Le sport, nouvelle arme de la guerre du ciel entre la Turquie et le Golfe

photo_1367656962105-1-1.jpg
à une conférence de presse du Borussia Dortmund le 2 mai 2013 (Photo : Patrik Stollarz)

[04/05/2013 08:49:03] ISTANBUL (AFP) La guerre du ciel a désormais gagné les stades. Déterminée à se hisser parmi les plus grandes, la compagnie aérienne Turkish Airlines (THY) défie ses rivales du Golfe sur le terrain du parrainage sportif, à grand renfort de millions de dollars et de champions.

Dans cette bataille de l’image, le transporteur turc a présenté cette semaine son nouveau porte-drapeau. Après les “blaugrana” du FC Barcelone et les “Red Devils” de Manchester United, dont les contrats sont arrivés à terme, THY a décidé de s’afficher avec le Borussia Dortmund, fraîchement qualifié pour la finale de la Ligue des champions.

Pour un prix estimé à plusieurs dizaines de millions d’euros, la compagnie sera pendant trois ans le transporteur du club et prend pied sur le marché allemand, avec ses 3 millions de résidents d’origine ou de nationalité turques et ses nombreux touristes.

Sacrée meilleure compagnie européenne en 2011 et 2012, Turkish Airlines affiche depuis quelques années une santé et des prétentions insolentes.

Elle multiplie les dessertes à tout-va, veut faire passer sa fréquentation de 39 millions de passagers transportés en 2012 à 90 millions à l’horizon 2020 et vient de signer un chèque de 20 milliards de dollars pour doubler la taille de sa flotte en acquérant 117 Airbus A320 et 95 Boeing 737 (options comprises).

photo_1367657107762-1-1.jpg
ère des Lakers de Los Angeles Kobe Bryant, qui a fait de la publicité pour Turkish Airlines, le 25 mars 2013 à Oakland (Photo : Ezra Shaw)

A l’appui de ses grandes ambitions, THY a fait du sport de haut niveau et de ses icônes l’un des vecteurs favoris de sa réputation.

En plus de soutenir des clubs, la compagnie n’hésite pas à enrôler sous sa bannière les plus grands champions. Sa publicité avec la star du basket américain Kobe Bryant et le génie argentin du ballon rond Lionel Messi a fait le tour du monde.

“Nous offrons un très bon produit à nos clients”, explique le président de Turkish Airlines Hamdi Topcu, “pour prolonger la vente de ce bon produit et incarner notre marque, nous faisons appel aux grands noms du sport”.

L’idée n’est pas nouvelle. Avant THY, d’autres compagnies aériennes ont choisi d’asseoir leur notoriété sur un athlète, un club ou une compétition de renom. South African et les compagnies américaines par exemple. Mais ces pionnières ont été aujourd’hui devancées par leurs rivales du Golfe, dopées par leurs pétrodollars.

Retour gagnant

En football, Emirates est ainsi le parrain très en vue du Paris Saint-Germain, d’Arsenal ou du Milan AC. La compagnie émiratie vient aussi de s’engager à financer 15 des 19 Grand-Prix de cinq prochaines saisons de Formule 1.

Son PDG cheikh Ahmad bin Said al-Maktoum a récemment évalué son budget annuel consacré aux sports autour de 227 millions de dollars.

“Le sponsoring sportif est très efficace car le public se souvient mieux du sport que de tout le reste”, constate le responsable médias d’Emirates, Boutros Boutros. “Nous avions besoin de visibilité dans le monde entier (…) ce type de partenariat nous a énormément rapporté”, confirme de son côté le vice-président de Turkish Airlines, Ali Genç.

photo_1367657217352-1-1.jpg
é par Emirates, le 28 avril 2013 à Londres (Photo : Adrian Dennis)

A en croire les spécialistes, la promotion des entreprises par le sport est un pari qui rapporte à tous les coups.

“THY a investi dans son image de marque avec des publicités et des parrainages très accrocheurs, aux dépends de sa rentabilité à court terme”, observe Emre Akcakmak, analyste chez East Capital, “cet investissement a aujourd’hui payé en terme de taux de remplissage des avions, et donc de rentabilité”.

L’âpre compétition que se livrent Turkish Airlines et les compagnies du Golfe pour dominer le ciel d’Orient a donc gagné le sport de haut niveau. La chasse aux noms prestigieux bat son plein. Qatar Airways vient de s’offrir une belle victoire en emportant de haute lutte le droit de poser son nom sur le maillot du “Barça”.

Mais la guerre est loin d’être terminée. “Si Emirates ou Qatar Airways développent leurs partenariats sportifs, il est difficile pour leurs rivales de ne pas suivre”, pronostique Lionel Maltese, professeur de marketing sportif à la Ketge Business School, “elles prendraient le risque de paraître moins attractives”.

Son mariage avec les Allemands de Dortmund à peine annoncé, Turkish Airlines se prépare donc à révéler le nom de la prochaine star débauchée pour sa promotion. Elle vise cette fois sa clientèle haut-de-gamme, ce sera donc un golfeur. “Quelqu’un qui s’est fait un nom dans le monde entier”, lâche avec gourmandise Ali Genç.