’autocars nationales, prévue par le projet de loi Macron, aiguise les appétits des transporteurs français et étrangers, qui espèrent tous récupérer une part de ce nouveau marché potentiel, déjà préempté par le géant Transdev.

Il y a ceux qui ne se font pas d’illusion. L’ouverture à la concurrence de lignes nationales, “ce n’est pas fait pour les petits transporteurs”, soupire Laurent Desvenain, gérant de la société d’autocars de tourisme Valois (SATV) à Pignans (Var). Avec 19 véhicules et environ 2 millions d’euros de chiffres d’affaires, “je n’ai pas les moyens de partir à perte”, explique-t-il.

Pas comme Transdev et ses milliers d’autocars, qui a annoncé dès mercredi son intention de lancer “de façon massive” de nouvelles lignes vers une quarantaines de villes françaises si la loi sur la croissance et l’activité, présentée le même jour, est votée début 2015.

“J’ai un coucou, ils ont un Boeing”, résume M. Desvenain, dont l’entreprise est aussi sous-traitante de Transdev pour quatre lignes de transport scolaire dans le Var.

“Seuls ceux qui sont prêts à assumer un ou deux ans de pertes” pourront suivre “les gros, les puissants”, estime Jean-Louis Wahart, directeur général des Cars Périer.

Les 120 véhicules et les 16 millions d’euros de chiffre d’affaires de l’entreprise basée à Lillebonne (Seine-Maritime) ne lui offrent “pas l’assise financière” nécessaire, mais “on peut imaginer de la sous-traitance”, ajoute-t-il.

L’entreprise, qui gère notamment trois lignes régulières déléguées par le conseil général, est déjà “partenaire par la force des choses” avec d’autres transporteurs, dont Transdev.

– “Projets dans les cartons” –

Il y a ceux qui s’organisent pour rivaliser avec la filiale de Veolia et de la Caisse des dépôts. “On est prêt, on y travaille depuis longtemps”, affirme Stéphane Duprey, délégué général de Réunir, réseau de 115 PME françaises du secteur, totalisant plus de 6.000 véhicules et 510 millions d’euros de chiffre d’affaires.

Sous la marque Starshipper, Réunir exploite depuis 2012 une ligne Lyon-Turin avec deux arrêts en Savoie et, depuis cette année, une ligne Lyon-Barcelone desservant trois villes françaises. “On a pas mal de projets dans les cartons”, assure M. Duprey, qui ne veut toutefois “pas faire de concurrence aux donneurs d’ordre” de ses adhérents, notamment aux collectivités locales.

La SNCF, via sa filiale iDBUS lancée en juillet 2012, n’est pas en reste: la compagnie ferroviaire publique n’excluerait pas de muscler son jeu sur le marché, selon des informations du Parisien vendredi.

Les 40 millions d’euros de déficit cumulés à fin 2013 n’ont pas découragé la compagnie ferroviaire, qui défend la “complémentarité” de ses offres. Avec seulement 46 véhicules et moins de 13 millions d’euros de chiffre d’affaires, iDBUS s’est déjà imposé comme un acteur majeur du transport interurbain par autocar.

– “on suit ça de très près” –

Il y a ceux, aussi, qui attendent l’ouverture du marché français pour s’y établir. “Nous étudions les opportunités d’étendre notre réseau et de proposer nos voyages à bas prix à encore plus de personnes en France”, indique le britannique Megabus.

La réforme française “n’a que trop tardé”, considère la filiale du groupe StageCoach, dont les liaisons internationales desservent six villes dans l’Hexagone depuis 2012.

Le suisse CarPostal lorgne, pour sa part, “un marché potentiel sur des distances inférieures à 300 kilomètres, sur lesquelles on aimerait se positionner”, déclare Bruno Leroy, directeur des activités interurbaines de l’entreprise en France.

A travers quatre entités disposant d’environ 400 véhicules, CarPostal gère depuis 2009 des lignes déléguées par des collectivités locales, principalement en Rhône-Alpes et Languedoc-Roussillon. Un temps remisé, le projet de liaison Lyon-Genève de la filiale de La Poste Suisse “pourra peut-être se faire demain”, espère-t-il.

Même le luxembourgeois Flibco, pourtant “pas positionné sur les trajets inter-cités”, admet suivre la situation française “de très près”, selon son directeur, Paul De Muynck.

La société, qui exploite 34 véhicules et réalise un chiffre d’affaires d’environ 20 millions d’euros, a “toujours eu des analyses, des simulations”, mais “pas de plan pour lancer des liaisons ville à ville”, nuance-t-il.

Il y a, enfin, ceux qui assistent sereinement à ces grandes man?uvres. “Nos clients préfèrent partir avec une compagnie qu’ils connaissent”, témoigne Manuel De Andrade, gérant d’Andrade Voyages, qui dessert avec 10 véhicules la péninsule ibérique depuis Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur.

Les voyageurs portugais et espagnols assurent la quasi totalité de son chiffre d?affaires, tout juste supérieur à un million d’euros. Mais “si on a l’autorisation de vendre un Lyon-Toulouse, pourquoi pas ?”.