Nationalisation d’AIG : l’ex-patron de la Fed appelé à la barre

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ésident de la banque centrale américaine (Fed), Ben Bernanke, arrive devant le tribunal fédéral de Washington, le 9 octobre 2014 (Photo : Alex Wong)

[09/10/2014 21:39:33] Washington (AFP) L’ancien président de la banque centrale américaine (Fed), Ben Bernanke, cité jeudi comme témoin devant un tribunal fédéral de Washington, a du justifier la prise de contrôle par l’Etat américain de l’assureur AIG lors de la crise financière en 2008.

Dans ce procès historique intenté contre l’Etat fédéral par l’ex-PDG du groupe d’assurance américain AIG, Maurice Greenberg, M. Bernanke a été soumis au feu des questions de l’avocat des plaignants, David Boies. La comparution d’un ancien président de la Réserve fédérale en tant que témoin devant la justice est un fait extrêmement rare.

“Une faillite d’AIG aurait-elle été catastrophique ?”, a demandé le juriste, un avocat très réputé, qui a notamment conseillé l’ancien candidat à la présidence américaine Al Gore lors de l’élection présidentielle contestée de 2000.

“Oui, Monsieur”, a juste répondu Ben Bernanke, visiblement peu enthousiasmé de déposer devant ce tribunal spécialisé dans les plaintes contre le gouvernement.

Ben Bernanke, qui a quitté la Fed en février dernier, est l’un des trois grands architectes de la réponse apportée par les autorités financières américaines à la débâcle financière de 2008 à être appelé à la barre des témoins.

Le procès en action collective est intenté au départ par Maurice “Hank” Greenberg, 89 ans, qui reproche au gouvernement américain d’avoir spolié les actionnaires d’AIG, dont lui-même, lors du sauvetage de l’assureur pendant la crise des crédits immobiliers à risque “subprimes”. Les plaignants réclament 40 milliards de dollars en réparation de la dépréciation de leurs actions.

Interrogé sur l’intervention de l’Etat dans AIG, M. Bernanke a reconnu que “le mieux aurait été d’avoir seulement une intervention privée”.

“Une combinaison des deux (ndlr: privée et publique) aurait été meilleure que ce que l’on avait”, a-t-il même ajouté.

-Un procès de six semaines-

Il est resté vague sur la question de savoir si l’accord de prise de participation par l’Etat exigeait un vote des actionnaires, qui n’a pas eu lieu: “je ne m’en souviens pas”, a-t-il affirmé. “Je pense que c’était un accord contraignant mais j’ai laissé les détails à l’équipe juridique”, a-t-il encore indiqué d’un ton las.

Avant que Ben Bernanke ne prête serment jeudi, David Boies avait interrogé pendant deux jours et demi Timothy Geithner, l’ancien gouverneur de la Fed de New York devenu en 2009 le secrétaire au Trésor de l’administration Obama. Avant lui, Henry Paulson, le secrétaire au Trésor de l’administration Bush, a également été appelé à la barre. Le procès, qui en est à son neuvième jour, est censé durer au moins six semaines.

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ésident de la banque centrale américaine (Fed), Ben Bernanke, arrive devant le tribunal fédéral de Washington, le 9 octobre 2014 (Photo : Alex Wong)

Timothy Geithner a réaffirmé qu’une faillite de l’assureur aurait provoqué “une panique massive à l’échelle mondiale”.

Répondant souvent par des “je ne sais pas” ou “je ne m’en souviens plus”, il a indiqué que lorsqu’AIG avait demandé l’aide de l’Etat, il y avait pour le gouvernement “des chances raisonnables de récupérer” l’argent public. Selon le Trésor, ce sauvetage s’est finalement soldé par un gain de quelque 23 milliards de dollars pour les pouvoirs publics.

AIG a été sauvé en septembre 2008 par des injections de fonds publics sous forme d’un prêt initial de 85 milliards de dollars, assorti ensuite de garanties et de liquidités qui atteindront finalement 182 milliards de dollars. En échange, l’Etat avait nationalisé le groupe en prenant 79,9% de son capital et réclamé un taux d’intérêt élevé de 13% sur les liquidités prêtées.

Jeudi, le juge Thomas Wheeler a accordé à l’avocat des plaignants une requête-clé portant sur l’accès, au moins partiel, au manuel ultra-secret de la Réserve fédérale, baptisé le “Doomsday book” (Le livre du jugement dernier). Ce document contient un catalogue des mesures exceptionnelles que la banque centrale peut prendre en cas de catastrophe financière. Le juge veut notamment déterminer quelle est l’autorité de la Fed en matière de prise de participation.

“Beaucoup de ce que nous faisions n’était pas dans le manuel”, a prévenu Timothy Geithner. “Nous étions vraiment au-delà des limites de ce qui était connu”.