Asie : vers une zone de libre-échange malgré les disputes territoriales

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Asean (Photo : Romeo Gacad)

[20/11/2012 12:09:10] PHNOM PENH (AFP) Les Asiatiques, dont la Chine et le Japon, ont lancé mardi les négociations pour créer deux zones de libre-échange, des projets ambitieux en concurrence avec un troisième, promu par Washington, et développés dans un contexte de fortes tensions territoriales.

La Chine et le Japon, deuxième et troisième économies mondiales, ainsi que la Corée du Sud ont donné leur feu vert à des pourparlers début 2013 pour un accord commercial trilatéral.

Dans le même temps, seize pays – dont les trois moteurs de l’économie asiatique – ont donné le coup d’envoi des discussions pour le “partenariat économique intégral régional” (RCEP), potentiellement la plus importante zone de libre-échange au monde, hors l’Organisation mondiale du commerce.

Les perspectives sont séduisantes mais compliquées: de nombreux participants à ces futurs pactes sont impliqués dans des querelles territoriales.

Le Japon et la Chine s’opposent à propos d’un archipel en mer de Chine orientale, tandis que Tokyo et Séoul se disputent des îlots isolés entre leurs deux pays.

Leur projet triangulaire a pourtant de quoi les faire réfléchir: à lui seul, leur accord créerait une zone colossale, avec des échanges commerciaux qui s’élèvent déjà à 514,9 milliards de dollars en 2011, selon Tokyo.

Mais la Chine veut aller plus loin, voyant ce pacte comme un “important moyen pour forger un accord commercial plus large dans la région”.

Quant au RCEP, il comptera un total de 16 pays: les dix de l’Asean (Bruneï, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Birmanie, Philippines, Singapour, Thaïlande et Vietnam), les trois géants asiatiques, ainsi que l’Inde, l’Australie et la Nouvelle-Zélande.

Soit, sur le papier, un marché unique de 3,5 milliards d’habitants au produit intérieur brut de 23.000 milliards de dollars, un tiers du PIB mondial. Et une zone qui réduirait la dépendance des pays membres par rapport aux économies occidentales en crise.

Mais là encore, le politique s’en mêle. Pékin et Hanoï se disputent les Spratleys et les Paracels, archipels supposés être riches en hydrocarbures. Et les Spratleys sont aussi revendiquées notamment par les Philippines.

L’important est “d’essayer d’isoler les deux questions”, a relevé Surin Pitsuwan, secrétaire général de l’Association des nations d’Asie du sud-est (Asean), dont les dix membres font partie du projet de RCEP.

“L’intégration économique devra aller de l’avant (…) parce que tout le monde bénéficiera de cette nouvelle architecture”.

Les analystes espèrent que les différends territoriaux n’entraveront pas les projets commerciaux, voire que ces derniers permettront d’applanir les tensions.

“L’intégration économique (…) aidera à réduire les risques d’un véritable conflit armé”, a ainsi estimé Guo Yu, analyste chez Maplecroft.

“Au bout du compte, c’est le développement économique et l’amélioration du bien-être qui comptent le plus (…). Avec plus de bien-être vient la modération”, a renchéri Iman Pambagyo, directeur général du commerce international en Indonésie.

Autre écueil, le RCEP, qui serait dominé par la Chine, pourrait constituer un contrepoids à un troisième projet, le Partenariat trans-pacifique (TPP), en cours de discussion entre les Etats-Unis et dix autres pays de la région.

Alors que l’Asie-Pacifique est devenue une priorité stratégique pour Washington, des responsables américains espèrent que le TPP pourrait déboucher sur une zone de libre-échange dans la région.

Mais la Chine semble réticente à y participer.

La lutte d’influence entre Pékin et Washington et leurs querelles commerciales rendent “tout simplement infaisable dans le climat diplomatique actuel” une zone de libre-échange incluant les deux premières économies mondiales, a souligne Guo Yu.