Tunisie : Le casse-tête des entreprises confisquées

entreprise_confisquee-tunisie.gifTrois
cents millions de dinars. C’est, selon le gouvernement, le montant maximum que
l’Etat puisse espérer tirer de la vente de certaines entreprises confisquées
après le 14 janvier 2011 à des membres de l’entourage de Ben Ali et de Leila
Trabelsi et leurs anciens alliés et affidés.

Cette annonce, faite à l’occasion de la présentation des grandes lignes de la
loi de finances complémentaire 2014, n’a pas été du goût des membres de
l’Assemblée nationale constituante (ANC). Qui l’ont fait savoir de la manière la
plus claire au ministre de l’Economie et des Finances, Hakim Ben Hammouda, lors
de son passage le 9 juillet 2014 devant la Commission des Finances de cette
assemblée pour présenter ce projet de loi.

Les membres de l’ANC espéraient, selon l’un d’entre eux, qu’on «réalise 50 à 60%
du milliard de dinars de recettes de la vente d’entreprises confisquées
initialement annoncé (sous le gouvernement de la Troïka, ndlr)», dans le cadre
du budget de l’Etat pour 2014.

D’où l’accusation que «la Commission de gestion» de ces entreprises «n’a rien
fait en 2014» pour atteindre cet objectif. Et l’exigence de «comprendre ce qui
se passe dans ce dossier» formulée par les représentants du peuple.

Le gouvernement de Mehdi Jomaa ayant été accusé à de multiples reprises par
plusieurs membres de la Commission des finances de l’ANC d’avoir, à l’occasion
de l’élaboration puis de la présentation de la loi de finances complémentaire,
effectué un diagnostic de la situation économique du pays dans lequel «il y a
incrimination des gouvernements précédents», le ministre de l’Economie et des
Finances récuse cette accusation et affirme que l’équipe gouvernementale dont il
fait partie «n’a pas effectué une lecture politique de la situation».

«Depuis la première intervention du chef du gouvernement, nous avons développé
une lecture posée. Nous avons dit que les défis ont commencé en 2011; qu’il
aurait fallu prendre certaines mesures mais qu’elles étaient difficiles à
prendre. De même, certaines décisions, comme la titularisation des ouvriers
intérimaires étaient difficilement évitables. La responsabilité est donc
collective», souligne le ministre de l’Economie et des Finances.


Surestimation des recettes par la Troïka

Et c’est également de manière «posée» que Hakim Ben Hammouda aborde la question
des sociétés confisquées et des recettes que leur vente pourrait rapporter.

Evitant soigneusement de dire –ce qu’on devine néanmoins et que le ministre va
démontrer- que le précédent gouvernement s’est trompé dans l’estimation de ces
recettes, en inscrivant la somme d’un milliard de dinars au budget de l’Etat
pour 2014, Hakim Ben Hammouda a expliqué que «si toutes les opérations» prévues
ou envisagées étaient finalisées, on ne pourrait pas en tirer «plus de 800
millions de dinars». Mais comme de ce montant il faut retrancher les dettes à
rembourser et se situant entre 400 et 500 millions de dinars, le fruit net de
ces opérations s’établirait finalement à 300 millions de dinars.

Néanmoins, l’actuel gouvernement envisage de faire des efforts pour essayer
d’augmenter ces recettes. En effet, la Commission de gestion des sociétés
confisquées, que préside le ministre de l’Economie et des Finances, s’active
déjà afin de sélectionner d’autres entreprises à vendre. Mais quoiqu’il fasse,
le gouvernement ne pourra probablement pas atteindre la barre du milliard
dinars.

Outre que des problèmes juridiques –comme dans le cas d’Orange- ne permettent
pas d’ajouter un grand nombre d’entreprises à la liste de celles dont la cession
est déjà programmée, Hakim Ben Hammouda se soucie de «ne pas noyer le marché
avec la mise en vente de 20 à 30 entreprises, car la liquidité constitue
aujourd’hui un grand problème».